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Cinq bières, deux rhums !
Jean-Bernard Pouy
Baleine, le Poulpe, roman (France), polar octopode, 160 pages, mai 2009, 6,50€

Gabriel est envoyé par Gérard, le patron de son bistrot préféré, à la découverte des bières de Belgique. Mais le Poulpe ne peut éviter les ennuis : lorsqu’apparaissent deux cadavres, sans rapport apparent entre l’un et l’autre, Gabriel mène l’enquête au pays des corons et des péniches…



Aaah, le Poulpe ! Déjà rangé au panthéon des héros-cultes du roman populaire francophone, ce héros créé comme un gag (puisque selon Pouy lui-même, il ne devait y avoir à l’origine que dix romans) connut un succès inattendu suivi d’une carrière aussi atypique que le personnage lui-même.
Immense succès public pour une maison nouvellement créé (Baleine), il attira au polar tout un nouveau lectorat par sa nouveauté même (en-dehors de l’aspect politique) à une époque pré-Bush où on commençait à en avoir marre de devoir connaître New York ou Los Angeles mieux que son propre coin de rue pour être dans le coup.
Las, comme souvent, une trop grande production (jusqu’à deux par mois) a trivialisé la série — ou les romans d’auteurs les plus connus n’étaient pas forcément les meilleurs — et Baleine fut phagocyté par Big Business qui l’a vite recraché…

Or Baleine, malgré le fiasco commercial — à défaut d’artistique — des “Club Van Helsing” (voir ici et ), continue de tenir le coup bon an mal an et reprend son titre-phare. Tant mieux : en ces temps de sinistrose, on a besoin d’un héros comme Gabriel Lecouvreur. Lire un (bon) Poulpe, c’est un peu comme entrer dans son bistrot préféré : on sait à peu près ce et qui on va y retrouver, et pourtant, l’expérience est toujours différente, quoique en décor confortable. C’est le cas dans cette nouvelle aventure qui relève du polar d’atmosphère.

Fidèle à la tradition octopodesque, Pouy se livre à une description de « petites gens », ici la vie quotidienne dans un Nord loin des clichés, s’attardant sur la vie quotidienne d’autres « damnés de la terre » que sont les conducteurs de péniche, microcosme décrit sans angélisme ni misérabilisme. Pouy y dissèque également avec minutie l’ennui des petites villes et les dimanches gris et immobiles qu’il faut avoir connu pour apprécier. Le tout avec, une fois de plus, un luxe de détails qui font vrai. C’est même ce qui fait que ce roman sans prétentions (sinon celle, immense, de distraire) reste en mémoire, en donnant l’impression d’avoir entrouvert une porte sur un univers peut-être inconnu, avec ses codes et ses caractéristiques, et qui est pourtant là, près de chez nous, à portée de la main.

Pouy soigne également le style, avec de nombreux petits jeux de langage qui font également partie de cette tradition qu’il a contribué à créer. Tout au juste pourra-t-on regretter que la résolution de l’énigme purement policière soit un petit peu expédiée, et bien sûr, on pourra toujours s’interroger sur la morale de ce justicier qui se croit obligé de se payer « sur la bête » pour ne pas devenir un simple flic. Mais la controverse est aussi vieille que la série.

Quoi qu’il en soit, ce court roman bâti à l’économie de moyens se lit d’une traite, un sourire aux lèvres. Si le Poulpe 2008 était dominé par l’excellent « La ballade des perdus » de Jean-Marc Ligny, le 2009 semble être un bon cru…


Titre : Cinq bières, deux rhums !
Auteur : Jean-Bernard Pouy
Couverture : Miles Hyman
Editeur : Baleine
Collection : Le Poulpe (N°261)
Site internet : page éditeur
Pages : 160
Format (en cm) : 10,8 x 17,7
Dépôt légal : mai 2009
ISBN : 9-782842-194604
Prix : 6,5 €



Thomas Bauduret
3 septembre 2009


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