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Fleurs de Dragon
Jérôme Noirez
J’ai Lu, Fantasy, n°9046, roman (France), enquête japonaise, 253 pages, août 2009, 6,70€

Le Japon du XVe siècle est en proie à la guerre civile. Kyôto, la capitale, a été dévastée par dix ans de conflit, et l’autorité du shôgun est contestée. Néanmoins, suite à de mystérieux meurtres de samouraïs survenus dans tout le pays, le shôgun dépêche son meilleur enquêteur, Ryôsaku, sur les traces de ce mystérieux assassin qui laisse dans la bouche de ses victimes un extrait du Sûtra du Lotus, faisant l’éloge de la compassion.

Pour aider le sage officier de police, et le protéger des dangers du voyage, le shôgun lui adjoint trois jeunes samouraïs, héritiers de familles nobles, dont le comportement aurait mérité le cachot. Au contact de Ryôsaku, les trois adolescents vont apprendre la sagesse et la mesure, à coups de maillet sur la tête s’il le faut !



Le roman de Jérôme Noirez est une perle. Assez court (242 pages), il est complété d’un petit historique du Japon à l’époque des faits et d’un lexique illustré sur les armes, le calendrier et les dieux évoqués dans le récit.
On sent l’auteur amoureux du Japon, mais aussi attentif à la perception de l’archipel depuis chez nous. Parmi ses sources, on notera des grands classiques, Akira Kurosawa évidemment, avec une allusion à « Rashomon », mais pas seulement.

Son héros, l’enquêteur Ryôsaku, est l’archétype du sage asiatique. Brandissant son maillet, qui contient l’esprit protecteur de sa famille, il distribue la sagesse aux trois ados qui l’accompagnent, mais aussi à lui-même, preuve d’humilité et de modestie tout à fait dans l’esprit du pays du Soleil Levant. Ainsi, Jérôme Noirez associe avec légèreté l’humour aux leçons de son personnage.
Les amateurs retrouveront également une proximité entre Ryôsaku et le célèbre Juge Ti, l’enquêteur zen et chinois de Robert van Gulik (1910-1967, son œuvre est disponible chez 10/18, collection “grands détectives”), un personnage repris avec succès par Frédéric Lenormand qui n’a pas à rougir des « Nouvelles Enquêtes du Juge Ti », publiées par Fayard et en poche chez Points, dans une écriture plus contemporaine mais une égale érudition.

L’esthétique des quelques combats, sans pencher vers le manga et sa course au superlatif, est l’occasion de belles scènes où l’on retrouvera la pointe d’exagération qui faisait (entre autres) le charme du « Zatoïchi » de Takeshi Kitano. Le soupçon de fantastique ajoute au danger, car on doutera longtemps de l’humanité de l’ennemi dans ce pays et cette époque de kami, tengu et autres démons.

Le roman a bien entendu une dimension initiatique, dans le transfert de sagesse de ce vieux policier à ces trois ados de bien piètre mine au début de l’histoire : Kaoru est superstitieux et ne pense qu’aux plaisirs faciles, Keiji souffre du seppuku auquel un rival a contraint son père et ne vit que pour la vengeance, enfin Sôzô est un artiste que ses parents ont forcé à apprendre l’art du sabre dès l’enfance. Tous trois (enfin, Kaoru moins que les deux autres, mais il est le baka, le pitre de la bande, et le principal moteur de l’humour du récit) vont apprendre, à coups de maillet, les qualités qui leur font défaut, la patience, la justice, le calme, la tempérance… pour devenir de bons samouraïs et des hommes d’honneur.

Enfin, l’auteur sait alterner enquête, mystère, leçons de vie, combats, moments contemplatifs et rivalités de pouvoir avec un brio déjà souligné plus haut. En si peu de page, il nous livre un condensé, ou plutôt un concentré (car il ne sacrifie pas la qualité à la quantité), des œuvres du genre.
La fin, ouverte, laisse entrevoir d’autres aventures de Ryôsaku et de ses trois apprentis. Néanmoins, on pourra lire ce « Fleurs de Dragon » sans craindre les questions sans réponses, car en bon enquêteur, Ryôsaku fait la lumière sur tous les mystères de cette sombre histoire.

Un gros bémol à mon goût, beaucoup de coquilles (25) sur des accents (des à pour des a…), des traits d’union, des virgules sur des subordonnées ou des points d’interrogation qui se changent en exclamation. Le détail ci-dessous :

Texte - 2.4 ko
Fleurs de dragon - corrections


C’est dommage, mais cela ne doit pas vous priver de cet excellent roman, entre divertissement intelligent et policier historique, qu’on dévorera hélas presque trop vite.

Nous aurons bientôt l’occasion, sur Yozone, de vous parler des alléchants romans édités par Gulf Stream, l’éditeur original de « Fleurs de Dragon », dont la suite, intitulée « Le shôgun de l’Ombre ».


Titre : Fleurs de dragon (2008)
Auteur : Jérôme Noirez
Couverture : Miguel Coimbra
Editeur : J’ai Lu
Editeur original : Gulf Stream / Courants noirs, 2008
Site Internet : fiche du roman chez J’ai Lu & chez Gulf Stream
Collection : Fantasy
Numéro : 9046
Pages : 253
Format (en cm) : 11 x 17,8 x 1,3
Dépôt légal : août 2009
ISBN : 978-2-290-01637-4
Prix : 6,70 €



Nicolas Soffray
31 octobre 2009


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Couverture de l’édition originale, chez Gulf Stream, par Aurélien Police



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