Au début, on a la sensation que Lily est capricieuse, et très en colère : l’arrivée d’un petit frère ou petite sœur ne lui fait pas plaisir. Ses parents sont partis sans prévenir, sa grand-mère a oublié sa peluche et le mot laissé par maman. C’est pour les récupérer que la petite fille traverse le village de nuit. Mais à son arrivée, la maison est occupée, et menaçante.
Elle est un peu dubitative en rencontrant ses alliés animaux. Le corbeau a l’air sûr de lui et sage, mais il se trompe souvent. La souris est téméraire, oubliant sa petite taille. La taupe, aveugle, semble un poids mort, mais elle saura la réconforter. Enfin, le serpent lui fait un peu peur, surtout quand sa langue fourche et qu’il dit qu’il ne la mordra pas encore. Leurs interventions, jacasseries ne manquent pas d’humour mais leurs actions susciteront beaucoup d’émotions. Les illustrations d’Emily Gravett y participent activement (j’adore la souris)
Pénétrer dans la maison est compliqué, et pour la frêle Lily, passer par la trappe du chien ou se glisser par l’ancien soupirail à charbon relève d’une vraie aventure. Et je ne parle pas de se hisser sur le toit pour atteindre la cheminée.
Mais c’est aussi parce qu’au fil des lignes, on la découvre malade. Elle évoque de fréquentes visites à l’hôpital, des dialyses... Et les mises en garde de ses proches, en permanence, de ne pas se fatiguer, de faire attention. Cette nuit, elle va devoir se dépasser, physiquement, mais aussi mentalement, balayer toutes ses précautions, ce coton où on la confine. Se savoir condamnée à moyenne échéance lui donnera aussi un surplus de courage. Mais c’est de ses petits alliés, de leur soutien, voire de leur sacrifice, qu’elle tire la force d’affronter ces choses sombres, mortes, qui ont pris la place de ses parents.
Pour les vaincre, elle devra faire la paix avec elle-même, guérir sa culpabilité et chasser sa jalousie. Et accepter son sort. Ce qui explique que lorsqu’on s’attend à ce que les choses soient terminées, le mal ressurgit. Mais rassurez-vous, les choses finissent (à peu près) bien, et la préado va de l’avant.
Sans mentir, je pense que « Lily et les créatures de la nuit » a sa place entre « Coraline » de Neil Gaiman et « Quelques minutes avant minuit » de Patrick Ness. Des ingrédients similaires, une bonne dose de fantastique assez effrayant pour les plus jeunes, et des alliés qui poussent l’héroïne à aller chercher au fond d’elle force, courage et franchise. Et surtout, une jeune héroïne tiraillée par la violence de ses sentiments.
Un petit bijou sombre pour parler jalousie, maladie, renoncement et espoir.
Titre : Lily et les Créatures de la Nuit (locked out lily, 2021)
Auteur : Nick Lake
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Thomas Leclere
Couverture et illustrations intérieures : Emily Gravett
Éditeur : Seuil Jeunesse
Collection : 9-11 ans
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 267
Format (en cm) :
Dépôt légal : mars 2024
ISBN : 9791023520712
Prix : 14,90 €