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Lune et l’Ombre, tome 1 : Fuir Malco
Charlotte Bousquet
Gulf Stream, roman (France), fantastique, 207 pages, janvier 2014, 13,90€

Lune, 13 ans, subit plus que son lot de malheur. Depuis quelques temps, elle ne voit plus les couleurs. Sa vie va du blanc au noir en passant par tous les gris. Autre invasion de la noirceur, sa mère s’est trouvé un nouveau compagnon, Malco, qui jour après jour se fait plus possessif et violent.
Un jour, sur un prospectus pour une expo parisienne, les couleurs lui explosent à la figure. Il faut qu’elle aille au musée, pour peut-être comprendre, et guérir. Mais véto de Malco sur cette sortie parisienne. Lune fugue et part seule à Paris. Sur tout le chemin, elle croit être poursuivi par Malco. Impossible ?
Après quelques difficultés, elle arrive enfin au musée. Malco l’attend.
Et là, tout bascule... dans un tableau.



« Fuir Malco » commence comme un roman social, dépeignant le difficile quotidien d’une mère célibataire et de sa fille affligée d’un mal que les médecins ne savent expliquer. Mais la vie continue, comme-ci comme-ça, malgré les difficultés. L’arrivée de Malco va bien sûr bouleverser la complicité mère-fille et introduire un nouveau rapport de force dans la famille. Très vite, comme tout mâle violent, il s’impose et impose.

Le roman, raconté à la première personne du point de vue de Lune, donne bien sûr un avis biaisé, comme très souvent lorsqu’un parent retrouve un compagnon. Mais très vite, on ne peut plus supposer que Lune est paranoïaque ou extrêmement jalouse : Malco, en sus d’être d’un homme déplaisant, écrivain raté obligé d’exercer un boulot alimentaire physique, s’avère sournois et méchant. Voire plus encore.

Et c’est un peu avant la moitié de ce premier tome que ce qui pouvait passer pour des hallucinations se révèle bien réel : Malco commence aux ombres, lâche aux trousses de Lune des créatures de ténèbres, chiens, corbeaux... Plus que jamais, l’obscurité est synonyme de danger pour la petit blonde.
Heureusement, la pré-ado est déterminée. Et la peur est un moteur puissant, qui la pousse tout le long à puiser dans des réserves qu’elle ne se connaissait pas.
Là voilà donc qui bascule dans “Le Marché aux chevaux”, un tableau de Rosa Bonheur.

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Rosa Bonheur - Le Marché aux Chevaux

Là, elle rencontrera Léo, un garçon de ferme qui la soutiendra, même lorsqu’elle lui révèlera d’où elle vient. Hélas, le calme propice à une idylle durera peu, car Malco la retrouve. Les deux jeunes fuient... vers d’autres toiles.

Le concept du plongeon dans un tableau est très intéressant. Mais, comme toute l’histoire, comme on s’en rend compte, tourne autour des tableaux de cette exposition (« Femmes peintres, XIXe-XXe »), on ressent cruellement leur absence à la lecture du roman. Comme c’est la seule chose que Lune voit en couleur, je comprends qu’il aurait été contre-productif de les reproduire en noir et blanc. Mais cela aurait été un début. Ou une galerie virtuelle, accessible via QR code... Une manière de relier le jeune lecteur avec son smartphone, la peinture et le livre.

On interrompra donc sa lecture pour satisfaire sa curiosité picturale, recherche facilité par la liste complète des œuvres en fin d’ouvrage. Ou on fera sans, comme au bon vieux temps d’avant, en laissant faire son imagination.

Si on apprécie que Charlotte Bousquet, féministe militante, fasse preuve de relative modération sur ce sujet, malgré une entame sociale forte et des artistes exclusivement féminines, j’ai davantage achoppé sur le vocabulaire employé par Lune, ainsi que ses connaissances et sa maturité sur certains sujets, un peu au-dessus de ce à quoi on s’attend pour le personnage. Mais il y a longtemps que j’ai eu 13 ans, et sans subir le quotidien de Lune.

L’intrigue va tambour battant, et les 200 petites pages défilent à toute allure. Lune est une fuyarde, et passe son temps à regarder par-dessus son épaule. Hélas pour elle, une fois sur deux, c’est pour y trouver l’objet incarné de ses craintes, Malco ou l’une de ses bêtes d’ombres. Cela pousse notre héroïne et son compagnon plus loin dans la toile. On ne saura pas si cet univers né sous un pinceau a des frontières géographiques (les personnages s’enfonçant assez loin), mais c’est via Léo qu’on touche aux limites : le garçon a une personnalité, mais très peu de souvenirs. Sa sortie de la toile sera donc l’occasion de s’interroger sur son humanité (et ce qui fonde cette dernière).

L’auteure a le mérite de livrer une partie de la clé du mystère du pouvoir de Lune à la fin de ce premier tome, ne nous laissant pas sur notre faim, l’attisant, au contraire. Ce sera dans « Forger le lien ».


Titre : Fuir Malco
Série : Lune et L’Ombre, tome 1/3
Auteur : Charlotte Bousquet
Couverture : (non crédité) Mélanie Delon
Éditeur : Gulf Stream
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 207
Format (en cm) : 18 x 14 x 1,8
Dépôt légal : janvier 2014
ISBN : 9782354882099
Prix : 13,90 €


Lune et l’Ombre
1 - Fuir Malco
2 - Forger le lien
3 - Briser le sort


Nicolas Soffray
2 décembre 2015


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