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Carnets de l’apothicaire (Les), tome 2
Natsu Hyuuga
Lumen, roman (Japon), complot à la cour, 404 pages, février 2024, 17€

Le temps passe dans la Cour intérieure, avec son lot de petites péripéties, comme la petite Linli qui s’entiche d’un chaton tout sale ; de sombres manigances et de drames évités de justesse grâce à la vigilance de Mao Mao, dont Jinshi ne peut plus se passer, mais à qui l’impératrice douairière et même l’Empereur font désormais appel.



« Les Carnets de l’apothicaire » nous arrive en France par un faisceau de médias : manga, anime, roman. Le premier reçu influence bien entendu la réception des autres. Force est de constater que si l’anime n’est pas exempt encore de lourdeurs et pâtit d’un rythme assez lent (19 épisodes à ce jour sur Crunchyroll pour arriver à la cérémonie sabotée), on sent une volonté de plus de lisibilité. Le roman, œuvre d’origine, multiplie les faiblesses que ses déclinaisons s’efforcent de compenser.

Le constat établi à la lecture du premier tome (qui, en fait, en regroupait 2) s’accentue ici : si vous avez déjà lu le manga publié chez Ki-oon depuis 2021, vous arriverez avec ce second volume du roman à l’épisode de la grenouille durant la partie de chasse, soit le 12e et dernier tome paru à ce jour, en novembre 2023 (le 13e est pour bientôt). L’ultime chapitre nous en dit un peu plus sur comment se conclut politiquement cette affaire. Quoique, comme à son habitude Mao Mao ne s’en occupe pas, mais nous avons des miettes d’information grâce à Gaoshun.

On apprécie toujours ces petits mystères résolus par Mao Mao, ponctués de son observation des changements dans le hougong, comme le plan de développement de la lecture parmi les servantes, mis en place par Jinshi de façon subtile. L’apothicaire se fait une nouvelle « amie » de son âge, qui est fascinée par les insectes.

Par contre, ce second volume accumule les faiblesses. Le style est assez lourd, souvent haché, davantage que ce qui m’avait semblé dans le premier tome. La traduction a été faite par un autre duo de traducteurs, je ne saurais leur imputer la faute, mais force est de constater que ce n’est pas agréable à lire.
C’est toujours très pauvre en descriptions. Mao Mao saute souvent d’une idée à l’autre, l’enchainement entre ses pensées et ses observations peut parfois être assez décousu. La narration passe aussi d’un personnage à l’autre sans prévenir.

L’auteur multiplie les répétitions : par exemple, Jinshi est trop fréquemment appelé « divin eunuque » puis « homme-nymphe », le médicastre est systématiquement qualifié d’incompétent... Il est probable que la publication originale, en feuilleton, pouvait nécessiter quelques rappels, mais à ce point... Dans l’épisode du petit chat (2e chapitre), d’une page à l’autre l’auteur pointe sa prévenance pour le petit animal. Tout cela n’a visiblement pas été repris avant l’édition papier, ou alors c’est faire bien peu cas de ses lecteurs.

Pire, alors que l’essentiel de la trame de fond repose sur le doute qui plane, pour nous lecteurs (car Mao Mao n’en a strictement rien à faire), sur l’identité réelle de Jinshi, l’auteur se fend ici d’un prologue qui écrit texto qu’il est bien le frère de l’empereur actuel. Ce qui casse le trouble lors de l’épisode du temple de l’ancienne impératrice, qui pourrait désigner Jinshi (avec l’aide de sa petite apothicaire) comme souverain légitime.

Enfin, les scènes « d’action » sont particulièrement brouillonnes ou bâclées. La danse de la « déesse de la lune » tient en 2 paragraphes ; le point d’orgue des « histoires de fantômes » est tellement allusif qu’il faut attendre l’épilogue du chapitre pour le comprendre ; la partie de chasse finale, présentée avec un flash-back totalement contre-productif, est mal lisible.

Il y a, à n’en pas douter, des pratiques narratives et éditoriales différentes entre le Japon et la France. Il n’en demeure pas moins que Natsu Hyuuga n’est pas un très bon auteur : ces histoires sont intéressantes, documentées, il mélange bien petits et grands mystères... mais sa façon d’écrire et de raconter sont parfois déconcertantes, tantôt trop insistantes sur certains points inlassablement répétés, martelés, parfois au contraire très allusifs au point que certaines hypothèses qualifiées d’évidentes nous échappent totalement. S’il s’efforce de varier les constructions (flash-back à la scène de chasse), on a surtout l’impression qu’il expérimente, pas toujours avec succès, pour ne pas donner l’impression d’épisodes qui s’enchainent de façon purement mécanique (comme c’est souvent le cas : on vient soumettre une énigme à Mao Mao).

S’il ne tarde pas trop, le tome suivant rétablira la chronologie des œuvres. Reste à espérer qu’il soit plus agréable à lire et pas seulement à découvrir.


Titre : Les carnets de l’apothicaire (kusuriya no hitorigoto 3, 2015)
Série : tome 2
Auteur : Natsu Hyuuga
Traduction du japonais (Japon) : Jean-Baptiste Flamin & Sascha Boucheron
Couverture et illustrations intérieures : Touko Shino
Éditeur : Lumen
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 404
Format (en cm) : 23 x 14 x 5
Dépôt légal : février 2024
ISBN : 9782371023543
Prix : 17 €



Nicolas Soffray
22 février 2024


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