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Guerre de la Couronne (La) – T1 : Forteresse Draconis
Michael A. Stackpole
Bragelonne - Milady, Fantasy, roman, traduit de l’anglais (États-Unis), fantasy, 576 pages, juin 2009, 25€

Les incursions des troupes de la redoutable reine du Nord, Chytrine, dans les territoires du Sud deviennent toujours plus nombreuses et plus menaçantes. Une prophétie donne au monde des raisons d’espérer la vaincre, mais elle est bien énigmatique.
Suite au vol d’un objet elfique qui manque de mal tourner, Will est pris sous la protection de Corbeau et de Résolu, un Vorquelfe. Orphelin, Will ne sait rien de ses origines, pourtant tous deux voient en lui un grand destin. Mais qui est-il vraiment ?
La princesse Alexia, le général Adrogans, la magister Orla et son élève Kerrigan… ils sont nombreux à lutter contre les forces de Chytrine. Mais le prix pour l’empêcher de réunir tous les fragments de la Couronne du Dragon est élevé…



L’avis de François Schnebelen

Créateur de jeux vidéo, romancier, Michael Stackpole n’était jusqu’à présent traduit en France que pour ses romans « Star Wars ». Avec ce premier tome de La Guerre de la Couronne, Milady nous le présente sous un autre jour.

Michael Stackpole ne s’étend pas en de longues introductions et entre rapidement dans l’histoire. Dès le premier chapitre, nous y sommes : Will commet son larcin, Résolu et Corbeau le recueillent et s’occupent de lui. Longtemps on ignore tout des raisons qui dictent leur conduite.
La découverte du monde imaginé par l’auteur et de son Histoire se fait graduellement, sans alourdir le récit par de longs passages descriptifs. Stackpole met du rythme dans « Forteresse Draconis » et souvent cela se fait dans le sang, car les batailles sont nombreuses et la pitié n’y est pas de mise. Chytrine s’en prend aux forces vives des territoires du Sud en s’attaquant aux jeunes générations. Elle aime enlever tout espoir et la plupart de ceux qui ont tenté de la détruire ont fini asservis, devenant ses lieutenants aux terribles pouvoirs, les sullanciris.
La très belle couverture signée Marc Simonetti illustre parfaitement une scène du livre. Le dragon aux mains de Chytrine met à mal une citadelle assiégée. Ces bêtes aux énormes pouvoirs constituent justement un des enjeux de la guerre que se livre les deux parties. Par le passé, une couronne qui permet d’en être le maître a été façonnée. Depuis elle a été brisée en plusieurs fragments, disséminés à travers le monde. Plus Chytrine en détiendra, plus les dragons sous sa coupe seront nombreux.
Même si cette couronne de pouvoir et ces sullanciris rappellent furieusement un chef-d’œuvre de la fantasy, Stackpole nous livre là un bon bouquin du genre, une bonne pioche en cette année 2009.

Dans les batailles, la magie n’est pas forcément décisive, car les deux camps la possèdent. Par contre, la technologie confère une supériorité manifeste. Les dragonels (les canons) et les draconnettes (les fusils) apportent un avantage certain. Des hommes avec des membres métalliques deviennent des combattants redoutables. L’auteur ne se cantonne pas juste aux épées, enchantées ou non, et à la magie, il élargit sa vision, s’inspirant de notre propre Histoire.

Les principaux personnages sont assez nombreux , mais Michael Stackpole tourne le récit de façon à nous les présenter en temps voulu. Malgré un sujet principalement guerrier, les femmes ne sont pas oubliées. L’ennemie est de sexe féminin et c’est la princesse Alexia qui est générale des territoires du Sud. Les caractères, les qualités, les histoires personnelles différent suffisamment pour rendre le tout plus intéressant et concourent à la réussite de « Forteresse Draconis ». Certains changent, d’autres luttent contre leurs peurs, sont en proie au doute ou se battent pour leurs terres ancestrales… Chacun possède sa propre vision des enjeux du conflit.
Les intrigues entre souverains, les luttes d’influence entre royaumes guident les choix stratégiques et ce qui peut sembler simple devient tout de suite beaucoup plus compliqué.

Avec « Forteresse Draconis », Michael Stackpole nous présente un livre complet, intéressant et qui satisfera nos envies de combats et de messes basses. Les surprises (bonnes) sont assez fréquentes et la fin présage d’une suite tout aussi musclée et fertile en rebondissements.
Ce tome 1 de La Guerre de la Couronne se lit très bien, les évènements relatés, ainsi que ses acteurs, ne lassent jamais. Espérons que les suites tiendront les belles promesses de ce très bon cru de fantasy traduite en 2009, hélas émaillé de quelques fautes dues à une relecture peut-être trop rapide. Mais ne boudons pas notre plaisir…

L’avis de Nicolas Soffray

Des influences marquées


Avec « Forteresse Draconis », Mickael A. Stackpole nous propose sa grande épopée de fantasy, inspiré des maîtres du genre, Tolkien en premier, mais pas que.
L’histoire en elle-même n’est guère nouvelle. Un royaume est menacé par une sorcière très puissante, Chytrine, l’ancienne apprentie du précédent grand méchant qui a menacé la liberté du monde.
À ses côtés, d’anciens héros qu’elle a dévoyés, avec à leur tête un père et son fils. Une prophétie annonce que c’est le petit-fils qui mettra fin à leur existence, qui chassera la sorcière et rendra leur terre aux elfes…
Tous auront saisi l’allusion aux “Nazgûls” du « Seigneur des Anneaux », les lecteurs de David Gemmell auront reconnu l’influence de « Renégats » (actuellement réédité par Mnémos). Stackpole ne se hisse pas à la hauteur du défunt anglais. Même si les batailles qu’il décrit sont impressionnantes, le siège de la Forteresse Draconis, qui ne débute pas avant la 500e page, est bien loin d’égaler celui de la Dros Delnoch dans « Légende » (Chez Bragelonne et enfin en poche chez Milady).

