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Mör
Johana Gustawsson
Milady, Thriller, roman (France, 2017), policier, 370 pages, octobre 2017, 7,90€

Sur la rive d’un lac suédois est retrouvé le corps d’une femme, dont les seins, des morceaux de fesse et de cuisses ont été découpés par le tueur qui l’a abandonné là. Un peu après, une femme est enlevée à Londres et, comme la précédente victime, ses chaussures sont retrouvées soigneusement rangées dans un sachet de congélation. Les deux cas portent la signature de Richard Hemfield, un serial killer encore sous les verrous. S’agit-il d’un copycat ? D’un complice ? Ou la justice a-t-elle condamné un innocent ?
Le chef de la police londonienne demande l’aide de la profileuse Emily Roy. L’écrivaine Alexis Castells suit l’affaire de près, car son ancien compagnon a été tué par Hemfield lors de son arrestation. Elle ne peut croire en son innocence.



Le titre signifiant en suédois « tendre » en parlant de viande, le nom de l’auteure Johana Gustawsson et le lieu où la première victime affreusement mutilée est trouvée font indubitablement penser à un polar suédois. Il n’en est rien, ce roman n’est pas traduit. Johana Gustawsson est née à Marseille en 1978 et vit aujourd’hui à Londres. « Block 46 » son précédent roman mettant aussi en scène Emily Roy et Alexis Castells, traitait des camps de la mort. L’inspiration s’avère ici différente et remonte même à Jack l’éventreur.

Johana Gustawsson a choisi de raconter l’histoire suivant trois trames, la principale suivant l’enquête autour des meurtres. Dans le même temps, un fil secondaire présente la victime londonienne et le traitement qu’elle subit : enfermée dans une chambre, attachée à un lit, elle reçoit juste une boisson aux relents de citron et de gingembre, ses réveils s’accompagnent de douleurs dues aux mutilations... Ces passages dans la peau de la victime s’avèrent éprouvants et le lecteur assiste à une course contre la montre des forces de l’ordre pour la trouver encore vivante. Oui, mais dans quel état ?
Autre fil rouge plus mystérieux, car débutant à Whitechapel à la fin du XIXe siècle alors que Jack l’éventreur sévissait. Au fil du roman, cette trame se rapproche de notre époque et révèle son lien avec l’affaire actuelle, mais tout en conservant ses distances. Le déroulement est bien orchestré par l’auteure qui œuvre par courts chapitres. L’action se déplace aussi souvent, entre Londres et la Suède, entre les différents protagonistes, ce qui donne du rythme au récit.

Toutefois, il faut relever le nombre important de personnages. D’un côté, il y a l’équipe suédoise, de l’autre, celle de Londres. Emily Roy gravite entre les deux et Alexis Castells qui n’a en quelque sorte aucune légitimité mais que Emily connaît mène sa propre enquête. Il n’est pas toujours facile de suivre et il aurait été bon de faire un sérieux tri pour faciliter la compréhension.
Cette enquête ressemble à une affaire de femmes. Emily Roy coordonne en quelque sorte les efforts, elle fait le lien entre les équipes. En Suède, Karla Hansen, la nordique dans toute sa beauté, mène la danse. Dans son staff se trouve une étonnante stagiaire dont l’intérêt m’a interloqué. C’est elle qui s’impose dans l’affaire, elle outrepasse largement son rôle et en plus, elle a le syndrome d’Asperger. C’est un peu gros et nuit à la crédibilité de l’ensemble. Et puis Alexis Castells se greffe encore dessus. D’ailleurs, sa présence n’est pas sans faire penser, tout comme son nom, à la série « Castle ». Ce qui est aussi problématique avec cette profusion de personnages ( et je n’ai pas parlé des hommes !), c’est qu’ils ne sont pas forcément aussi fouillés qu’ils l’auraient mérité. Emily apparaît pour le moins froide, distante et la plupart manquent de relief.

Par contre, l’intrigue s’avère bien ficelée, l’auteure rivalise d’ingéniosité pour mieux surprendre les lecteurs. Elle se plaît à aller toujours plus loin, sans que cela ne fasse de trop finalement, car les révélations se tiennent et la conclusion est somme toute logique, si l’on revient sur la trame partant de Jack l’éventreur. L’histoire n’est pas pour les âmes sensibles, car elles risquent de ne pas aller jusqu’au bout au fur et à mesure des révélations.

Avec « Mör », Johana Gustawsson a construit une histoire diabolique qu’elle mène jusqu’au bout sans faiblir et sans faire dans la demie mesure. Elle conduit très bien le récit en expliquant notamment l’origine du mal, sans trop en dévoiler et en gardant le suspense toujours intact. Elle surprendra et séduira bien des lecteurs. Même en considérant les quelques menus défauts, il s’agit là d’une bonne surprise.

Il est aussi à noter que « Mör » est publié en poche sept mois seulement après sa sortie en grand format, un court délai assez rare pour être souligné. Autant en profiter et pourquoi pas lire auparavant « Block 46 », la première aventure d’Emily Roy et Alexis Castells.


Titre : Mör
Auteur : Johana Gustawsson
Couverture : Photographie © Edward Fielding / Arcangel Images
Éditeur : Milady (édition originale : Bragelonne, 2017)
Collection : Thriller
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 370
Format (en cm) : 11 x 17,7
Dépôt légal : octobre 2017
ISBN : 9782811231927
Prix : 7,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
9 novembre 2017


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