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Satanie
Fabien Vehlmann et Kerascoët
Soleil

Charlotte, qui préfère se faire appeler Charlie, n’a pas abandonné l’espoir de retrouver son frère Constantin, disparu lors d’une mission archéologique. Ce dernier cherchait à démontrer l’existence de l’enfer, mais les conditions météo l’ont empêché de revenir et il a été considéré perdu corps et biens.
La sécheresse de l’été permet d’explorer plus avant les galeries dans lesquelles il a disparu. L’abbé Montsouris se lance à la suite de la mission de secours pour les alerter du danger et leur sortir cette folie de la tête.
Contre toute attente, ils se retrouvent tous coincés et obligés d’aller toujours plus loin, sur les traces de Constantin.



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Tout d’abord, un mot sur l’aspect de l’album qui est d’une très belle facture : une bonne prise en main, une couverture avec gaufrages dorés offrant de nombreux détails propices à éveiller l’imagination, la tranche noire arbore aussi en creux des inscriptions dorées avec des éclairs, voire des racines plongeant au centre de la Terre.
L’objet est magnifique et attire vraiment le regard.

Qu’en est-il de l’histoire proprement dite, qui n’est pas sans évoquer “Voyage au centre de la Terre” de Jules Verne et aussi le mythe d’Orphée avec cette recherche pour ramener un être cher d’entre les morts ? Le début s’avère prenant, cette mission se transforme rapidement en une fuite devant la furie des eaux. C’est alors qu’une issue s’offre à eux, les plaçant dans les traces de Constantin. Cité cachée, voyage toujours plus lointain, plus profond s’accompagnant aussi bien de dangers que de découvertes fantastiques... figurent au programme. L’enfer existe-t-il ? Quel forme prend-il ? Ou n’est-il qu’intérieur ?

Si le début peut être qualifié de classique, à partir du tiers de l’album, le lecteur est de plus en plus dérouté par les développements. La couleur accompagne ce changement, le rouge prêté à l’enfer prend toujours plus de place et s’impose comme la norme. La chaleur se dégage des pages, avant que l’ambiance n’évolue à nouveau vers des tons toujours plus psychédéliques que ne renieraient pas certains artistes de l’art visionnaire.

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Le choix discutable d’imposer un abbé à cette expédition, dont la plupart des membres sombre dans la folie, sert à donner un contrepoint à l’univers exposé. Le représentant de Dieu apporte un regard sur ce monde de Satanie proche du centre de notre planète. Lui aussi est soumis à la tentation, révélant un autre visage. Son vrai visage ?
Le récit est porté par Charlie, une adolescente en plein changement qui se révèle dans cette aventure. D’un garçon manqué, elle se transforme en femme dégageant de la sensualité et éprouvant des désirs.

Le scénariste Vehlmann se laisse aller au-delà de toute vraisemblance, sans que ce soit forcément un reproche, car en lâchant la bride à son imaginaire qu’il justifie par une certaine interrogation scientifique, il permet aux deux dessinateurs, Marie Pommepuy et Sébastien Cosset, œuvrant sous le nom de Kerascoët, d’explorer de multiples ambiances visuelles, des plus colorées aux plus sombres. Les lecteurs en prennent plein les yeux, perdant tout repère, ce qui est peut-être bien le but, comme d’interroger sur les croyances en un enfer.

En contrepartie, l’histoire n’est pas sans dégager une certaine naïveté, ce qui la dessert, car il est difficile de lui accorder crédit. Au-delà d’un certain point, le lecteur peine à croire aux développements malmenant le bon sens. Aucun ne pourrait survivre à ce qu’il affronte. Il faut accepter l’impossible pour savourer la folie déployée par les auteurs, qui vont très loin dans la démesure. L’objet se révèle d’ailleurs en accord avec son contenu.

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“Satanie” est une bande dessinée haute en couleurs aussi bien par son scénario que par son dessin et ses colorisations. Le lecteur doit accepter de plonger dans les entrailles de la terre, s’accompagnant d’une certaine folie et de naïveté qui se traduisent dans le dessin comme dans le récit. Certains adhéreront, d’autres pas. Ce n’est pas le genre de BD à faire l’unanimité. Si la beauté de l’objet rencontrera tous les suffrages, il n’en sera sûrement pas de même du contenu.
Il faut tout de même saluer le fait de trouver de telles bandes dessinées si différentes, si surprenantes et animées d’une douce folie, ce qui est souvent le cas de cette collection Métamorphose.

À noter qu’en août 2011 était sorti chez Dargaud le premier tome de “Voyage en Satanie”, qui trouve ici sa conclusion dans une version intégrale.


Satanie
- Scénario : Fabien Vehlmann
- Dessin & couleurs : Kerascoët
- Éditeur : Soleil
- Collection : Métamorphose
- Dépôt légal : 26 octobre 2016
- Format : 22,1 x 31,5 cm
- Pagination : 128 pages couleurs
- Numéro ISBN : 978-2-3020-5386-1
- Prix public : 22,95 €


Illustrations © Kerascoët et Éditions Soleil (2016)



François Schnebelen
3 avril 2017




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