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Enfance des dieux (L’)
Christine Renard
Gandahar, Patrimoine de l’Imaginaire, roman (France, 1961), science-fiction, 1er trimestre 2020, 234 pages, 11€

« L’enfance des Dieux » n’est autre que le premier roman de Christine Renard qui n’avait encore rien publié en 1960. Elle l’a écrit dans le cadre du concours « Grand Prix international du roman d’anticipation et de science-fiction » qu’elle a remporté, ce qui lui a valu une traduction en italien sous le titre « Gli occhi pieni di stelle » et la publication dans un fascicule des éditions Mondadori, ce qui revenait à un abandon pur et simple de tous ses droits.
Longtemps considéré comme perdu, ce roman paraît pour la première fois en français, non dans une version traduite de l’italien, mais sûrement d’après une version remaniée trouvée dans les importantes notes de Christine Renard que son mari Claude Cheinisse avait confiées à Éric Vial, peu avant de tuer toute sa famille et de se suicider.



Éric Vial signe une importante préface, ainsi qu’une longue postface complétée par une postface à la postface, le tout couvrant plus de 40 pages ! Il explique l’histoire de ce roman, comment il a réapparu à la surface dans une version proche de l’originale, même s’il demeure toujours des zones floues autour. Il offre là un paratexte fourni, n’omettant pas les défauts de l’ouvrage, mais il donne tout de même une légitimité à cette publication, insistant sur ses points forts et le fait qu’il s’agit d’un premier roman.
Effectivement il faut garder ce point à l’esprit en le lisant, ainsi que son année de rédaction : 1960.

« L’enfance des dieux » s’attache à Anne Dercourt qui a toujours vécu au milieu de mutants sans le savoir. Ce sont tous des enfants nés dans des bocaux, donc de manière artificielle, ils ont développé des capacités surhumaines, voyant les hommes comme des inférieurs appelés à les servir. Ils sont nombreux à vouloir l’instauration d’un ordre nouveau. Problème : Anne est aussi née dans un bocal, mais c’est une femme non pourvue des dons des autres mutants, tous des hommes. Du moins, c’est ce que tout le monde croit...

Situé en 2025, le cadre science-fictif ne semble guère différent de celui où il a été écrit. Rien de futuriste dans la société nouvelle, si ce n’est ces bébés en bocaux, fruits de quelques campagnes d’expériences et qui ont connu des fortunes diverses. Le cadre est le reflet de celui de 1960 avec une condition féminine peu reluisante : soumise à l’homme, dépendante, obéissante, au foyer... Anne est fière de servir le café lors des réunions chez eux, elle vouvoie les invités, pourtant d’anciens camarades de classe. L’homme est tout-puissant, les mutants sont tous masculins et ne voient en la femme qu’une inférieure, même si née dans les mêmes conditions qu’eux. Christine Renard ne s’est pas vraiment débarrassée du carcan de l’époque, même si elle prête à Anne et ses consœurs d’autres qualités. Le pire, c’est que le lecteur ne s’attache pas vraiment à ce personnage féminin qui se révèle froid et qui voit les pires événements d’un œil indifférent, ce qui ne plaide pas en sa faveur. D’ailleurs, elle regarde les simples mortels avec un certain dégoût. Comment un homme ose seulement lui avouer son amour, à elle qui partageait sa vie avec des êtres supérieurs ?
De plus, certaines maladresses peinent à passer : Anne qui se fiance à Philippe à 5 ans, ce dernier lui achetant une bague de fiançailles à cette occasion !
Le récit est aussi saccadé, avançant par paliers ; les événements manquent parfois de liant, ce qui est troublant, comme si des passages avaient été coupés (ce qui est possible). Il y a une escalade très rapide dans la volonté des mutants à prendre le pouvoir et qui ne colle guère à leur intelligence supérieure, même si elle est contrecarrée, et le mutant apparait dans toute son inhumanité.
J’ai trouvé le début assez prenant, mais l’intérêt s’étiole assez rapidement et la fin ne convainc pas.

Le grand mérite de cette publication est avant tout de rendre disponible en français cet inédit de Christine Renard et l’imposant paratexte d’Éric Vial apparait par moments comme une justification : « L’enfance des dieux » est un premier roman et en cela il n’est de loin pas exempt de défauts, mais il recèle déjà les qualités qui feront de Christine Renard une grande auteure. Il faut le prendre comme une curiosité, comme le reflet de son année de création, ce qui en fait tout de même un roman très daté.


Titre : L’enfance des Dieux
Auteur : Christine Renard
Couverture : Design de Chris Brigonne
Éditeur : Éditions Gandahar
Collection : Patrimoine de l’Imaginaire
Pages : 234
Format (en cm) : 13,6 x 21,5
Dépôt légal : premier trimestre 2020
ISBN : 9782490504008
Prix : 11 €


Christine Renard sur la Yozone :
- « La mante au fil des jours »
- « Gandahar n°16 - Christine Renard, les œuvres oubliées »
- « Galaxies n°59 » spécial Christine Renard

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François Schnebelen
5 mai 2020


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