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Entretien avec Annick Lobet
Créatrice de « Canopéa » chez BLAM !
8 novembre 2021

Le nom d’Annick Lobet est très vite associé à « Zombie Kidz », à son mode « Evolution » et à sa version ado « Zombie Teenz Evolution ». Mais elle est présente dans le milieu du jeu de société depuis « Trafffic », son premier titre sorti chez Le Scorpion Masqué en 2011, éditeur québécois des jeux cités au-dessus. Elle s’est prêtée au jeu des questions/réponses pour la Yozone avec la sortie de « Canopéa », jeu édité par BLAM !, dont elle nous parle, ainsi que d’autres choses…



« Canopéa » est votre 11ème jeu. Mais quel a été votre parcours pour y parvenir ? Quelle a été la bascule qui vous a fait passer de joueuse à créatrice ?

J’ai toujours aimé jouer, comme la plupart des gens, je suppose ? C’est lorsque j’ai découvert la richesse des jeux modernes - en tombant par hasard sur le site Tric Trac - que j’ai éprouvé le besoin de créer, ça a été instantané.

« Canopéa » se situe dans l’univers de « Celestia ». Est-ce une commande de départ avec un univers donné ou avez-vous proposé à Blam ! un jeu dans cet univers ? Et donc quelle influence cet univers a-t-il eu sur la mécanique de jeu ?

C’est Simon de Blam ! qui m’a contacté. Il souhaitait adapter « Merlin Zinzin » pour en faire un « Celestia » Kids. Mais un jeu d’adresse en temps réel ne me paraissait pas forcément adapté à un très jeune public. Je lui ai donc proposé un autre concept que l’on a fait évoluer ensemble pour en faire « Canopéa ».

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Le thème du sauvetage des oiseaux est-il arrivé avant la mécanique de la pichenette, ou est-ce l’inverse, ou l’un a-t-il entraîné l’autre ?

Au départ, le thème était celui de « Celestia ». On visitait des îles pour ramener des trésors. Mais les mécanismes du jeu étant complètement différents de ceux de « Celestia », c’était plus pertinent d’avoir un thème dans l’univers de « Celestia » plutôt que rester sur un « Celestia » kids.

Le memory est un élément central du jeu. Est-ce parce que vous aimez ce principe de jeu ou parce que le jeu s’adresse au plus jeune, à partir même de 4 ans.

C’était pour répondre à la commande en fait, parce que oui, pour de jeunes enfants, c’est un mécanisme qui a fait ses preuves.

« Canopéa » est un jeu coopératif, un principe ludique que vous appliquez à tous vos derniers jeux. Pourquoi cette envie de coopératif ?

C’est vrai, j’aime créer des jeux coopératifs, j’aime l’idée de jouer ensemble, je trouve ça constructif. Ça me semble nécessaire de proposer ce type de jeux aux enfants, de leur apprendre à collaborer plutôt que développer leur esprit compétitif. Ceci dit, « Trésors Légendaires », sorti au début de l’année, est très très loin d’être coopératif (mais c’est un ancien prototype qui ne pouvait pas être transformé en jeu coopératif…).

Vous avez aussi introduit des principes évolutifs, comme les obstacles pouvant apparaître lorsqu’on maîtrise le jeu. Là aussi, c’est une constante dans vos derniers jeux. Qu’est-ce qui vous amène à ces principes ludiques ? Qu’est-ce que vous aimez dans le principe du « legacy », ou pour vous plutôt « évolution » ?

Dans « Canopéa », l’aspect évolutif est très très léger. Je n’ai pas vraiment développé un système évolutif, on a juste ajouté une variante. Ce qui me plaît dans le principe d’évolution, c’est l’idée de proposer un vrai renouvellement du jeu de partie en partie, accompagné d’une montée en puissance et d’une sensation de progression.

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Quelles sont les différences de création entre un jeu « normal » et un coopératif évolutif ?

