Utopiales 2024 - Le journal du Festival #1
25ème édition du Festival International de Science-Fiction Les Utopiales 1er novembre 2024
Une première journée aux Utopiales 2024 bien remplie avec deux tables rondes, deux projos de Kaijù Eiga et la rencontre de Nicolas Martin.
Dès 9h15, une table ronde avec pour thème One Health, une seule santé
Intervenant : Isabelle Arzul, Thierry Caquet, Barbara Ribeiro, Muriel Vayssier-Taussat. Modération : Ariel Kyrou.
La table ronde a commencé avec une définition de la “santé globale”. Le concept remonte à l’Antiquité, Hippocrate faisait état dans ses écrits d’un équilibre associant la santé animale, la santé de la faune et de la flore à celle des humains.
Pour illustrer les défaillances de “one health” dans nos société contemporaines, Isabelle Arzul évoque les cas d’empoisonnement de vautours au Diclofenac. Cet anti-inflammatoire est utilisé en médecine vétérinaire mais est hautement toxique pour les vautours.
Et la SF dans tout ça ? Thierry Caquet rappelle que la nouvelle “L’Epidémie” de Clifford D. Simak et “Le Monde Enfin” de Jean-Pierre Andrevon sont deux œuvres où la rupture avec la biodiversité et sa destruction mène à la perte de l’humanité (Zoonose). Les questionnements sur l’origine du Covid 19 et la pression anthropique sur le monde animal, avec l’exemple des crustacés comme réservoir à virus, démontre l’importance des recherches en éco-épidémiologie. Barbara Ribeiro dans ses recherches sur les espèces sentinelles attire notre attention sur l’intérêt des serpents et des araignées qui sont une ressource de molécules pour développer de nouveaux médicaments afin de lutter contre des maladies (le venin du serpent étant de plus en plus utilisé en pharmacie).
En note finale pour cette la table ronde, la question de la place des humains dans un monde aux ressources limitées se pose. Nous serons dans quelques années 10 milliard d’êtres humains. Peut-on espérer une santé globale sans vouloir renoncer à une forme de confort ? “Le Troupeau aveugle” de John Brunner est un récit incontournable autour de ces problématiques.
Nous enchainons ensuite sur une série de questions du public. Une personne questionne les intervenants sur le dérèglement climatique et les mouvements de population et rappelle à tous que l’on débat en ce moment en France sur l’Aide Médicale aux Étrangers (AME). Il serait extrêmement dangereux en Europe de laisser des populations entières sans soins médicaux.
Pour terminer, Barbara Ribeiro nous rappelle que si One health semble être un concept nouveau en Occident, il est pour de nombreuses populations un mode de vie ancestral (exemple des tribus d’amazonie).
On change d’ambiance avec la projection de “Gappa”, le descendant de « Godzilla ». Un film de 1967 réalisé par Haruyasu Noguchi.
Dans les années 60, la NIkkatsu est en perte de vitesse, ses films ne font plus recette. Inspiré par le succès de la Toho, les producteurs de Nikkastu débauchent deux techniciens du “Godzilla” de Ishiro Honda. Ils lancent, avec l’aide financière du gouvernement japonais, la production de “Gappa”.
Le film raconte l’histoire d’une expédition dans le Pacifique Sud, financée par un promoteur immobilier. Il souhaite créer un parc d’attractions avec des animaux exotiques de tout le Pacifique Sud. Sur l’île de Obelisk, les scientifiques découvrent un étrange bébé, croisement entre le lézard et l’oiseau, et décident de la ramener au Japon.
“Gappa”, en véritable descendant de “Godzilla”, est un petit bijou du Kaijù Eiga. Les effets spéciaux se limitent à de la suit motion, c’est à dire une personne dans un costume de monstre qui déambule dans un décor de maquette. Si tout ça peut faire rire aujourd’hui, rappelons que les costumes en question pèsent entre 100 et 150 kg. Et que le travail de maquette des décors relève de l’artisanat au sens le plus noble du terme.
L’humour est omniprésent dans le film, parfois à ses dépends car les personnages sont caricaturaux et il ne faut pas chercher la moindre trace de réalisme dans tout ça. Alors, même si l’ensemble est “cheap as fuck” comme le dira une personne derrière moi en sortant, j’ai beaucoup aimé cette diffusion dans une belle copie et sur un grand écran. Si vous aimez les films de gros monstres, “Gappa” est loin d’être le pire.
L’après-midi, j’ai assisté à une autre conférence avec pour thème :commercer en paix.
Étaient présents autour de la table, Louis Delannoy, Xavier Dollo et John Scalzi, avec à la modération Emeric Cloche.
Peut-on vivre dans un monde sans commerce ? Certainement pas, en revanche, les intervenants étaient d’accord sur les évolutions que doivent prendre les échanges commerciaux pour répondre aux enjeux climatiques et sociologiques de notre époque. Les livres de John Scalzi qui sont traversés par ces problématiques sont cités. Notamment, “La Société protectrice des Kaijus” et “L’Effondrement de l’empire”. Place ensuite à des formes de commerce plus vertueuses comme l’économie sociale et solidaire, et le modèle associatif. La question du mimétisme économique des auteurs-rices en SF est évoquée. On remarque que dans beaucoup de récits, les systèmes économiques sont souvent les mêmes et peu d’auteur-rices s’aventurent à explorer des systèmes nouveaux. Pour terminer, Xavier Dollo cite “Ecotopia” d’ Ernest Callenbach comme piste bibliographique pour aller plus loin.
La journée s’achève avec “Gamera 3 : la revanche d’Iris”. Eh oui, encore un film de Kaijù. À chacun ses marottes ! Faut-il avoir vu “Gamera 1” et “Gamera 2” pour apprécier le troisième opus ? Absolument pas. “Gamera 3” est un film de 1999 réalisé par Shusuke Kaneko et grand classique du film de monstres et de combats épiques. C’était un plaisir de revoir ce film sur grand écran. Fun fact, un des rôles principaux, est joué par la fille de Steven Seagal. Fun fact N°2, elle joue beaucoup mieux que son père !
Mais le meilleur moment de la journée fut la rencontre avec Nicolas Martin. Nous avons évoqué “Fragile/s”, son premier roman publié au Diable Vauvert. Nous avons parlé d’écriture, de science-fiction et de politique. Ce fut un vrai plaisir d’échanger avec lui. L’interview sera publiée prochainement sur la Yozone.