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Oubliés (Les) (T1)
Nokuto Koike
Komikku éditions

1947, Nagumo tente de rassurer la petite fille qu’il ramène auprès des siens. Mitsu est la fille d’un camarade de combat du jeune homme. Nagumo n’était pas vraiment un foudre de guerre, bien au contraire, il s’est battu pour son pays par obligation et a survécu par miracle sur la ligne de front contre les Russes. Mais Kifune, quant à lui, a pris la balle de trop et avant de mourir, il lui a fait promettre de ramener Mitsu auprès de ses parents maternels. La mère de la petite fille est originaire de l’île d’Iwazu, et c’est par le plus grand des hasards que Kifune accosta sur l’île pour repartir avec une des femmes. Aujourd’hui, Nagumo va honorer sa promesse, mais il ne s’attendait pas à devoir quitter le navire en pleine mer en compagnie d’un curieux agent de l’empire. En fait, l’île d’Iwazu n’est pas sensée exister, elle a été rayée des cartes officielles depuis bien des années alors aucun navire ne la dessert. C’est un local qui vient les chercher en barque. Quels mystères cache donc cette île oubliée de tous ?



Le trio est accueilli par Hitoshi Imamura. Ce dernier devait faire un état des lieux des habitants, des bâtiments et de la topographie générale de l’île. Difficile de se baser uniquement sur des textes ayant plus de cent ans. Mais quand Hitoshi recherche le nom de famille de la petite Mitsu dans sa liste des villageois présents sur l’île, il ne trouve personne. Kifune se serait-il moqué de son ami ? Nagumo ne peut croire qu’un homme sur le point de mourir ait pu inventer une telle histoire. Et le premier contact avec les femmes de l’île va lui confirmer sa première impression car elles vont savoir sans la moindre hésitation où se trouve la maison de la famille de Mitsu, dans une incroyable désinvolture. Car la vie sur cette île semble s’être non seulement figée dans le temps, mais tous vivent libres et égaux. Toutefois, la vie sur l’île cache des pratiques mystérieuses et la première que vont découvrir les trois japonais sera de garder leurs morts momifiés dans leur maison, continuant à leur apporter à manger comme s’ils étaient encore parmi eux. C’est ainsi qu’ils découvrirent la famille de Mitsu ou ce qu’il en restait.

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Nokuto Koike aime les atmosphères glauques, malsaines. Nous l’avions découvert avec 6000, son thriller horrifique sous-marin. Avec “Les Oubliés”, il garde une ambiance tendue mais avec un contexte très différent. D’abord par l’époque, après le monde futuriste de 6000, le mangaka nous emmène dans l’après Seconde guerre mondiale. Il nous entraine à la suite de Nagumo, l’anti-héros par excellence. Médiocre sodat, il tente de se rattraper en étant un meilleur ami pour un défunt camarade. Comme antithèse de Nagumo, Nokuto Koike l’associe à Serizawa, le parfait zélé fonctionnaire au service de l’empire, qui regarde avec dédain ce pleutre devant l’accompagner sur la mystérieuse île d’Iwazu. Cette île qui a disparu des cartes ne se retrouvera pas non plus dans vos atlas. Le mangaka a créé de toute pièce cette ile où la civilisation semble s’être arrêtée au moyen-age. Mais surtout, l’ambiance locale est très étrange.

On sent rapidement que l’histoire se rapproche peu à peu d’un policier en une sorte de huis clos. Pourtant, la population semble très amicale, trop car ne dit on pas, trop gentil pour être honnête ? Nokuto Koike a repris ce diction à son compte et l’applique consciencieusement en nous montrant que ces gentils habitants possèdent des coutumes étranges pour ne pas dire malsaines. Entre les morts qui sont momifiés dans une activité de tous les jours et les femmes se donnant au premier étranger venu, on comprend mieux comment Kifune a pu fuir avec une villageoise. Peu à peu, le manga tourne du thriller au survival, avec les premiers cadavres apparaissant sur l’île. Le bilan est alors très simple : trois Japonais de l’empire se retrouvant parmi des îliens aux mœurs loin d’être aussi inoffensives qu’il n’y parait. La transition est parfaitement amenée et Nokuto Koike tient son lecteur de la première à la dernière page, ne lui laissant à aucun moment entrevoir ce qu’il a en tête. Le mystère reste complet sur les intentions scénaristiques du mangaka, pour notre plus grand plaisir car quoi de mieux que d’être surpris par un scénario même si la dernière page vous laisse sur la frustration de voir la fin arriver trop vite.

Si le lecteur est rapidement accroché par l’histoire, c’est aussi grace au talent de dessinateur du mangaka. D’un autre côté, après avoir lu 6000, est-ce vraiment une surprise ? Il faut tout de même avouer que la couverture ne met pas vraiment en avant le talent de Nokuto Koike, surchargée de couleurs qui en font presque passer inaperçues les taches sanguinolentes qui devraient orienter le lecteur potentiel, comme un clin d’œil pour lui rappeler que l’univers du mangaka n’est pas celui des bisounours, bien au contraire. Heureusement, le mangaka installe rapidement sont ambiance visuelle, mêlant à la fois le côté paisible de la nature (quoique la pleine mer n’est jamais vraiment rassurante, surtout les grands fonds) et la perversion humaine. Un grand classique mais qui marche encore mieux avec des dessins réalistes, qui présentent l’horreur le plus simplement du monde, comme si cela ne devait surprendre personne.

Lire “Les Oubliés” est une excellente façon de commencer l’année 2016.


Les Oubliés (T1)
- Auteur : Nokuto Koike
- Traducteur  : Thibaud Desbief
- Éditeur français : Komikku éditions
- Format : 13 x 18 cm
- Pagination  : 224 pages
- Date de parution : 19 novembre 2015
- Numéro IBSN : 978-2372870634
- Prix : 7,90 €


MITSU NO SHIMA © Nokuto Koike / Kodansha Ltd.
© Komikku éditions- Tous droits réservés



Frédéric Leray
5 janvier 2016




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