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Nuits de San Francisco (Les)
Caryl Férey
Gallimard, Folio Policier, n°842, roman (France, 2014), Noir, 112 pages, septembre 2017, 5,90€

Sam est un Sioux de la tribu Oglala, au destin tout tracé : l’alcool pour seule compagne, le poussant à se détruire et à fuir ses responsabilités plutôt qu’à les affronter. Subsistant dans un état déplorable dans les rues de San Francisco, il croise Jane, une femme ayant une prothèse à la place d’une jambe. Cette rencontre s’apparente à une renaissance pour Sam, il trouve l’énergie de la suivre. Jane aussi traîne son lot de malheurs, ces deux-là ne peuvent que s’entendre.



« Les nuits de San Francisco » est un court roman noir qui se lit en moins d’une heure. Par son style incisif, Caryl Férey plonge d’emblée le lecteur dans l’existence de Sam dont les dés sont pipés dès la naissance. Il n’attend rien de la vie qui le lui rend bien. Le passé de la tribu Oglala est loin de la victoire sur les troupes de Custer, le drame de Wounded Knee l’a coupée de tout espoir. Ses membres subsistent dans l’ombre d’un glorieux passé qu’ils ne parviennent pas à assumer. Sam fuit sa tribu, non pas pour s’en sortir mais pour ne pas affronter ses responsabilités de futur père. Au fil de ses pérégrinations, il arrive à San Francisco où il vivote de la manche, dépensée en alcool.

La vue de Jane le ramène à la surface, il comprend qu’il a trouvé son animal totem, celui qui doit le guider. Jane est originaire de Fresno. Idem, rien à y espérer pour l’avenir. D’ailleurs elle a été violée à l’âge de 19 ans et a quitté Fresno élue plusieurs fois par les magazines comme « la ville la plus bête d’Amérique ». Elle qui ne croyait plus en l’amour a connu le coup de foudre pour un homme, mais une fois de plus, le destin a frappé durement : la face visible, sa jambe amputée, en témoigne. En cet indien qui la suit, elle trouve le compagnon idéal pour cette nuit.

Dans la première moitié du roman, Caryl Férey suit Sam, avant de consacrer la seconde moitié à Jane. À partir du moment où leurs chemins s’accordent, les lecteurs assistent aux mêmes scènes selon les deux points de vues. Les répliques trouvent un écho différent la seconde fois, car on comprend pourquoi Jane prête attention à un clochard.
La plongée dans « Les nuits de San Francisco » se fait en apnée, les yeux ne se relèvent pas des lignes distillant le désespoir. Il s’agit d’un roman noir dans toute sa splendeur avec des caractéristiques faisant mouche : d’un côté, un Sioux ployant sous le poids du passé, de l’autre, une femme brisée dans tous les sens du terme par la vie. Que peut-il découler de leur rencontre ? Une chance de ne plus être seuls ? Une étincelle d’espoir, mais en quoi ?
Le style de Caryl Férey se prête bien à ce genre de roman, car il est sans esbroufe mais efficace, direct.

« Les nuits de San Francisco » offre une plongée dans le noir en compagnie de deux personnages meurtris. La conclusion permet de reprendre son souffle, mais Sam, aussi bien que Jane, demeurent dans un coin de notre esprit.
Caryl Férey n’a pas besoin de s’étaler outre mesure pour immerger les lecteurs dans son imagination. Et ça, c’est appréciable !


Titre : Les nuits de San Francisco
Auteur : Caryl Férey
Couverture : D’après photo © Chen Liu / EyeEm / Getty Images.
Éditeur : Gallimard (1ère édition française : Arthaud/Flammarion, 2014)
Collection : Folio Policier
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 112
Format (en cm) : 10,9 x 17,8
Dépôt légal : septembre 2017
ISBN : 9782072746079
Prix : 5,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
13 novembre 2017


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