Les adaptations éternelles
Graphiquement, d’ailleurs, les précédentes éditions du jeu ont apposé une marque dont il est forcément difficile de se défaire. L’album fait ainsi le choix surprenant de ne pas masquer ses personnages granbretons principaux, alors que le masque fait partie de leur culture et influe en profondeur sur leur psyché chez Moorcok. De même, les ornithoptères manquent d’élégance, s’apparentant ici à de classiques aéronefs de space opera. Les auteurs n’ont pas non plus opté pour un parti-pris gore facile et excessif.
En respectant scrupuleusement le déroulement de l’intrigue du premier tome du cycle originel – tout au moins sa première moitié, l’album suivant étant amené à compléter l’ensemble –, ils proposent leur propre vision de l’oeuvre, avec d’incontestables réussites.
L’Empire étend son ombre
Pour se limiter à un bref résumé, signalons seulement que dans une Europe jadis ravagée par les guerres et les catastrophes, l’empire de Granbretanne, société guerrière divisée en castes spécialisées, vise l’unification du continent à marche forcée. Les résistances sont écrasées, ainsi de celle du duc Hawkmoon, incarnation du champion éternel. Mais celle de la Kamarg, dirigée par le comte Airain, risque de donner du fil à retordre aux masques de bêtes…
Si les architectures urbaines sont proches de celles desCités obscures, les tours de Londra (avec un clin d’oeil à Big Ben) sont impressionnantes, tout comme le démesuré Pont d’Argent au-dessus de la Manche. Les scènes d’action transpirent la fougue (Airain contre le taureau), tandis que les batailles déploient une véritable dimension épique. Bilan globalement positif, et début prometteur pour une série dont on espère qu’elle s’étendra au moins jusqu’au Secret des Runes.
Jena-Guillaume Lanuque
Jérôme Le Gris, scénariste de “Horacio d’Alba”, “Malicorne”, “Serpent Dieu”, “Les Àges perdus”, chez Dargaud et “Lord Gravestone” chez Glénat, adapte “Le Joyau Noir”, le premier roman de cette saga culte qui fit la renommée de Hawkmoon. Benoît Dellac, déjà complice de Le Gris sur “Serpent Dieu” et dont on se régale du “Nottingham” au Lombard, assure la partie graphique avec la complicité de Didier Poli. Après les albums d’Elric, “Hawkmoon” s’annonce comme un autre projet d’envergure tant ce cycle épique a marqué les esprits. C’est aussi l’occasion de magnifier cette œuvre inclassable tant elle mêle de références et de lui redonner souffle avec un esprit de modernité.
“Le Joyau Noir” a été publié le 7 septembre 2022, suivi le 17 mai 2023 par le second tome, “La bataille de Kamarg”. Le Ténébreux Empire, manipulant l’esprit du duc Dorian Hawkmoon, l’a envoyé en Kamarg avec pour mission de gagner la confiance de son souverain, le Comte Airain, et d’enlever sa fille Yisselda ! Mais ce plan machiavélique pourrait bien échouer grâce à la science des savants de Kamarg. Toujours menacé par le pouvoir de la pierre noire, Hawkmoon pourra-t-il arrêter les Granbretons qui marchent sur la cité d’Aigues-Mortes ?
À suivre de près chez Glénat.
Fabrice Leduc
(T1) Le Joyau noir
Série : Hawkmoon
Scénario : Jérôme Le Gris, d’après l’oeuvre de Michael Moorcock
Dessin : Benoît Dellac et Didier Poli
Couleurs : Bruno Tatti
Éditeur : Glénat
Pagination : 58 pages couleurs
Format : 24 x 32,1 cm
Date de parution : 7 septembre 2022
Numéro ISBN : 9782344027899
Prix public : 14,95 €
À lire sur la Yozone :
Hawkmoon, la grande saga de Moorcock, en BD
Critique par Jean-Guillaume Lanuque
(Critique publiée dans le n°81 de janvier 2023 de la revue française Galaxies, consacrée à la science-fiction.)
Illustrée et mise en page par Fabrice Leduc
Illustrations © Benoît Dellac, Didier Poli et Éditions Glénat (2022)