Le directeur de la collection Courants Noirs nous propose ici un petit roman policier tout ce qu’il y a de plus correct.
Deux meurtres apparemment sans rapport, un patron de presse qui veut se servir de cette affaire pour monter un gros dossier et sauver ainsi son journal, un journaliste ambitieux avec un lourd secret, et un ado sans père, débrouillard et impulsif. Le tout, allié à une solide documentation historique (qu’on retrouve, comme à chaque fois dans ces “Courants Noirs”, dans les quelques pages d’annexe), était très prometteur.

Le prologue, très énigmatique, capte immédiatement notre intérêt, notamment dans l’évocation d’un mystérieux personnage qui use d’os et… d’alchimie ? Curiosité piquée, on se rue sur les pages suivantes, découvrant Jules, l’ado dévoué à sa pauvre mère et au père défunt. Lorsque le patron de “L’aube de Paris”, chez qui il est commis, l’adjoint à Victor Hyvert, le reporter vedette, pour lui apprendre le métier, on salue le passage obligé du duo de figures classiques père-fils de subsitution.
Mais Thierry Lefèvre ne sombre pas dans l’évidence, et ces deux-là se font des cachotteries tout autant qu’ils malmènent le schéma attendu : Jules, bien qu’impulsif, se révèle souvent plus posé et pragmatique que son aîné de dix ans. Quelques notes d’humour, distillées par la neurasthénique Proserpine, sont aussi agréables.

Mais ce ne serait pas médire que de chipoter quelque peu sur « Attaques nocturnes ». En effet, les mystères s’envolent après les 100 premières pages, soit la moitié du roman, et la suite accumule les complots, les questions sans réponses, avant une fin un peu trop brutale. Autant que les deux héros, le lecteur, d’abord dans le brouillard, est uniquement spectateur de la résolution rapide de l’affaire, conclue dans les dix dernières pages par une solution qui fait un peu sortie du chapeau.
Thierry Lefèvre s’y entend très bien pour rendre l’ambiance des Halles parisiennes du XIXe siècle, néanmoins cette peinture pittoresque et réaliste prend trop souvent le pas sur la distillation des indices, et le contraint parfois à livrer un peu en vrac des révélations majeures pour la compréhension des meurtres.

En tant que lecteur adulte, j’ai eu la sensation qu’après un départ alléchant, et la mise en place de l’intrigue via le début d’enquête, l’auteur comme ses héros était victime des évènements qui s’enchaînent en cascade, mais que malgré cela, il n’a pas voulu faire trop épais, peut-être pour ne pas rebuter le jeune lectorat visé par la collection. « Attaques nocturnes » manque tout simplement de temps et d’espace. Cinquante à cent pages de plus n’auraient pas été de trop, pour assimiler la somme de détails historiques comme pour dérouler l’enquête de manière plus compréhensible.

Le roman n’en est pas pour autant désagréable à lire, justement grâce à sa documentation, et ravira les amateurs (passés et futurs) de Jules Verne ou des « Mystères de Paris ».

J’ai gardé espoir une centaine de pages avant de rencontrer la première coquille, pour n’en relever finalement que six, et encore, rien de grave.

Attaques nocturnes - corrections

Titre : Attaques nocturnes
Auteur : Thierry Lefèvre
Couverture : Aurélien Police
Editeur : Gulf Stream
Site Internet : fiche du roman
Collection : Courants Noirs (et la collection a désormais son blog !)
Pages : 223
Format (en cm) : 14,4 x 21,8 x 2,1
Dépôt légal : septembre 2008
ISBN : 978-2-35488-019-4
Prix : 12,50 €