De l’honnête fantasy


Les qualités de « Forteresse Draconis » sont à chercher dans l’intrigue politique fouillée, les races non-humaines, les quelques originalités liées à la magie (et ses différentes formes), et la technologie, des canons-dragonels aux “meckanshii”, mi-hommes mi-machines. On ne parlera pas d’ère pré-industrielle, car la magie est encore à la source de beaucoup de choses.

Si la politique est le point fort du récit, avec des alliances officielles et des haines secrètes (et vice-versa), la profusion de personnages peut s’avérer déstabilisante, surtout au niveau historique. Bien que Résolu et Corbeau fassent l’éducation de Will, les informations tombent au compte-gouttes, un peu morcelées, et il n’est pas évident de relier chaque personnage à la bonne époque (et à la bonne guerre). Le principe des sullanciri, les héros dévoyés, n’aide pas : les premiers héros déchus prennent un autre nom, les seconds, partis les vaincre et retournés, également, mais on continue à les évoquer sous leur nom originel. Ajoutez à cela que deux sont père et fils, leurs prénoms abrégés… Idem pour le Traître, difficile à cibler dans cette nuée, au point qu’on se demande qui il a trahi, et quand.

Incidents de parcours


On aura un premier regret en découvrant l’inévitable carte qui ouvre tout roman de fantasy récent. Elle est ici plombée par un manque absolu de détail : seuls les royaumes sont indiqués, et la forteresse qui donne son titre au roman. Aucune capitale, rien des points de repère donnés au fil du récit ! Pas même le point de départ. Idem pour l’échelle, il faudra se fier aux temps de parcours à pied, à cheval ou en bateau. Pourtant, les tribulations de nos héros, Will, Alyx et Kerrigan, vont leur faire faire bien du voyage avant d’atteindre Forteresse Draconis.

Malgré la fluidité du récit, on est parfois un peu bousculé, autant que les héros, et on saute d’une mission à une autre. Les 575 pages de « Forteresse Draconis » ne manquent donc pas d’action, ni de quelques passages obligés de réflexion sur la guerre, le déracinement, le racisme, pas encore trop mal tournés.
Le style n’est pas toujours impeccable. Certaines descriptions semblent vouloir nous ramener à l’esprit des images de la trilogie de Peter Jackson (même si le roman est concomitant à la sortie de « La communauté de l’Anneau »), clinquantes et un peu empesées. La description des batailles est chaotique, au point qu’on s’interroge parfois sur qui tire sur qui, et qui charge qui. Dommage. Par contre, les dialogues sont bien traduits, Will conservant un langage des rues qui tranche avec la grammaire plus travaillée des adultes.
Enfin, ainsi que le soulignait déjà mon camarade ci-dessus, l’édition n’est pas impeccable. 45 coquilles relevées, principalement des problèmes d’accords ou de conjugaison, mais aussi quelques mots manquants ou des termes (pourtant spécifiques à l’histoire) changeant de genre. Le détail dans le document ci-dessous :

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Forteresse Draconis - corrections

Un bon divertissement


Malgré tout le mal que j’en dis, « Forteresse Draconis » n’est pas, et de loin, désagréable à lire, et plaira aux débutants en fantasy, même s’ils buteront sur les détails énoncés ci-dessus. Les autres la liront sans déplaisir, mais trouveront plutôt leur bonheur chez l’éditeur-mère, Bragelonne.
N’oublions pas non plus que le roman date de 2001, et que Bragelonne a traduit de très bons auteurs de fantasy depuis, relevant le niveau d’exigence du lectorat français.
Mon espoir final sera que cette honnête histoire de fantasy ne s’éternise pas trop, malgré la qualité du divertissement qu’elle offre. Cinq cents autres pages devraient suffire, en évitant les détours inutiles, à mettre fin au règne de Chytrine. Espérons donc que ce ne soit qu’une trilogie (pour concilier espoir et réalité), et pas une inutile surenchère à rallonges façon « l’Épée de Vérité ».


Titre : Forteresse Draconis (Fortress Draconis, 2001)
Série : La Guerre de la Couronne (The Dragon Crown War Cycle)
Auteur : Michael A. Stackpole
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Noémie Saint-Gal
Couverture : Marc Simonetti
Éditeur : BragelonneMilady
Collection : Fantasy
Site Internet : Roman (Site éditeur)
Pages : 576
Format (en cm) : 23,8 x 15,3
Dépôt légal : juin 2009
ISBN : 978-2-8112-0114-2
Prix : 25 €



François Schnebelen
Nicolas Soffray
28 août 2009


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Illustration de Marc Simonetti



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