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Gandahar n°21 - Jean-Pierre Andrevon apocalypses
Une publication de l’association Gandahar
Revue, n°21, SF - fantasy - fantastique, nouvelles - chroniques, décembre 2019, 160 pages, 9€

Il aura fallu attendre 21 numéros avant d’avoir, enfin, un « Gandahar » spécial Andrevon ! Et la ligne directrice est à la mesure du talent de l’ermite grenoblois : l’apocalypse.



George W. Barlow introduit cet opus avec un portrait de l’artiste, riche de plus d’un demi-siècle d’amitié. George, pour les petits jeunes, est sans doute un inconnu. Pour moi, plus proche du fossile que du nouveau-né, c’est le souvenir de chroniques fouillées dans « Fiction », et d’une gentillesse comparable à celle d’un Pierre Barbet.

Nous entrons ensuite dans le vif du sujet avec une nouvelle inédite des exploits de Sylvin Lanvère, le personnage central des « Hommes-machines contre Gandahar » : “La princesse si laide”. L’univers de « Gandahar » est basé sur l’opposition (et la supériorité) du naturel face à l’artificiel, et ce texte s’inscrit bien sûr dans ce schéma. L’avantage du « bio » sur le « mécanique » n’était pas vraiment à l’ordre du jour lorsque parut le premier roman d’Andrevon, novateur en son temps. Son idée générale sera d’ailleurs reprise peu de temps après par G-J Arnaud avec « Les Monarques de Bi ». Nous ne sommes pas en présence d’un chef-d’œuvre absolu, mais nous avons affaire à un texte agréable et bien ficelé, même si le dénouement est plus que prévisible. C’est une curiosité.

La nouvelle qui suit, “La dernière génération” de Miriam Allen DeFord date de 1946 et méritait vraiment d’être exhumée. À la suite d’une expérience atomique malheureuse (en existe-t-il d’heureuse ?), l’infertilité touche tous les mammifères sur Terre. Au bout de quelques années, chiens, chats, cochons, vaches, moutons et consorts disparaissent, l’humanité vieillit et s’achemine vers sa fin. Cependant, ce drame semble l’assagir. Elle se fédère au niveau mondial, découvre les saveurs de la paix, de la tolérance. C’est un très beau texte, qui illustre bien le thème général de ce numéro.

Andrevon reprend la main avec “Presque déjà la fin”, un récit publié il y a peu dans « Galaxies ». Jean-Pierre Andrevon et le nucléaire, c’est presque une histoire d’amour ! Opposé de tout temps à cette dangereuse manière de faire bouillir de l’eau, il nous décrit ici les agréables lendemains qui suivent un petit accident, style Tchernobyl, survenant dans notre beau pays. Implacable.
Il y a d’autres façons de pourrir le monde, et la guerre en est une. Avec “La dérive” Jean-Pierre Andrevon décrit la vie de combattants camés à mort, qui livrent un combat onirique dans des conditions exécrables et un environnement glauque, savamment dépeint.

“Les rats” est un texte plus anecdotique, amusant, qui permet de se détendre avant ce choc qu’est “Le dernier dinosaure”, une nouvelle où éclate tout le talent de Jean-Pierre Andrevon. Histoire désabusée d’un homme égaré dans un monde en déliquescence, simplement taraudé par le besoin de survivre, et prêt à tous les expédients pour cela. Ici, l’apocalypse a les couleurs des ordures entassées jusqu’à former des terrils aux périphéries des villes, dans lesquels croupit une humanité en déshérence. C’est désespéré bien sûr, amer, et l’arrière-plan politique d’une France à l’agonie ajoute sa noirceur au tableau. Un sommet dans l’œuvre de notre auteur.

Texte plus ancien (1971) “La peau d’un chien et les yeux d’une femme” porte déjà en germe les idées que Jean-Pierre Andrevon développera au fil des années : l’égoïsme qui précipite le grand plongeon final, l’aveuglement qu’induit la convoitise, la bêtise qui pousse l’homme à commettre des actes contre nature.

Ce numéro s’achève avec une longue nouvelle de Bruno Pochesci, “Ceux qui restent dans l’ombre”. Bruno Pochesci, c’est un peu le fils morganatique de Jean-Pierre Andrevon, et il conclut ce beau numéro avec brio. À la suite d’une catastrophe quelconque, l’humanité, exposée à une lumière solaire devenue trop forte, est réduite à un peuple d’ombres carnassières. Le narrateur de cette histoire, un certain Pino, rescapé miraculeusement de cette fin du monde, entend rejoindre la capitale des Alpes, et plus particulièrement des lieux qui nous sont familiers, dans les premiers contreforts du massif de la Chartreuse, face à la ville. Là, de l’autre côté de l’Isère, réside un certain Jipé auquel il a bien l’intention de faire enregistrer des chansons que personne n’écoutera plus, faute d’auditeurs. Humour, tendresse, inventivité habitent ces pages que l’on savoure avec un plaisir grandissant. Heureusement Bruno que ton héros s’est arrêté à Voiron plutôt qu’à La Verpillière, mon ombre l’aurait pas raté !

Suivent quelques chroniques. Ce numéro de « Gandahar » est abondamment illustré de dessins signés Andrevon. Le vieux pachyderme de Grenoble barrit toujours, et, croyez-moi, on l’entend de loin.


Titre : Gandahar
Numéro : 21 - Jean-Pierre Andrevon apocalypses
Directeur de publication : Jean-Pierre Fontana
Rédactrice en chef : Christine Brignon
Couverture : Séverine Pineaux
Type : revue
Genre : Science-fiction, fantasy, fantastique
Site Internet : l’association Gandahar
Dépôt légal : décembre 2019
Périodicité : trimestrielle
ISSN : 2418-2052
Dimensions (en cm) : 16 x 24
Pages : 160
Prix : 9 €



Didier Reboussin
6 juin 2020


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