Genre : Drame et biographie sociale
Durée : 1h57
Avec Curtis “50 Cent” Jackson (Marcus), Adewale Akinnuoye-Agbaje (Majestic), Joy Briant (Charlene), Omar Benson-Miller (Keryl), Tory Kittles (Justice), Marc John Jefferies (Marcus Jeune), Bill Duke (Levar), Terrence Howard (Bama), Ashley Walters (Antwane), Viola Davies (Grand-Mère), etc.
Le rappeur Curtis Jackson, alias « 50 Cents », est incontestablement ce qu’il est arrivé de mieux au rap US depuis bien longtemps. Une des rares figures artistiques crédibles dans un milieu qui verse depuis 10 ans dans l’outrance facile, la provocation friquée et la vulgarité de bas étages mal assumée.
Sans remonter jusqu’aux mythiques Beastie Boys dont on entend d’ailleurs un célèbre morceau dans le film, il est bien loin le temps des NWA, des révolutionnaires Public Enemy (une affiche dans la chambre du jeune Curtis Jackson dès la première heure), des déjantés de House of Pain, des Ice T, Ice Cube et consorts (sans oublier les remarquables The Disposables Heroes of Hiphoprisy et leur cultissime « TV, drug of a nation »).
Bref, adieu veaux, vaches et bienvenue aux cochons, le rap est devenu un objet showbiz par excellence tout juste bon à faire baver les mômes en détresse devant des nanas siliconées et des bagnoles consommant 35 litres au cent...
« Réussir ou Mourir », excellente traduction du titre américain (« Get rich or die tryin’ », littéralement, Devenir riche ou mourir en essayant) et titre éponyme de l’album de la révélation de 50 Cent, est même un sacré bon film. Loin des clichés que l’on craignait très fort, à des kilomètres d’une imagerie Gangsta’Rap que l’on sentait pourtant venir...
Curtis Jackson n’est pas un blaireau, c’est clair. Futé, très futé le gars.
Confier la réalisation d’un tel projet à l’Irlandais Jim Sheridan (« My Left Foot », « The Field », « Au Nom du Père », « The Boxer ») n’apparaîssait pas comme une évidence et pourtant, le choix est excellent. Sheridan a parfaitement saisi le propos du film et du scénario.
Raconter l’histoire d’un gamin issu des quartiers défavorisés, black, orphelin très jeune, dealer doué très tôt et finalement rappeur sur le tard, était un sujet casse-gueule par excellence. Une usine à fabriquer de l’imagerie made in US, tout à la gloire d’une société libérale dont le slogan serait « tout le monde a sa chance chez nous ». Bref, les travers qui rendaient le film « 8 Miles » de/sur/avec Eminem passablement insupportable, sont soigneusement évités ici. Sheridan a beau reprendre les mêmes arguments (le drame, la drogue, la rédemption, la musique), il sait aussi qu’il filme une histoire inspirée par quelques événement marquants de la vie de 50 Cent, pas sa vraie vie ni sa biographie officielle.
Étrangement, la vision prolétarienne de Sheridan, efficace dans la problématique Irlandaise, fonctionne à plein régime sur cette histoire typiquement américaine. Ultime image du film et premier vrai concert de l’artiste, 50 Cent entre en scène après que son mentor en gangstérisme ait passé l’arme à gauche, le héros est libéré, s’offre au public, écarte les bras dans une image christique par excellence et se paye une nouvelle vie.
Mise en scène par n’importe qui d’autre, jouée par un imbécile de service, la scène eût été ridicule. Dans ce film, la logique de la réalisation, son extrême discrétion, rend le propos crédible et émouvant.
Sous la direction de Jim Sheridan, 50 Cent est donc devenu un acteur véritable et non pas l’acteur hollywoodien et formaté de sa vie. Nuance.
Son regard profondément malin et mélancolique, sa voix douce, son flow si caractéristique font merveille.
Les vraies présences, le charisme épatant d’acteurs comme Bill Duke (cf. « Les Seigneurs de Harlem ») ou Adewale Akinnuoye-Agbaje (le prisonnier 93A234 dans la série « Oz ») renforcent justement la solidité déjà épatante de l’édifice.
En fait, sous bien des aspects, on se rapproche beaucoup plus d’un film qui aurait pu être réalisé par Spike Lee, doté d’une vision politique et sociale réelle, que d’un catalogue de vente d’une BO par l’artiste du moment. Vous aviez aimé « Do The Right Thing », vous aimerez à coup sûr « Réussir ou Mourir ».
PS : Excellente (mais pas omniprésente) BO (CD chez Polydor), vous vous en doutiez et on vous le confirme.
FICHE TECHNIQUE
Titre original : Get Rich or Die Tryin’
Réalisation : Jim Sheridan
Scénario : Terence Winter
Producteurs : Jimmy Iovine, Paul Rosenberg, Chris Lighty, Jim Sheridan
Photographie : Declan Quinn, ASC
Décors : Mark Geraghty
Costumes : Francine Jamison-Tanchuck
Musique : Quincy Jones, Gavin Friday & Maurice Seezer
Montage : Conrad Buff, A.C.E., Roger Barton
Production : Paramount Pictures, Interscope-Shady-Aftermath Films et MTV Films
Distribution : United International Pictures (Paris)
Publicité : Agence Lumière (Paris)
Presse : Sylvie Forestier & Anne Crozat (Paris)
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UIP France