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Cité des nuages et des oiseaux (La)
Anthony Doerr
Albin Michel, Terres d’Amérique, roman traduit de l’anglais (États-Unis), à la croisée des genres, 698 pages, août 2022, 24,90€

Cinq personnages à travers trois périodes différentes, cinq destins appelés à se croiser pour certains, mais tous gravitant autour d’un manuscrit de l’antiquité : « La cité des nuages et des oiseaux » d’Antoine Diogène, relatant les déboires d’Aethon, un homme désirant dépasser sa condition.



Autour de 1450, Anna grandit à Constantinople aux côtés de sa sœur Maria, douée pour la couture, alors qu’elle ne rêve que d’évasion, ayant même appris à lire. En Bulgarie, Omeir est né avec la lèvre fendue, le signe du diable selon les croyances locales, poussant sa famille à vivre en reclus. Quand les troupes du sultan désirant conquérir Constantinople passent, Omeir est enrôlé et ses bœufs réquisitionnés.
En 2020, Zeno Ninis et Seymour se rencontrent à la bibliothèque de Lakeport. Le premier est proche de sa fin, alors que le second n’est qu’un adolescent, désirant que les choses bougent, que les problèmes environnementaux soient pris au sérieux. Zeno a connu bien des expériences dans sa vie, alors que Seymour n’en est qu’à l’orée.
Autre ado, Konstance grandissant bien des décennies plus tard à bord de l’Argos, un vaisseau spatial se dirigeant vers la planète Beta Oph2 pour que les membres de l’expédition puissent prendre un nouveau départ, loin de la Terre en pleine déliquescence.
Trois périodes différentes : le passé, le présent et l’avenir. Quel est le lien entre elles ? C’est le fameux texte de grec ancien donnant le titre à ce roman « La cité des nuages et des oiseaux » et signé Antoine Diogène. Anna le trouve lors de fouilles et le conserve comme un trésor, un talisman aux étranges pouvoirs. Zeno Ninis traduit les fragments arrivés au XXIè siècle et monte même une pièce de théâtre jouée par des enfants pour proposer l’histoire d’Aethon au public. Quant à Konstance, elle découvre ce récit grâce à son père et n’a de cesse de fouiller l’atlas interactif de la bibliothèque de bord, s’interrogeant notamment sur la mission qui leur a été confiée. Tout au long du roman, les différents feuillets servent de fil rouge, prenant racine dans le passé pour se diriger vers l’avenir.
Impossible de ranger ce livre dans une catégorie précise, car il se situe à la croisée des genres. Il lorgne du côté de l’historique avec Anna et Omeir, de la littérature générale avec le présent de Zeno et Seymour et de la science-fiction avec Konstance. À ce titre, l’amateur du genre tiquera rapidement tant elle fait old school et n’est pas sans aberrations. En effet, le vaisseau semble fait de bric et de broc, mais voyage bien plus rapidement que la lumière ! Anthony Doerr ne maîtrise-t-il pas le sujet ? Ou joue-t-il avec les lecteurs ? Et alors que le passé est exploré de façon chronologique, la trame se situant dans le présent commence par un moment charnière pour Seymour et Zeno, avant de tracer le parcours des deux protagonistes, les deux se déroulant sur des laps de temps totalement différents.
Le livre n’est pas linéaire, il alterne entre les périodes, saute de personnage en personnage, sans que la cohérence n’en souffre, tant Anthony Doerr connaît son sujet, déroulant son talent d’écrivain capable de captiver un lectorat qui, quel qu’il soit, trouvera son bonheur entre ces pages. Et puis toujours les aventures fantasmagoriques d’Aethon, un homme devenant tour à tour âne, créature marine, puis corbeau à la recherche de la fabuleuse cité des nuages et des oiseaux, cimentent l’ensemble.

« La cité des nuages et des oiseaux » relève du tour de force, car aucun aspect du livre n’est négligé, chaque personnage apporte sa pierre à l’édifice, aucun ne supplante l’autre comme si chacun était au service du manuscrit de l’antiquité, servant de témoin à travers l’espace et le temps. Même s’il peut donner une fausse impression de foisonnement, de dispersion, ce roman forme un tout cohérent d’une redoutable efficacité. En effet, il prend rapidement le lecteur dans ses trames, lui montrant le pouvoir des mots, l’attrait des livres en général.
En explorant les genres, en jouant des codes, Anthony Doerr a écrit un roman fascinant, propice à l’évasion et qui captivera les différents publics, se fiant souvent à tort aux étiquettes, alors que tant de livres captivants se situent à la croisée des genres.
« La cité des nuages et des oiseaux », une magnifique invitation à la lecture.


Titre : La cité des nuages et des oiseaux (Cloud Cuckoo Land, 2021)
Auteur : Anthony Doerr
Illustration de couverture : Narcisse
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Marina Boraso
Éditeur : Albin Michel
Collection : Terres d’Amérique
Directeur de collection : Francis Geffard
Sites Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 698
Format (en cm) : 15 x 22
Dépôt légal : août 2022
ISBN : 9782226461537
Prix : 24,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
15 septembre 2022


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