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Un peu d’originalité, que diable !
Zen City de Grégoire Hervier
Délices & Daubes n° 147


Il est des éditeurs qui ont bonne réputation parce qu’ils font des beaux livres et qu’ils choisissent bien ce qu’ils publient. Ainsi en est-il de l’éditeur Au diable vauvert. Mais, c’est sans doute inéluctable, il y a des exceptions.

Ce bouquin « Zen City » présente, à mes yeux fatigués et narquois, un nombre de défauts si significatif que vous pourriez me remercier d’être allé au bout des 348 pages.

D’abord l’histoire est sans aucune originalité. Un vendeur de chips (non, pas de frites) électroniques crée une cité expérimentale où tous les habitants se font implanter une puce qui sert de GPS pour les localiser partout et de carte de crédit pour acheter tout ce qu’ils veulent. La publicité ciblée grâce à la puce permet de les exploiter à donf. On a donc, ô comme c’est original, la énième dénonciation d’une sociéte de consommation mâtinée de Big Brother qui entrave la liberté. Le bouchon est poussé sans grande subtilité à grand renfort de technologie informatique d’aujourd’hui et de name dropping où on cite tout le temps des marques connues, histoire de se faire complice du lecteur qu’on espère un peu hacker/jeune/moderne, comme l’auteur bien propre sur lui qui expose sa tronche en 2e de couv’.

Ensuite, sans doute pour s’écarter légèrement des sentiers rebattus, le héros est un con. Ou plus exactement un moyen, un raté, un envieux un peu nul mais pas trop, un qui se fait systématiquement posséder par tout le monde. D’accord c’est assez peu courant mais l’inconvénient c’est que le lecteur ne risque pas de le trouver sympathique ou intéressant, ni donc de s’y projeter par empathie. Parce que c’est quand même le héros, le narrateur, et ce n’est pas un anti-héros comme dans des séries télé. Il lui arrive même de baiser ou de faire un peu d’escalade.

La logique interne n’est pas toujours au rendez-vous. Malgré les GPS implantés sous la peau et les caméras de surveillance partout, les gens se font suivre pour savoir où ils vont, ou ils peuvent disparaître.

L’habituel mensonge de 4e de couv’ annonce un « redoutable thriller d’anticipation », rien que ça. Et ben on est loin du compte, hein. On n’halète pas une seconde et il y a environ 20 pages d’action en tout vers la fin. Sinon on voit tout arriver longtemps à l’avance et on n’est jamais surpris par les prétendus retournements de situation.

La forme se veut moderne : retranscription du blog du bonhomme Dubois, de podcasts de ses conversations enregistrées, le tout délayé dans une sauce extérieure puisque ces « documents » ont été reçus par la poste par l’éditeur (nouveau comme procédé, hein ?). Du coup l’auteur n’a même plus à se fatiguer à faire des phrases, puisque c’est son héros qui blogue. Il le dit lui-même page 141 :« ...peut toujours intéresser un éditeur, ils publient n’importe quoi en ce moment. »

Histoire d’achever le bouquin en beauté, on nous gratifie en annexe d’un résumé des recherches historico-bibliographiques sur les rapports entre cerveau et électricité depuis Galvani et Mary Shelley jusqu’aux manipulations du comportement par excitations de zones cervicales.

J’aurai du me méfier : Grégoire a eu le Prix Méditerranée des lycéens pour son premier roman.


Henri Bademoude
22 mars 2009


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