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Sucre et de sang (De)
Pascal Grand
Corsaire Éditions, Pavillon Noir, roman (France), polar historique, 320 pages, avril 2017, 14€

Le Chirurgien juré de la ville d’Orléans, Antoine Léonard Toussaint, a déjà aidé plusieurs fois la police par ses analyses post-mortem. Aussi, tout naturellement est-il appelé ce mercredi 23 mars 1785 pour faire les constatations d’usage sur un corps retrouvé dans une bascule, une cage permettant de convoyer le poisson vif le long de la Loire.
Les jours et semaines qui suivent amènent leur nouveau lot de cadavres, des femmes égorgées, reliées de près ou de loin à la raffinerie de sucre Marotte. C’est l’occasion pour Toussaint de faire connaissance avec Hortense Marotte et peut-être de commencer une nouvelle vie.



Pascal Grand nous convie à un polar historique se déroulant à Orléans en 1785. De nombreuses raffineries de sucre rendaient la ville célèbre dans le royaume. La Loire permettait au commerce de prospérer, les matières premières étant charriées le long de son cours. « De sucre et de sang » offre une très belle découverte de cette époque. La navigation sur la Loire est décryptée, expliquée avec ses méthodes, son langage, c’est-à-dire le nom donné à toutes les embarcations suivant leur rôle. Il s’agit là d’une mine d’informations qu’un glossaire complète. Le passage d’un convoi sous un pont se révèle ainsi passionnant.
De même, les différents commerces, en premier lieu celui du sucre, ainsi que les métiers d’autrefois, sont exposés aux lecteurs et enrichissent cet ouvrage, lui donnant un cachet d’authenticité.
Toutefois l’auteur a péché par une volonté d’en faire trop en rajoutant une histoire brouillonne incluant la franc-maçonnerie locale et un Illuminé de Bavière. Par moments, le lecteur tombe sur des extraits de tenues maçonnes qui surprennent au plus haut point et ne se justifient guère dans l’intrigue. L’Illuminé joue bien un rôle, mais était-ce vraiment nécessaire ?
À mon avis, la navigation sur la Loire et le commerce du sucre suffisaient amplement à nourrir l’intrigue.
À l’occasion, Pascal Grand s’emmêle aussi au sujet des victimes : ce n’est pas le corps de Perrine Jean qui a été trouvé à bord du Jeanne-Marie, mais celui de Madeleine Robin.
Toutefois, ces quelques imperfections ne ternissent pas la qualité de l’ensemble.

Toussaint contraste par rapport aux médecins habituels, grands adeptes des saignées et autres remèdes dépassés et qu’il tient en piètre estime. Il doit sa réputation à la rigueur qu’il met à autopsier les victimes et à en faire des déductions permettant d’établir les causes du décès. Il essaie notamment d’écrire un ouvrage sur la question. Aujourd’hui les séries télé montrent l’importance des légistes dans l’élucidation des crimes, mais c’était alors une révolution.
Se prenant d’affection pour Hortense Marotte, il mène sa propre enquête sur la vague de meurtres, bien secondé en cela par un voisin de location, Nicolas Grostête, inspecteur des Turcies et Levée. Pourquoi la piste suivie conduit-elle vers la raffinerie Marotte ?
Le contexte, les enjeux locaux rendent l’affaire touffue et dangereuse, mais lui donnent une indubitable saveur. Le lecteur est transporté dans cette ville d’Orléans fin du 18e siècle et vit au rythme de la navigation sur la Loire et des soirées arrosées dans les auberges. Le décalage avec la société actuelle renforce encore l’emprise du roman et le rend d’autant plus passionnant.

Pascal Grand signe là un polar historique très prenant. Son personnage central, à la pointe dans les débuts de la médecine légale, à la répartie facile mais affichant des blessures internes, gagne la sympathie des lecteurs. Et ce qui ne gâche rien, d’autres intervenants augmentent encore l’attrait de ce roman. Autre point fort : le contexte de l’époque avec Orléans, le commerce du sucre, la navigation sur la Loire qui enrichissent vraiment l’ensemble. Une fois la dernière page lue, se dégage une impression de s’être distrait tout en s’étant instruit de belle manière. Et personnellement, j’aimerais bien retrouver cet univers et ses personnages dans d’autres romans.
« De sucre et de sang » annonce la couleur, tout n’est pas blanc, le rouge du sang entache souvent ce commerce. Une très belle surprise !


Titre : De sucre et de sang
Auteur : Pascal Grand
Couverture : Charles Pensée, Vue d’Orléans prise de la rive gauche de la Loire (1837), lithographie aquarellée, musée de la Marine de Loire, Châteauneuf-sur-Loire
Éditeur : Corsaire Éditions
Collection : Pavillon Noir
Site Internet : Roman (site éditeur) 
Pages : 320
Format (en cm) : 12 x 20
Dépôt légal : avril 2017
ISBN : 978-2-917843-43-7
Prix : 14 €


Autre livre de la collection :
- « Les tigres ne crachent pas le morceau » de Michel Maisonneuve

Pour écrire à l’auteur de cet article :
[email protected]


François Schnebelen
27 mai 2017


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