Pour créer un jeu coopératif évolutif, il faut penser le jeu non plus sur une seule partie mais sur une campagne. Vous devez avoir cette vision globale, savoir ce que vous avez envie de faire évoluer et comment.
La dimension évolutive peut prendre par exemple la forme d’un système qui va permettre d’intégrer des variantes (comme dans « Zombie Kidz Évolution » ou « Trésors Légendaires »). Cela allonge considérablement le temps de développement. Le jeu de base doit être assez souple pour permettre l’intégration de variantes. En plus de créer des variantes compatibles entre elles sans déséquilibrer le jeu, il faut définir une progression et concevoir un système évolutif.
Tout cela génère une explosion du nombre de tests. Il faut tester et retester chaque variante isolément pour en vérifier l’équilibrage, puis chaque combinaison de variantes en passant en revue toute la campagne. Et il faut tout recommencer quand la règle d’une variante est modifiée ou quand on change l’ordre des variantes dans la progression...

Comment s’est déroulé le travail éditorial avec Blam ! ? Beaucoup de modifications ont-elles été nécessaires entre votre prototype et le jeu final ?

C’est une commande, du coup l’éditeur a suivi de près tout le processus de création. Ce n’est pas du tout un jeu que j’ai développé puis proposé à Blam !. Il y a eu beaucoup d’aller-retours. J’ai essayé de cerner leurs demandes et d’y répondre, j’ai intégré leurs propositions. C’est une vraie construction commune très loin de la proposition initiale.

Avez-vous beaucoup travaillé en collaboration avec l’illustrateur Gaëtan Noir ?

Non, pas du tout. En principe, c’est l’éditeur qui se charge des illustrations. En tant qu’auteur, on croise juste les doigts pour que ce soit chouette… mais là je savais d’avance que ça le serait.

Quelles sont vos techniques de travail ? Avez-vous des routines ?

Je fais un peu comme tous les créateurs, je pense. Le développement d’un jeu forme une spirale : je mets au point une règle, je crée le matériel, je teste, je rectifie la règle, je modifie le matériel, je reteste etc.
Je fais mes premiers tests en solo, avec un matériel constitué de bouts de papier griffonnés à la main. Lorsque j’obtiens quelque chose qui me plaît, je conçois et fabrique un proto plus joli pour le faire tester à d’autres personnes.

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Comment concevez-vous vos prototypes ?

J’utilise des illustrations trouvées sur internet que je retouche avec Gimp. Je fais tout le design du matériel avec Draw, un outil de dessin vectoriel intégré à la suite bureautique libre-office. Ceci me permet d’avoir une liberté totale, contrairement à des outils spécifiques de création de cartes par exemple. En ce moment j’utilise aussi beaucoup Tiled, un éditeur de map, conçu à la base pour le jeu vidéo qui me permet de concevoir un décor unique pour chacune des cartes de l’un de mes prototypes.

Quels conseils pourriez-vous donner à un.e apprenti.e créateur.trice de jeux ?

Je ne suis pas du tout certaine d’être un exemple à suivre, alors prenez les conseils suivants avec beaucoup de recul. Je pense que le plaisir de créer doit toujours rester au centre du projet. Inutile de se forcer à travailler sur un projet qui ne vous transporte pas. Si vous n’avez pas l’impression de travailler sur votre meilleur projet c’est qu’il n’est sans doute pas assez bon. D’ailleurs, ce conseil fonctionne quel que soit votre domaine, ce n’est pas spécifique à la création de jeu. Plutôt qu’essayer de copier sciemment des jeux existants pour les transformer, essayez d’aller chercher des idées nouvelles en vous. Bien sûr, elles seront certainement inconsciemment inspirées par votre culture ludique, mais elles porteront votre empreinte personnelle. Et n’oubliez pas que bien souvent la meilleure solution est la plus simple, la plus intuitive.

Avez-vous de futurs projets ?
J’ai différents projets en cours, tous coopératifs et évolutifs. J’expérimente différentes façons d’apporter une dimension évolutive en utilisant par exemple un ensemble de niveaux qui modifient les sensations de jeu. Dans le même temps, je m’impose certaines contraintes, par exemple réduire le matériel au minimum, de façon à ce que mes créations puissent être éco-conçues.
C’est tout ce que je peux en dire pour le moment.

Merci beaucoup Anne.


À lire sur la Yozone :
- Canopéa


Illustrations © les éditeurs


Michael Espinosa
Christelle Espinosa
7 novembre 2021



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