Sur le sujet du nazisme, Jean-Pierre Andrevon n’en est pas à son coup d’essai ; en 2010, paraissait déjà l’uchronie « Le dernier dimanche de M. le Chancelier Hitler » et la nouvelle “L’anniversaire du Reich de mille ans” est parue la première fois en 1984 dans le recueil « C’est arrivé, mais on n’en a rien su », collection Présence du Futur, puis a été reprise dans « Demain le monde » au Bélial.
Cette nouvelle intermédiaire entre les deux novellas présente la préparation des festivités la veille du grand jour, celui des mille ans du Reich. La fête s’annonce grandiose, planétaire, mais un mystérieux vent se lève. L’écrivain a pris cette durée de mille ans au pied de la lettre, dressant le tableau d’ensemble de ce futur pour mieux le balayer d’un revers de la main. Un texte fort qui fait mouche.
Dans « Nazisme : les années américaines », Jean-Pierre Andrevon mêle passages de journaux intimes, de rapports, articles de journaux réels ou falsifiés pour narrer la fuite d’Hitler de Berlin assiégée par les troupes soviétiques. Aussi bien lui que son secrétaire Martin Bormann ou encore le chef des Jeunesses hitlériennes, Artur Axmann, évoquent leur échappée, leur arrivée en Argentine avant de se rendre à New-York où ils n’auront même plus besoin de cacher leurs identités. D’ailleurs l’ancien Führer écrit « Mein neuer Kampf », un véritable succès de librairie. Martin Bormann prend la lumière à sa place, il est censé être sa créature publique et se lance en politique, aidé en cela par les sympathisants et les Allemands déjà dans le pays. Ce que les Nazis n’ont pu faire en Allemagne devient réalité aux États-Unis qui subissent un grand coup d’accélérateur, non sans échos avec notre propre trame historique (attentat de Dallas, conquête de la Lune...).
Le montage est habile, prenant par la multiplication des sources et donne un pseudo vernis d’authenticité à l’ensemble.
Moins à l’aise dans cet exercice selon ses dires, Bruno Pochesci a écrit « L’avenir derrière soi » avant les tristes événements du 7 octobre 2023. Plusieurs protagonistes illustrent la volonté secrète des dirigeants d’Israël de changer l’Histoire. Dans cet avenir, un scientifique a rendu le voyage dans le temps possible, mais tuer Hitler ou un autre dirigeant de l’époque ne change en rien le massacre des Juifs. Il faut frapper à grande échelle, même si les ressources demandées sont énormes et le voyage pour les troupes envoyées sans retour.
Avec ses personnages improbables, Bruno Pochesci parvient à poser sa patte sur ce récit en insufflant de l’humour sur un sujet de fond grave. Cette action d’envergure a forcément des répercussions dans le présent. Que deviendra-t-il ? Quel est le rôle des troupes une fois la mission achevée ? Une belle novella de laquelle se dégagent les qualités de Bruno Pochesci à transporter les lecteurs dans son univers si particulier.
Avec ses deux novellas et sa nouvelle, « Ce qu’il advint du Reich de mille ans » joue de la carte de l’uchronie. Deux complices en écriture et dans la vie livrent sans faillir leur partition, s’engouffrant dans l’Histoire pour mieux la détourner. Les registres diffèrent, tout comme les inspirations, ce qui rend ce recueil d’autant plus intéressant.
De plus, le décès de Bruno Pochesci le mois de la sortie de cet ouvrage rend cette collaboration d’autant plus poignante.
Un livre pour ne pas oublier, aussi bien les leçons à tirer de notre passé que Bruno Pochesci, cette étoile qui s’est éteinte.
Titre : Ce qu’il advint du Reich de mille ans
Auteurs : Jean-Pierre Andrevon et Bruno Pochesci
Couverture : Alamy / Gilles Murat
Éditeur : Flatland
Site Internet : page recueil (site éditeur)
Pages : 180
Format (en cm) : 13,5 x 21,5
Dépôt légal : octobre 2024
ISBN : 9782490426522
Prix : 15 €
Jean-Pierre Andrevon sur la Yozone :
« Nous n’avons qu’une Terre »
« Les Retombées »
« Belle et sombre »
« Dix-neuf romans... qu’il n’y a plus qu’à écrire »
« Demain le monde »
« Zombies, un horizon de cendres »
« Aubes trompeuses »
« Soixante-six synopsis... et autant d’histoires à écrire »
« Nouvelles de poche »
« Le Monde Enfin : Récits d’une fin du monde annoncée »
« C’est un peu la paix, C’est un peu la guerre »
« Nouvelle aurore »
« Sukran »
« De Vagues et de Brume »
Bruno Pochesci sur la Yozone :
« Des lendemains qui shuntent »
« Comme un passage à niveau »
« De la chair à horloge »
« L’espace, le temps et au-delà »
« L’amour, la mort et le reste »
« Scories »
« Orwell m’a tu »
« Hammour »
un entretien avec l’auteur
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