S’il existe un auteur totalement politiquement incorrect dans l’univers du comics, c’est bien Franck Miller. Avec son dessin caractéristique parfois grossier, parfois d’une incroyable beauté, il nous offre deux histoires mettant en scène le chevalier de Gotham, Batman.
Batman, le retour du retraité
« The Dark Knight Return » nous amène 10 ans après une retraite anticipée de Bruce Wayne. Mais le crime n’a pas quitté Gotham et ses pires ennemis sont même sur le point d’être tous relâchés. D’abord, Harvey Dent, dit Double Face, qui a subi une opération lui permettant de retrouver un visage normal. Mais sa folie ne peut se soigner par un coup de bistouri, même inspiré ! Dent reste le même psychopathe. Ensuite, ce n’est pas moins que le Joker, sensé être devenu un prisonnier modèle, qui retrouve la liberté.
Voilà deux bombes à retardement libres d’exploser là où elles le souhaitent. Bruce Wayne se voit donc obligé de revêtir une nouvelle fois le costume du justicier masqué.
Un autre péril menace aussi Gotham, un groupe de terroristes, les Mutants, veut mettre à terre le Dark Knight.
Si combattre Double Face pourra paraître une partie de plaisir, les duels face au chef des mutant et surtout le Joker laisseront le justicier de Gotham en bien piteux état. Son ultime affrontement avec le Joker s’accompagnera de centaines de morts, victime du Poison du Joker.
Une critique acerbe du pouvoir et de la presse
« The Dark Knight return » nous montre l’image que les médias ont créée autour du justicier, le décrivant comme un dangereux psychopathe, l’ennemi public numéro un. Mais ce sont des médias pourris par un pouvoir tout aussi haïssable : un président entre Ronald Reagan et Bush, un vrai fou va-t-en-guerre. Les classiques experts viennent ponctuer les combats du justicier de Gotham par des pseudo analyses de la psychologie du Batman. Les medias cherchent à discréditer le héros aux yeux du peuple et cacher ainsi l’incompétence de leurs leaders politiques à résoudre leurs problèmes. Le patriotisme américain prend ici un sacré coup dans le plexus : la guerre du Corto Maltese est la plus minable excuse pour montrer la toute puissance d’une armée, quitte à provoquer un conflit nucléaire – Franck Miller serait-il visionnaire ? Mais le pouvoir et les médias ne sont pas les seuls à se faire allumer par la plume d’un auteur déchaîné.
La lâcheté des super-héros de DC
Nos grands super-héros perdent de leur superbe, en particulier l’homme d’acier, Superman. Il est accusé par Wayne d’avoir vendu la Ligue de Justice au gouvernement américain et d’être devenu le pantin du président. Les conclusions du conflit du Corto Maltese en seront une preuve flagrante. Ce sera la seconde partie de « l’Absolute Dark Knight », « The Dark Knight Strike Again », qui révèlera le fin mot de l’affaire. Superman, Wonder Woman et Captain Marvel ont passé un accord avec le gouvernement afin que disparaissent les super-héros et que les seuls héros défendant la Nation soient de bons vieux humains normaux. Toutefois, ce serait trop simple de s’arrêter là. En réalité, Lex Luthor est celui qui tient les rênes du pouvoir ou plutôt de la corruption et du chantage sur ces trois super-héros. Mais Wayne a bien des surprises en réserve. Le papy est encore bien en verve et sa vengeance sera sans pitié.
Une œuvre titanesque incontournable
Franck Miller nous montre donc un Batman rejeté par ceux qu’il tente si désespérément de protéger. Mais c’est aussi un Batman de plus en plus sombre, prêt à tout pour gagner et rétablir la paix à Gotham, quitte à l’imposer de force. Le double de Bruce Wayne est quasiment un ego psychotique, son « Mr. Hide ». Et Miller nous offre pour le même prix une critique cinglante de la société américaine et des pseudo principes des soi-disant bien-pensants.
Alors ne vous laissez pas arrêter par des dessins souvent centrés sur les visages des personnages, tracés par un coup de crayon brutal, avec peu de fonds ou de décors. Mais dites-vous que vous allez savourer un scénario hallucinant et des planches sur une seule voire une double page d’une beauté époustouflante.
« L’Absolute Dark Knight » est définitivement un chef-d’œuvre qu’il faut impérativement posséder dans sa bibliothèque.
Frédéric Leray
Que dire si ce n’est que Franck Miller a ressuscité Batman dont la franchise avait bien besoin d’un coup de boost. Il change de ton, enlève le côté mièvre de la série et relance la bête qui sommeille au fond d’un homme qui a senti la jeunesse lui échapper.
Le coup gagnant se joue en 1986 avec « Batman : the Dark Knight return », le second, en 2001, « the Dark Knight strikes again » passe plus difficilement, le Maître ayant évolué graphiquement et ne se laissant compter aucune concession.
La force de Miller pour traverser les époques et ne subir qu’à peine le poids du temps.
Cette version « absolue » sera pour certains l’occasion de combler un vide, de découvrir une œuvre qui aura, au-delà de l’industrie des comics, fortement marqué le cinéma.
Le prix jouera en défaveur des plus modestes (c’est peut-être l’occasion du cadeau « absolu » ?), mais sachez que cette version Panini Comics se présente sous la forme d’un imposant coffret contenant les deux histoires rééditées en (très) grand format, avec une nouvelle introduction de l’auteur, des croquis et des commentaires.
Ah ! Et une nouvelle couverture !
Fabrice Leduc
Absolute Dark Knight
Scénario et dessin : Franck Miller
Encrage : Klaus Janson
Couleur : Lynn Varley
Éditeur : Panini Comics
Episodes originaux : Batman : the Dark Knight return 1 à 4 ; Batman : the Dark Knight strikes again 1à 3
Date de parution : 21 août 2008
Format : broché
Pagination : 512 pages couleurs
Prix public : 70 €
Numéro ISBN : 2-80940-0345-9
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Droits photos et illustrations : Panini Comics, DC Comics et Frank Miller
