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Lovecraft
Keith Giffen & Enrique Breccia
Soleil


C’est à partir d’un scénario de film d’Hans Rodionoff que Keith Giffen (Legion of Super-Heroes, Justice of League of America, Lobo...) a adapté une version de la vie de Lovecraft tout à fait remarquable.
John Carpenter qui profite de l’espace de l’Avant-Propos, résume fort bien ce sentiment.
« Est-il possible que toutes ces choses horribles et reptiliennes dont parlait Lovecraft aient existé ? Que ce bon vieil Howard ait été le seul obstacle qui nous ait séparé de ces créatures innommables, indicibles, venues de l’au-delà ? »
Et oui, Lovecraft n’a-t-il pas glissé vers la folie car toute sa vie il fût le gardien d’une porte séparant notre monde de cette peur immonde prête à nous submerger ?

A partir de cette idée, se construit, autour d’éléments biographiques réels, la charpente d’une histoire démente confrontant dès sa petite enfance un être humain à la solitude et à une torture mentale affreuse. Car il sera toujours dans l’impossibilité de dire ces visions aussi authentiques qu’horrifiques, de partager cette veille de nuit comme de jour à la porte d’un cauchemar que jamais l’humanité ne pourra assumer !
Oui, dès sa prime enfance, Lovecraft devînt le gardien du Nécronomicon, ce livre aussi nommé Al Azif, rédigé par Abdul Al-Hazred. Qui l’ouvre et le lit sera frappé de démence.
Mais sur les conseils de son père (enfermé au Butler Hospital de Providence...), l’enfant veille sur ce livre si « vivant » qu’il lui arrive même de le... nourrir !
Lié au Nécronomicon, Lovecraft en tirera ses terreurs, ses récits littéraires, sa prison mentale, son impossibilité à pouvoir vivre avec les autres.

Cette formidable histoire, cette fiction que Lovecraft aurait pu accepter comme miroir possible de sa vie, avait besoin d’un artiste original pour l’illustrer. C’est le dessin et la peinture de l’Argentin Enrique Breccia qui vont transformer ce livre en un cauchemar halluciné. La folie, la force immonde du Nécronomicon transpirent de chaque page, de presque chacune des cases qui l’évoquent. Trait acéré, ciselé comme gravure, mariage de couleurs écœurantes, ombres visqueuses, contrastes violents, scènes rendues obscènes par les collages et superpositions de styles se repoussant... Breccia se livre avec force, emprunte ces chemins d’horreur comme personne ne l’avait fait auparavant pour évoquer le reclus de Providence.
Sur la dernière page, Lovecraft repart dans l’ombre, reprenant en solitaire la route de son cauchemar dans les volutes de vapeur d’un train qui part avec celle qu’il aime, mais qui ne peut tout comprendre... et le lecteur peut refermer ce livre aussi envoûtant qu’effrayant.

Il reste encore un mystère à lever ! Celui de l’influence qu’il a toujours de nos jours sur les écrivains de fantastique. Mais ces derniers savent, j’en suis persuadé : Lovecraft vit toujours car pour l’instant, la porte reste fermée !

PS : en Avant-Propos, John Carpenter signale que Lovecraft est un des rares auteurs dont le nom a donné naissance à un adjectif très utilisé et qui définit un style : ne dit-on pas un récit lovecraftien ? Une distinction rare qu’en fan de science-fiction je souligne pour un auteur majeur du genre : Philip K. Dick. Car dickien est devenu également une référence pour au moins ceux qui ont eu le bon goût de lire son œuvre (et ils sont nombreux en Europe)..

En savoir plus sur Lovecraft : La Clef d’Argent



Fabrice Leduc
19 novembre 2004




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Lovecraft chez Soleil



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Le reclus de Providence



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