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Galaxies n°88 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°88, SF - nouvelles - articles - critiques, septembre (!) 2024, 192 pages, 11€

Ce nouveau numéro de la revue est titré « G’laxies », une référence à Philippe Caza, l’auteur qui est aussi l’illustrateur bien connu au style identifiable de suite, comme le démontre la couverture. Même si ce dernier écrit ses propres scénarios de bandes dessinées, qu’il a commis quelques nouvelles à partir de 2001 (une vingtaine en 17 ans), il a vraiment franchi le pas de l’écriture en 2018, signant plus d’une centaine de publications depuis, soit un sacré coup d’accélérateur. La bibliographie en fin de dossier en montre toute l’ampleur avec une multitude de parutions annuelles, même si de nombreux supports sont pour le moins confidentiels.



Même si ce dossier est avant tout consacré à l’auteur Philippe Caza, comment ne pas évoquer sa carrière de dessinateur, celle à laquelle chacun pensera en premier ? Richard Comballot évoque justement ces deux facettes à travers son expérience, il a longtemps échangé avec Caza dans le passé, ce qui a donné « Caza, une monographie » chez Mosquito, avant de le redécouvrir à travers ses nouvelle (“D’un art à un autre”). Pour l’occasion, un nouvel entretien ponctue ce numéro, avant que Caza ne parle de son rapport à l’écriture : Écrire, pourquoi écrire ? Publier, pourquoi publier ? ... puis décline un “Cazabécédaire” en choisissant certaines lettres.
Plusieurs intervenants et non des moindres ont écrit des articles à son sujet : Dominique Warfa signe “Philippe Caza, illustrateur, entre corps manipulés et futurs incertains”, une belle analyse de son œuvre, Jean-Pierre Andrevon, “Caza dessinateur politique” et Ugo Bellagamba, “L’ambre et l’ombre”, à propos de la grande œuvre de Caza, le « cycle d’Arkadi » qui l’a particulièrement marqué. L’ensemble est vraiment intéressant et apporte un bel éclairage sur Caza, même s’il s’agit finalement surtout de sa facette dessinateur. Ce que j’ai le moins aimé finalement (un comble !), c’est sa nouvelle “Les fémines de Vénus”. Il s’agit d’une aventure de Lola Lokidor, taxi g’lactique. Question humour, l’auteur ne fait pas dans la dentelle, c’est à fond les manettes et les jeux de mots ne manquent pas. J’avoue ne pas être amateur, il n’y a pas de juste milieu et cela manque de subtilité pour moi. Pour autant, ce dossier n’en reste pas moins amplement mérité.

Naomi Kritzer a remporté le prix Hugo 2024 de la nouvelle avec “Mieux vivre avec les algorithmes”. Linnea télécharge l’application Abelique et, contre toute attente, trouve du réconfort à ce que son quotidien soit régenté pour son épanouissement personnel. D’abord vivement conseillée, Abelique, à partir du moment où les employeurs n’y trouvent plus leur compte, devient l’application à abattre. La nouvelle s’avère plaisante, elle montre comment une personne peut avoir besoin d’être guidée, que les décisions soient prises par autrui pour qu’elle n’ait pas choisir. À bien y réfléchir, l’auteure n’invente pas grand-chose ici, elle extrapole l’addiction aux réseaux sociaux, aux applications nous tenant toujours informés de tout et n’importe quoi. On y est presque et finalement cela apparait assez facile, mais elle le fait très bien et on se prend parfaitement à l’histoire.

Une femme se déplace sur une Terre dévastée, elle cherche quelqu’un d’autre pour ne plus être seule avec son androïde bricolé avec les pièces dégotées ça et là. Maintenant vieille, elle se souvient avec émotions de sa mère, morte lors de l’incident nucléaire et dont son seul souvenir est... une cassette avec l’enregistrement de son dernier concert en 2026 ! Là j’avoue que la suspension d’incrédulité a pris un grand coup dans la face. De nos jours, qui enregistre encore sur une vulgaire cassette ? Déjà qu’à aucun moment, on n’apprend comment elle a survécu, la voilà qui trouve un lecteur, puis déniche des piles dans un magasin de la même marque... Nicolas de Torsiac m’a perdu sur le coup, car “La vielle dame et l’amer” a abandonné tout semblant de crédibilité. Pourtant il a remporté la seconde place du prix Le Bussy 2024...

Jean-Pierre Fontana livre une amusante nouvelle dans le monde du rugby, mais dans un lointain futur. La coupe du monde de rugby se déroule sur Mars colonisée et la fédération française a monté dans le plus grand secret une vaste opération pour sortir de la médiocrité dans laquelle son équipe nationale est tombée depuis longtemps. Jean-Pierre Fontana habite Clermont-Ferrand, ce qui n’étonnera personne quant au choix de Morgan Parra dans une équipe de France idéale. Là il fallait oser ! Qu’importe “L’épopée martienne” offre un beau moment de détente.

Brian Stableford revisite les trois lois de la robotique à la sauce transport intelligent. Tom est un géant de la route, cette IA aime rouler, espérant ne jamais s’arrêter, mais elle doit concilier avec les impondérables et les injonctions qui lui sont implantées ne font pas toujours bon ménage avec les intérêts de la compagnie. “Code de conduite” est bien mené, le lecteur s’attache au personnage principal, même s’il s’agit d’une IA, et la fin n’en est que plus poignante.

“Fenêtre avec vue sur Paris” de l’auteure ukrainienne Mechyslava Bilyavska mérite plus d’une lecture, car c’est assez subtil et le titre prend tout son relief quand on comprend que de fenêtres, il n’y en a finalement pas, et qu’il s’agit d’écrans. Quatre pages denses et riches en idées.

En plus de l’important volet critiques en terme de livres, bandes dessinées et films, Pierre Stolze évoquant entre autres des ouvrages prenant la Grande Guerre comme cadre, il est question du jeu de rôle « Alien » et Didier Reboussin revient sur un des grands noms de la collection Anticipation du Fleuve Noir, à savoir P-J Hérault qui était vraiment dans le haut du panier.

Ce numéro de « Galaxies » consacré grandement à Caza qui a plus d’une corde à son arc plaira par son focus sur l’artiste et par quelques plaisantes nouvelles.


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 88 (130 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Couverture : Caza
Traductions : fredgev (Mieux vivre avec les algorithmes), Sylvie Denis (Code de conduite) et Sofia Berkovska et Roman Karpeka (Fenêtre avec vue sur Paris)
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens...
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : septembre (!) 2024
ISSN : 1270-2382
N° ISBN : 9782376252351
Dimensions (en cm) : 13,5 x 21
Pages : 192
Prix : 11 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
22 novembre 2024


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