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Noël 2020 à moins de dix euros
James Morrow, Timothée de Fombelle
Deux livres entre mille

Nous avions signalé, les années précédentes ( « Noël 2016 à moins de dix euros », Noël 2017 à moins de dix euros, Noël 2018 à moins de dix euros, et Noël 2019 à moins de dix euros ), à quel point il est facile de se faire plaisir et de faire plaisir avec des sommes dérisoires. À une époque où dix euros de carburant ne vous emmènent pas bien loin, dix euros de livres sont encore capables de vous expédier au-delà de la galaxie, dans les abîmes du temps, dans les émerveillements les plus purs, ou même, pour ceux que la mièvrerie des fêtes agace, dans l’horreur la plus abominable. En cette année où beaucoup ont tant perdu en raison de la pandémie, il nous semble particulièrement important de souligner que d’excellents textes demeurent particulièrement abordables. Mille et un entre lesquels il est difficile de choisir, en voici deux à titre d’exemple.



Un cadeau fabuleux, riche, foisonnant, inimitable : L’Arche de Darwin de James Morrow

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La qualité et la quantité en un seul volume ? J’en ai rêvé, James Morrow l’a fait. Avec six cent pages pour un peu moins de dix euros, l’auteur de la Trilogie de Jéhovah revient sur les terres fertiles de la religion, du mythe et des sciences naturelles pour des aventures inventives et pleines d’humour. Et prouve une fois de plus que la littérature dite de genre n’est jamais aussi bonne que lorsqu’elle sort de ses ornières et rôde sur ses propres frontières. Une « fantaisie » au sens français du terme, une aventure historique avec ici et là quelques pointes de fantastique – le prêtre et généticien Gregor Mendel comme son propre fantôme anticipé, ou comme un voyageur du temps, dans une fumerie d’Istanbul – mais surtout une inventivité folle et une érudition considérable. L’histoire ? En ce milieu du dix-neuvième siècle, science et théologie s’affrontent en joutes oratoires pour le prix Percy Bysse Shelley, destiné à récompenser celui qui parviendra à réfuter ou à confirmer définitivement l’existence de Dieu. Chloé Bathurst, une jeune comédienne intelligente et délurée, un moment au service de Darwin, lui dérobe un de ses manuscrits et s’approprie sa théorie pour remporter le prix. Et alors que suite à ces joutes oratoires la Mayfair Diluvian League monte une expédition pour retrouver l’Arche de Noé, Chloé, avec l’Albion Transmutationnist Club, prend la tête d’une expédition concurrente aux Galapagos pour rechercher des spécimens capables de réfuter l’existence divine. Extravagant, rocambolesque, foisonnant, baroque, dense profus, cette « Arche de Darwin » offrira plus d’une belle soirée de lecture. Fidèle à son habitude, James Morrow fait feu de tout bois, enchaîne les trouvailles et les péripéties, brosse une galerie de personnages follement excentriques, délicieusement spirituels et parfaitement théâtraux, enchaîne avec humour les dialogues fins, acides, sarcastiques, empathiques, malicieux et terriblement « so british ». Vous voulez faire connaissance de l’excentrique père de Cholé, prêt à transformer deux nœuds coulants en personnages échangeant leurs souvenirs de pendaisons et découvrir le révérend Granville, capable de dévorer au sens propre le Livre des Révélations et d’incendier en masse ces épouvantails dont il est persuadé qu’ils se métamorphosent à la nuit tombée en créatures diaboliques ? Ce ne sont que deux personnages entre mille. Vous souhaitez recueillir une naufragée flamboyante et pleine d’esprit, faire naufrage à votre tour, rencontrer James Wallace, jouer au poker dans une mission brésilienne en utilisant des hosties en guise de jetons, remonter l’Amazone au péril de votre vie ? Ce n’est qu’un début. Cette «  Arche de Darwin  », qui a reçu le Grand Prix de l’Imaginaire il y a deux ans, méritait amplement sa réédition chez J’ai Lu. Que l’existence de Dieu soit avérée ou non, ce roman apparaît comme l’occasion d’une expérience de lecture assez paradisiaque.

Titre : L’Arche de Darwin, ou une préférence pour le singe (Galapagos Regained, 2014)
Auteur : James Morrow
Traduction de l’anglais (États-Unis), l’anglais (Grande-Bretagne) : Sara Doke
Couverture : Studio J’ai Lu / Christos Georghiou
Éditeur : J’ai Lu (édition originale : Au Diable Vauvert, 2018)
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 12844
Pages : 602
Format (en cm) : 11 x 18
Dépôt légal : septembre 2020
ISBN : 9782290214305
Prix : 9,40 €

Un cadeau pour retrouver la magie de l’enfance : Neverland de Timothée de Fombelle

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Aux antipodes du roman de Darwin, « Neverland  » est une toute autre expérience de lecture : bref, presque dépouillé, intimiste, tout en non-dits et en émotions intérieures, « Neverland  » apparaît comme un autre voyage, la recherche d’un autre paradis – le paradis perdu de l’enfance. Dans ce roman bref mais envoûtant, le périple oscille perpétuellement entre topographie réelle et espaces intérieurs, la magie est frôlement, la poésie s’invite presque à chaque page. Ici encore, on est dans aux frontières d’une littérature générale et d’une fantaisie très littéraire qui échappe aux étiquettes et au genre, qui se dérobe, comme en périphérie du champ de vision, comme le mot sur le bout de la langue que l’on cherche, que l’on retrouve parfois, qui se dérobe à nouveau. Très bref – une centaine de pages – ce roman distille néanmoins un véritable enchantement que l’on découvrira plus en détails à travers une précédente chronique.

Et comme ces idées de Noël se veulent indépendantes des modes et des époques on conseillera aussi :

Noël 2019 à moins de dix euros
Noël 2018 à moins de dix euros
Noël 2017 à moins de dix euros
Noël 2016 à moins de dix euros
Noël à moins de dix euros « La Mort aux tentacules de poussière »
Noël à moins de dix euros : « Comment cuisiner un phénix »
Noël à moins de dix euros : « Sprats »
Noël à moins de dix euros : « La montagne de minuit
Noël à moins de dix euros : « Vole avec moi »
Noël à moins de dix euros : « Les Montagnes hallucinogènes »


Hilaire Alrune
15 décembre 2020


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