“La marque” a remporté un Accessit. Dans un univers de fantasy, un mal sournois s’empare des gens, marquant leur peau de manière indélébile. Une fois qu’il apparaît, des runes peuvent le juguler, encore faut-il qu’il soit traité à temps. Deux officiers se rendent dans une ville pour traiter un cas apparemment simple. Sacha (Sasha ?) Morage mène parfaitement son récit, intéressant avec ces marques dont l’origine est controversée et les deux personnages, forts et fragiles à la fois, partageant leurs doutes. Au final, un ensemble vraiment prenant et maîtrisé.
Un palmarès qui démarre sur les chapeaux de roues, avant de passer aux deux nouvelles classées secondes exæquo. Et là, le coup de frein est brutal !

La seule originalité de “Les premiers pas du reste de sa (ta ?) vie” de Richard-Hubert Bourally (Bourelly ?) réside dans la mise en scène des Neurocentres de deux femmes qui, un beau jour, décident de vivre ensemble. Alors que je pensais que l’une était une androïde, ce qui aurait fait sens, il n’en est rien. Chaque décision est mûrement réfléchie à travers un échange entre les différents sentiments de la personne, genre réunion autour d’une table. C’est troublant, prête à interrogation et ne sert finalement que d’artifice pour les interactions entre les deux femmes. La suspension d’incrédulité est ici mise à mal et ce n’est pas la suite avec son drame qui éveille forcément l’intérêt. De l’idée, mais pas forcément bien exploitée.

Seconde exæquo : “Remote Control de Hétonque qui démarre sur une fausse note mais qui n’est pas du fait de l’auteur. L’illustration n’est pas la bonne ! En lieu et place de celle de Chloé Lux exécutée pour l’occasion, il s’agit d’une ancienne de Stéphanie Peltier que les lecteurs d’« AOC » auront reconnue. Un dictateur tout puissant vit à l’abri dans un bunker d’où il administre d’une main de fer le pays, faisant trembler tout le monde. Un beau matin, il se réveille sans serviteurs, sans assistance... comme un simple mortel. Le voilà bien obligé de se débrouiller seul. Comment sortir alors que sa tête est omniprésente et qu’il sera identifié de suite, lui détesté par la grande majorité de la population ? Au final, il ne se passe pas grand-chose, le tableau est dressé et puis une rébellion fait tout basculer. Il est difficile d’adhérer au déroulement de cette nouvelle, on croirait que d’une simple pression sur un interrupteur, on passe de l’ordre au chaos, alors que ce n’est pas aussi simple. L’inspiration est tirée de notre présent, mais le développement ne suit pas. Trop brutal, trop artificiel et pour déboucher sur quoi... pas grand-chose.
Les nouvelles classées secondes ne m’ont clairement pas séduit.

Heureusement le premier prix est d’une autre tenue. Dans “In memoriam” de Aude Lapatu-Hargues, Pétra reçoit des clients voulant effacer des événements, aussi bien de leurs souvenirs que dans la réalité. Cela peut aller d’un meurtre à un vol. L’important est d’échapper à un éventuel contrôle, et il faut toute une intendance pour répondre aux demandes, nécessitant parfois de tuer des témoins dans les cas extrêmes. Des clients se pressent ainsi chez Pétra et sortent sans se souvenir de ce qu’ils font là. Les cas diffèrent, ce qui donne tout l’intérêt de ce texte. Et l’activité de Pétra se révèle encore plus lucrative que de prime abord... L’auteure réussit à capter l’intérêt des lecteurs jusqu’au bout, ce qui donne un ensemble agréable.

Un palmarès fait toujours réagir après lecture. Suivant les sensibilités de chacun, le classement varie. Pour moi, “La marque” de Sacha Morage est le texte le plus fort des quatre, alors qu’il n’a mérité qu’un accessit, même pas une place sur le podium. Suit “In memoriam”. Les autres sont vraiment un cran en-dessous.
À bien y regarder, plusieurs coquilles sur les noms des auteurs ou même dans un titre cohabitent entre le sommaire, le palmarès, la quatrième de couverture et le contenu : Sacha et Sasha, Bourally et Bourelly, “...reste de sa vie” et “...reste de ta vie”, sans oublier la confusion sur une illustration. Attention, le diable se cache dans les détails !

Dans les dernières pages figurent le règlement et les contraintes du prochain concours Visions du futur. À vos claviers !

Titre : AOC
Numéro : 70
Directrice de publication : Evelyne Beuzit
Rédacteur en chef : Olivier Bourdy
Couverture : Darius Zkieliszek
Illustrations intérieures : Marthe Machorowski, Yohan Vasse et Stéphanie Peltier
Type : fanzine
Genre : Science-fiction, fantasy, fantastique
Site Internet : le club Présences d’Esprits
Période : automne 2023
Périodicité : trimestrielle
ISSN : 1772-3442
Dimensions (en cm) : 12,8 x 19,8
Pages : 84
Prix : 4 €

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