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Galaxies n°87 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°87, SF - nouvelles - articles - critiques, juillet 2024, 192 pages, 11€

Un dossier Françoise d’Eaubonne dans une revue de SF, voilà qui m’a pour le moins interloqué la première fois que j’ai lu cette annonce. Peu au fait de sa production, je n’avais jamais fait le rapprochement, alors cette mise au point s’avère des plus à propos.
Noé Gaillard qui a proposé ce dossier s’est même demandé si, en tant qu’homme, il était le plus à même de le porter, ce qui est tout à son honneur. Intelligemment il a su très bien s’entourer : Lucie Chenu et Pauline J. Bhutia présente à plus d’un titre dans ce numéro apportent leur éclairage bienvenu.



Ce focus Françoise d’Eaubonne (1920-2005) sera sûrement une révélation pour beaucoup, d’autant que ses écrits relevant de l’imaginaire datent des années 1960 et la « Trilogie du Losange » de la seconde moitié des années 1970 avec un dernier tome resté inédit jusqu’en 2022. Lucie Chenu présente l’auteure, ce qui est une bonne chose, n’en déplaise à certains. Si pour mieux la connaître, il aurait fallu consulter Wikipédia alors que la revue lui consacre un dossier, cherchez l’erreur ! Elle a eu raison d’insister. Noé Gaillard aborde son œuvre, aussi bien pour la jeunesse (Bibliothèque Verte), la novélisation de films, ses biographies et ses essais militants. Elle savait être pédagogue mais aussi se dresser haut et fort contre l’injustice. Elle n’avait pas la langue dans la poche ; féministe précoce, elle défendait ses convictions. Comment ne pas remarquer les photos d’une Françoise d’Eaubonne la cigarette en main ou en bouche dans une attitude très masculine.
Élise Thiébaut qui a écrit « L’amazone verte » sur Françoise d’Eaubonne est interviewée. Elle aborde notamment la notion d’écoféminisme, mot inventé par l’auteure, et la « Trilogie du Losange », également connue comme « La saga des Bergères » que Pauline J. Bhutia décrypte à travers plusieurs axes. Yves Frémion partage deux souvenirs qui, toujours, affinent le portrait.
Le premier texte appuyant ce dossier, “La dernière émission à Radio-Globule”, ne m’a pas marqué plus que cela. Du second, “Un film dans un film”, dans lequel la civilisation s’est effondrée, la faute à la guerre, et un groupe de femmes sillonne les ruines, j’ai surtout gardé en mémoire l’improbable collage page 92.
Ce dossier dresse le portrait d’une femme étonnante, militante engagée, dont on ne peut cautionner toutes les actions (dynamitage dans le chantier de construction de la centrale nucléaire de Fessenheim en 1975). Son œuvre apparait assez clivante et intéressera ou non les lecteurs désireux d’aller plus loin.

“L’attrape-touristes” a remporté le Prix Alain le Bussy 2024. Sortant en trombe du lycée, prise dans sa routine, une étudiante ne prend pas garde au bus qu’elle emprunte. Le voyage s’avère des plus déboussolant... D’ailleurs il l’est tout autant pour le lecteur, tant Élise Rengot prend un malin plaisir à le tromper. C’est redoutable et très distrayant.

En plus de participer au dossier, d’avoir signé la couverture de ce numéro, Pauline J. Bhutia nous offre une incursion en jungle bamanaise à la rencontre d’un peuple vivant en harmonie avec la nature. Je me suis demandé si “Les chants ne donnent jamais” avait été écrit pour accompagner le dossier. Nonobstant, il illustre la vie en symbiose avec la nature, le sacrifice pour ne plus faire qu’un avec elle et offrir un avenir aux autres, et élève le chant à un art inconnu. C’est beau, intriguant et fort.

Quant à Pierre Stolze, il signe avec “Quand la marquise regagnera le ciel” un texte d’une belle érudition. Il est très riche, fascinant par tout ce qui est évoqué.

Cette huitième livraison de “Chroniques d’Ukraine” diffère des précédentes, car elle donne la parole à des auteures ukrainiennes de SF et de fantasy. Michael Burianyk présente cinq auteures avant de leur poser quelques questions. La fracture avec la Russie, traduite par une aversion du russe, date de 2014 et l’invasion de la Crimée. Autant dire que ce ressentiment n’a fait que grandir depuis. Elles regrettent que leurs écrits soient cloisonnés à leur pays, car elles estiment avoir beaucoup de choses à partager, notamment du fait de leur expérience récente. Une chronique vraiment instructive et une belle manière de relancer cette rubrique au long cours.

Jean-Guillaume Lanuque donne aux lecteurs des envies de New Wave. Ça n’a pas loupé, j’écoute du Gary Numan depuis ! Didier Reboussin nous remet en mémoire les aventures du docteur Alan de Jean de Fast, dont j’ai gardé un bon souvenir.
Soixante pages de chroniques de livres, BD et de films achèvent ce « Galaxies » bien rempli avec son dossier Françoise d’Eaubonne qui ne manquera pas d’intéresser les lecteurs.
Un numéro étonnant et attrayant à plus d’un titre.


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 87 (129 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Couverture : Pauline J. Bhutia
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens...
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : juillet 2024
ISSN : 1270-2382
N° ISBN : 9782376252047
Dimensions (en cm) : 13,4 x 21
Pages : 192
Prix : 11 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
16 août 2024


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