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Naufragés de Velloa (Les)
Romain Benassaya
Pocket, SF, roman (France, 2019), space opera, 558 pages, mai 2021, 8,95€

Au XXVIIIe siècle, la Terre est inhabitable. Seules Mars et Vénus abritent encore la vie de manière acceptable, mais les deux planètes qui sont parvenues à un équilibre fragile n’accueillent aucun des milliards de naufragés errants dans le système solaire et obligés de survivre dans les pires conditions.
La découverte d’un événement improbable change la donne : presque cinq siècles plus tôt, l’Embrun 17, un vaisseau de naufragés, a disparu pour rejoindre instantanément le système de Sigma Draconis distant de 19 années-lumière. Une mission conjointe entre Mars et Vénus est envoyée sur place pour comprendre ce qui s’est passé et ce qu’ils sont devenus. Bien sûr, chaque camp désire s’arroger pour lui seul le secret du voyage instantané. Et la lutte ne se résume pas aux seuls Martiens et Vénusiens...



Romain Benassaya n’en est pas à son coup d’essai, « Les naufragés de Velloa » est déjà son troisième roman et son quatrième « La dernière arche », se déroulant dans l’univers de « Pyramides », vient de paraitre aux éditions Critic.

Velloa n’est autre que le nom de la planète où arrive le vaisseau transportant l’équipage en charge du mystère. L’action se résume rapidement à trois protagonistes : Mark le Martien, Karen la Vénusienne et Linéa dont l’allégeance est plus trouble. La société autochtone est décrite par le biais de Dayani, une jeune femme dont le mari est déjà désigné afin de poursuivre la lignée. Entre le présent se déroulant à la surface de la planète et les retours sur le passé permettant de saisir comment les choses en sont arrivées là, le déroulement est plaisant à suivre.
Romain Benassaya décrit ce qu’est devenu le système solaire où Mars et Vénus veillent jalousement sur leurs surfaces habitables, ignorant les naufragés n’ayant nulle part où aller afin de vivre dignement. Leur surnom, « les Blattes », en dit long sur la manière dont ils sont considérés. Pour eux, Velloa constitue une indéniable issue de secours, la possibilité d’un nouveau départ, mais les deux puissances n’y vont pas dans le but d’offrir ce monde, mais de s’approprier une technologie inconnue. Les actions des trois s’apparentent à une partie d’échecs, de poker menteur. Ensemble peuvent-ils changer ? Enfin se comprendre ?
Et comment l’Embrun 17 a-t-il pu franchir une telle distance en un instant ? Ce n’est qu’à la fin du roman que le fait trouve une explication, même si elle ne convaincra pas forcément, car elle relève un peu de la facilité. Il y en a d’autres qui retirent une grande part de danger aux trois arrivant sur une planète inconnue, mais elles relèvent tant du cadre SF que cela ne peut aucunement être reproché à l’auteur. Plus gênante est cette acceptation immédiate de leurs origines, jamais remise en question.

Qu’on ne s’y trompe pas, la vie sur Velloa est loin de se révéler idyllique, car les conditions y sont rudes. De plus, la société est scindée en deux avec le politique d’un côté et la religion de l’autre, deux camps symbolisés par le Capitaine et la Déesse. Les Ombres, uniquement des femmes, veillent au respect du culte et à la crainte de déplaire à la déesse. L’ignominie de ce culte se dévoile petit à petit. Est-il basé sur la simple foi ou une réalité tangible ? En effet, les trois se heurtent à une drôle de résistance. Karen change aussi en appréhendant les événements passés sur Velloa. Là aussi, il faut accepter les éléments que cela implique.

Entre Space opera et Planet opera... Romain Benassaya transporte aisément les lecteurs dans ce futur effrayant sur bien des points. Il y injecte un événement improbable pour explorer les possibles changements. Il le fait très bien et le lecteur est d’entrée happé par le récit qui propose bien des développements. Dayani arpente un chemin initiatique, celui du passage de l’adolescence à l’adulte qui ne veut pas d’une vie toute tracée, d’une société ne laissant pas le choix et préférant la punition au dialogue. Elle apporte le renouveau rendu possible par l’arrivée d’éléments extérieurs, les trois envoyés d’un système qui les a rejetés voilà bien longtemps. Le contexte se révèle très intéressant, propice à la réflexion sur l’inhumanité du traitement des naufragés et sur la mainmise des Ombres sur une population vouant un culte à la Déesse. Il est facile d’y voir une transposition de la géopolitique actuelle dans un futur lointain avec les différentes sociétés décrites et les problèmes récurrents.

« Les naufragés de Velloa » dépasse les 550 pages, sans que cela pèse dans la balance, car l’histoire se révèle plaisante et riche sur bien des points. Ce roman relève à mon sens d’une SF un peu plus ancienne, sans que ce soit une critique, car la SF d’aujourd’hui dérive souvent vers des contrées qui laissent un peu l’amateur de longue date au bord de la route. Romain Benassaya séduit, il apporte une dose de sense of wonder bienvenue.
« Les naufragés de Velloa » montre le potentiel de l’auteur et donne vraiment envie de lire ses autres romans.
Un nom à retenir.


Titre : Les naufragés de Velloa
Auteur : Romain Benassaya
Couverture : Niko Henrichon
Éditeur : Pocket (1ère édition : Critic, 2019)
Collection : SF
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 558
Format (en cm) : 10,8 x 17,7
Dépôt légal : mai 2021
ISBN : 9782266315685
Prix : 8,95€


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
9 juillet 2021


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