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Gandahar n°13 - La Course
Une publication de l’association Gandahar
Revue, n°13, SF - fantasy - fantastique, nouvelles - article, juin 2018, 120 pages, 8€

« Gandahar » nous propose un numéro de bonne tenue sur un thème débridé - la course - qui a manifestement inspiré à ses auteurs compétitions hallucinantes ou fuites en avant vertigineuses.



La compétition est clairement au cœur de la plupart des nouvelles présentées ici, mais il s’est trouvé quelques individualités pour aborder ce sujet sous un angle inédit.

C’est le cas de Pat Cadigan avec “Dans la Course”, texte dans la droite ligne de ce qu’aurait pu écrire un Ballard sur ce thème. Dans une société en déliquescence, une femme attend avec une certaine appréhension le passage dans sa ville d’une foule de coureurs qui se sont jetés sur la route sans raison apparente, comme atteints d’un virus. Ces forcenés courent interminablement, sans boire, sans manger, sans se soulager d’aucune façon, usant leurs chaussures, courant sans but défini, indifférents aux catastrophes qui peuvent les frapper et emporter des centaines d’entre eux. Ce qui fait tout le talent de Pat Cadigan c’est que, malgré l’extravagance de l’idée, le lecteur ne sourcille pas devant les postulats avancés pour justifier cette folie collective. Un très beau texte pour cette lauréate des prix Hugo et Locus.

Changement de décor avec “Chevaucher le Bibosse”, récit de Vincent Ferrique, haut en couleur et plutôt trépidant. Sur le continent aride d’une planète quelconque, une course est organisée, mettant en concurrence une poignée de mutants. Le gagnant ramassera une fortune mais il sera bien le seul. Ses rivaux seront obligatoirement condamnés. La course est abordée selon trois tactiques : la complicité passagère entre deux individus, la prédation d’un coureur vis-à-vis d’un autre, l’équipée solitaire. Ces trois aspects sont traités avec bonheur et rendent ce texte savoureux.

On reste dans la compétition avec “Soixante secondes chrono” de Xavier-Marc Fleury. Une course illégale utilisant des passages temporels entraîne ses candidats à diverses époques. De très bonnes idées émaillent ce texte, je pense en particulier à la disparition instantanée d’un coureur qui écrase au 18ème siècle des indiens, dont l’un au moins devait être son ancêtre. Comme dans les récits précédents, l’écriture est entraînante et nous jette dans cette course féroce où l’on joue avec le temps sans vergogne et sans se poser de question quant aux conséquences de ces irruptions sur le déroulement futur des événements. (Une police temporelle est toutefois là pour rétablir l’ordre des choses en réparant les « accrocs » produits par les coureurs.) Une bonne nouvelle donc.

Encore et toujours cet esprit de compétition dans “La course à l’emploi” d’Agathe Tournois. Des demandeurs d’emploi sponsorisés par des boîtes de recrutement s’affrontent dans une épreuve de course pour décrocher un poste. Tous les coups sont permis et de nombreux pièges attendent les malheureux concurrents. Bonne idée mais un peu desservie par un style d’écriture pas franchement entraînant.

Dans un monde ravagé sur lequel les rescapés de l’humanité survivent sous terre, Cancereugène (sacré pseudo !) avec “No pity” nous fait partager les tourments que rencontrent quelques candidats lancés dans une course infernale à la surface pour empocher un pactole. Mine de rien, notre auteur brosse avec bonheur le tableau d’une Terre empoisonnée, où sa reconquête passe par une évolution biologique. Cette hypothèse et la course se croisent et livrent un résultat pour le moins inquiétant. Bien vu.

Wilfried Renaut avec “Les Saturnautes” nous raconte l’histoire d’un jeune homme qui commet l’erreur de formuler des remarques inappropriées vis-à-vis d’un de ses supérieurs et se retrouve pour la peine, et à son insu, projeté dans une course pour laquelle il n’est pas préparé. Une course un peu barbare sur les bords, au long des anneaux de Saturne. C’est un texte d’une bonne facture, plaisant à lire.

Le suspens est au menu de “Cavale boréale” du Canadien Jason Roy. Un gangster décide de se faire tout petit après un gros coup, histoire d’être oublié par les autorités, mais sa cachette est investie par la police et il a juste le temps de s’en échapper. Il est alors mis au vert par sa bande au plus profond de la forêt canadienne. Hélas, sa quiétude est de courte durée et la police – en fait des androïdes infatigables – le prend en chasse en moto neige à travers les immensités des bois et des lacs. C’est haletant, même si l’argument SF est mince.

Retour quelque part dans la galaxie avec “À dos de Rhinodendron” de Renaud Ehrengardt. Sur une planète perdue tombée entre les mains de la pègre, une course de méga éléphants est organisée au moment où ces bébêtes sont en rut. Un homme abandonné sur ce monde ne trouvera pas d’autre moyen de se procurer des ressources que de s’inscrire à cette épreuve. Quelques difficultés l’attendent. Traitement classique du sujet, mais pas déplaisant pour autant.

“Captain Bat Boy” de Christophe Garreau clôt ce numéro en abordant la course sous l’angle virtuel et numérique. Je n’ai pas réussi à faire le lien entre le comportement du personnage principal, qui semble avoir fait un sort à sa grand-mère à l’âge de sept ans pour une histoire de dentier (!) puis à son oncle et son rôle comme champion de course stellaire. Dommage, cet aspect de la course méritait en effet d’être abordé.

Beaucoup d’auteurs qui figurent à ce sommaire de « Gandahar » et qui ont livré des textes tout à fait remarquables sont de parfaits inconnus. Encore une fois, le rôle révélateur de revues comme celle-ci mérite d’être souligné. Du beau travail.


Titre : Gandahar
Numéro : 13 - La Course
Directeur de publication : Jean-Pierre Fontana
Rédactrice en chef : Christine Brignon
Couverture : Michaël Thomazo
Type : revue
Genre : Science-fiction, fantasy, fantastique
Site Internet : l’association Gandahar ; Sa page facebook
Dépôt légal : juin 2018
Périodicité : trimestrielle
ISSN : 2418-2052
Dimensions (en cm) : 16 x 24
Pages : 120
Prix : 8 €



Didier Reboussin
25 juillet 2018


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