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Soul of London
Gaëlle Perrin-Guillet
Milady, collection Thrillers, polar victorien, 305 pages, septembre 2017, 7,20€


« Il tenta en vain de distinguer leurs visages. Habillés de sombre, masqués par des capuchons, leurs traits semblaient brouillés au charbon. Du meneur, il ne discerna que les yeux : deux puits obscurs, sans fond.  »

Londres, au début des années 1890. L’inspecteur Henry Wilkes, victime deux ans plus tôt d’un accident de circulation, traîne la patte et ne peut plus courir après les criminels. Gardé malgré tout dans la « Division D » grâce au soutien du commissaire Andrew Parker, il se trouve par la force des choses relégué aux enquêtes de moindre importance. Déprimé, mais pugnace, il s’accroche à son travail, même s’il s’agit de simples affaires de « chiens écrasés. » Des chiens morts, oui, mais pas n’importe lesquels : on retrouve dans les sous-sols du métro et des égouts des chiens morts, le crâné défoncé, le cerveau sectionné. Ce qui n’est pas tout à fait banal.

« Tout est l’œuvre du diable, vous m’entendez ! Le diable !  »

Fort heureusement, Wilkes a pris sous son aile William Bennett, un jeune garçon originaire des bas-fonds, qui lui servira d’auxiliaire et – puisque les aventures de Sherlock Holmes écrites par Conan Doyle commencent à connaître un véritable succès, y compris dans la police – jouera le rôle d’un des fameux « Baker Street irregulars ». Une aide d’une importance considérable dans la mesure où l’affaire se complique : c’est un cadavre d’enfant que l’on retrouve cette fois-ci le crâne défoncé et le cerveau sectionné. Et une seconde enquête vient se surajouter à la première : Alice Pickman, une jeune femme bien comme il faut, vient lui demander d’enquêter sur l’assassinat de sa sœur, qui apportait des soins aux déshérités des bas quartiers – une affaire qui de toute évidence a été bâclée par ses propres collègues.

« Si cela devait se reproduire, la ville pourrait connaître un nouveau soulèvement. Une étincelle, et tout prendrait feu.  »

En proie – par principe – à l’hostilité de ses collègues qui le considèrent comme un rebut, harcelé par un journaliste qui lui complique la tâche, Wilkes s’obstine. Les rumeurs enflent, dans un contexte qui n’a rien de facile : les crimes de Jack l’Éventreur, qui ne remontent qu’à quelques années, restent particulièrement vifs dans les mémoires et les lenteurs ou les incapacités de la police risquent de se retrouver rapidement dénoncées par la presse et par la population. On s’en doute : les deux affaires sur lesquelles Wilkes enquête se révéleront liées entre elles et il lui appartiendra de retrouver et renouer entre eux l’ensemble des fils de ces intrigues.

« Je vous avais prévenu. Vous n’êtes pas prêt à entendre la vérité ! Votre âme brûlera en enfer, inspecteur !  »

Malgré ses trois cent cinq pages, «  Soul of London » apparaît comme un roman extrêmement bref : ce sont en effet des pages peu denses, écrites en gros caractères, et constituées en majorité de dialogues. C’est dire que les descriptions sont réduites à l’essentiel et que si l’ambiance fonctionne, la reconstitution de Londres de cette fin de dix-neuvième siècle n’a pas le caractère fouillé des romans de Michel Moatti ou de François Baranger. Cette brièveté impose à l’auteur de brosser ses personnages à grands traits, avec à l’occasion quelques clichés (« cette femme au caractère si fort et pourtant si fragile »), mais l’auteur prend soin de ne jamais omettre l’essentiel, c’est-à-dire l’arrière-plan des inégalités sociales, des quartiers déshérités dans lesquels des pans entiers de la population sont sacrifiés aux progrès et aux avancés d’une ère industrielle en plein essor. L’intrigue, si elle est un peu trop servie par une série de coïncidences vraiment opportunes, évite l’écueil du linéaire et se révèle suffisamment complexe pour réserver des révélations inattendues.

« Soul of London » se lit vite, se déroule vite, et ressemble très exactement à ce qu’il veut être : non pas un roman documenté et détaillé, mais un épisode feuilletonnesque, le premier d’une série de courts polars/thrillers londoniens consacrés à la fin de l’époque victorienne. Premier tome des « enquêtes de Henry Wilkes et Billy Bennett », d’une lecture facile et agréable, ce « Soul of London » devrait donc être suivi d’autres épisodes. Le second, « Black Past », était programmé aux éditions Fleur Sauvage, en difficulté cette année mais relancées grâce à un financement participatif. Reste à espérer que « Black Past » finira par voir le jour, que ce soit chez Fleur Sauvage ou chez Milady, et que les aventures de Wilkes et Bennett se déclineront en multiples tomes, à la façon des « Grands détectives » des éditions 10-18.

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Titre : Soul of London
Auteur : Gaëlle Perrin-Guillet
Série : Les Enquêtes de Henry Wilkes et Billy Bennett, tome I
Couverture : Roy Bishop / Arcangel Images
Éditeur : Milady (édition originale : Fleur sauvage, 2016)
Collection : Thriller
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 305
Format (en cm) : 11 x 18
Dépôt légal : septembre 2017
ISBN : 9782811238087
Prix : 7,20 €



Hilaire Alrune
29 septembre 2017


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