Durée : 1h33
Genre : Drame
Avec Marina Foïs (Darling), Guillaume Canet (Roméo), Océane Decaudain (Catherine, Darling petite), Anne Benoit (la mère Suzanne), Marc Brunet (le père Georges), Sissi Duparc (Chantal Clément), Hervé Lassïnce (Vincent Blandamour), Eloise Charretier (la collègue de cantine), etc.
L’histoire décrit la lente descente en enfer d’une femme qui n’a pas eu la chance d’avoir une vie sereine. Elle a grandi dans une famille qui n’a pas su l’aimer pour qui elle était, qui ne lui a pas donné les clefs d’une vie à réussir. « Darling », inspiré de l’histoire vraie de Catherine Nicolle, est l’adaptation du roman de Jean Teulé.
La première scène de « Darling » est brutale. Un radiologue téléphone à un collègue médecin pour lui énumérer les violences qu’a connu sa patiente. Mais la jeune femme quitte l’hôpital et ne se fait pas soigner. Elle ne veut pas porter plainte. Ensuite, le film est un long flash back qui débute par l’enfance de Catherine et qui se termine par un faux happy end.
La vie de l’héroïne ressemble à un parcours du combattant. Adolescente, Catherine vit avec ses parents dans une ferme de la Basse Normandie. Elle est illettrée, elle est mal aimée. Elle passe sa vie à rêver qu’un routier de la nationale qui longe la maison saura la délivrer de sa vie misérable. Sa parenthèse enchantée, elle la passe à la boulangerie du coin, où elle travaille avec sa seule amie. Elle s’y rend en courant le long de la nationale où se suivent sans répit les camions.
Quand la boulangère quitte la région, Catherine se retrouve seule. Mais elle découvre la CB et passe ses soirées à dialoguer avec les routiers. C’est ainsi qu’elle rencontre Roméo, qui deviendra son mari. Ce mariage raté la plonge dans une vie de sexe, de violence, de misère. Elle a trois enfants et lorsqu’un soir, son mari et sa maîtresse la martyrisent, Darling trouve enfin le courage de partir. Elle abandonne tout, se retrouve accusée d’avoir quitté le domicile familial et doit se battre pour récupérer ses enfants...
La force du film tient à 4 choses : l’effet histoire vraie qui nous happe vers une réalité brutale et sans concession, l’interprétation de Guillaume Canet et de Marina Foïs, la pudeur de la cinéaste qui épargne au spectateur les scènes de viol et de torture et le ton, cynique, décalé et parfois drôle lors de la voix off.
Pendant tout le film, on ne cesse de se dire, avec effroi, qu’on est en train de vivre une histoire vraie. Catherine l’adolescente rêveuse a existé, Catherine la jeune apprentie boulangère a attendu son prince charmant, Darling l’insouciante a épousé un homme qui s’est avéré par la suite être violent, sans âme, sans limites... Le processus d’identification frappe le spectateur en pleine figure.
Guillaume Canet, à qui on pourrait donner le bon dieu sans concession, campe un homme brutal, vicieux, faignant, alcoolique. Le personnage, détestable à souhait pour toutes les violences qu’il inflige à sa femme, est pathétique. On n’éprouve aucune compassion pour lui, uniquement de la désolation.
Marina Foïs, que l’on a connue dans la troupe des Robins des Bois, nous arrache des larmes au fur et à mesure que le film déroule les épreuves de la vie de Darling. L’actrice, pour coller à son personnage, n’hésite pas à se transformer physiquement. Certaines scènes sont très émouvantes, Marina Foïs transmet son émotion et sa douleur au spectateur au point que l’on se demande où elle a trouvé toute cette force pour interpréter ce personnage. Rares sont les actrices qui nous font autant pleurer...
La cinéaste, en utilisant la voix off, permet d’apporter un peu d’humour au drame. Darling impose son point de vue décalé et il n’est pas rare d’être étonné par ses réflexions détonantes. Quand elle est témoin de la mort de son jeune frère, empalé par un tuyau, elle le compare à un joueur de baby foot. L’humour est souvent un moyen bien utile de se détacher de la réalité et l’adoucir.
Quand au procédé du hors champ, il évite au spectateur de vivre des scènes violentes mais il l’engage à les revivre subjectivement, ce est qui bien plus efficace que de montrer les séquences.
Sorti de la projection, on pense à notre vie douillette et sans violence. On pense à Darling à qui l’on espère de trouver enfin un peu de paix. On pense à toutes ces femmes qui vivent dans la douleur et qui n’osent pas quitter la brutalité de leur mari de peur de tout perdre, de peur de ne plus voir leurs enfants. On se dit aussi que le système judiciaire français a encore beaucoup à faire pour protéger ces femmes et pour leur redonner de la dignité.
« Darling » est un film à triple message, nous, elle et les autres... et une histoire qui touche autant est forcément marquante...
Vous qui avez la chance d’aller au cinéma, prenez un peu de temps pour voir ce film. Il est d’une violence intelligente et a le mérite de nous faire réfléchir sur nos conditions qui ne sont pas si moches que ça...
EQUIPE TECHNIQUE
Réalisation : Christine Carrière
Scénario : Christine Carrière
Pascal Arnold
D’après l’oeuvre homonyme de Jean Teulé
Directeur de production : Marie-Jeanne Pascal
Production : Rectangle Productions, France
Gaumont, France
Directeur de la photographie : Gordon Spooner
Monteuse : Martine Barraqué
Matilde Grosjean
Mixage : Christophe Winding
Christophe Vingtrinier
Chef décorateur : Antoine Platteau
Costumière : Catherine Boisgontier
Ingénieur du son : Eric Rophé
Distribution : Gaumont Distribution, France