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Macadam
Jean-Paul Didierlaurent
Au Diable Vauvert, nouvelles, 159 pages, septembre 2015, 15€

Avant de conquérir un grand nombre de lecteurs avec « Le Liseur du 6 h 27 » Jean-Paul Didierlaurent a longuement pratiqué la nouvelle, faisant ici et là une belle moisson de distinctions : prix Henri-Thomas de Saint-Dié des Vosges 1997, prix de la nouvelle inédite de la ville du Mans 1998, prix de la ville de Dieppe 2000, deuxième prix de la ville de Tulle 2000, prix Bérenger-Frédol 2001, prix de la société littéraire de La Poste et France télécom 2004, prix Hemingway 2010 et 2012. Ce sont ces nouvelles primées et quelques autres que l’on trouve regroupées sous le titre de l’une d’entre elles, « Macadam ».



Avec “In nomine Tetris” , plus un texte savoureux qu’une véritable histoire – car le lecteur, qui n’aura pas manqué de lire la quatrième de couverture, aura deviné dès le titre quel est le penchant secret du confesseur – Jean-Paul Didierlaurent donne le ton du recueil : un ton très juste qui, oscillant entre tendresse et ironie, entre empathie et férocité, ne peut manquer de réjouir le lecteur.

Seconde nouvelle, “Macadam” apparaît, en une douzaine de pages, inspirée par la célèbre « Pitié dangereuse » de Stefan Zweig. Mais un malentendu n’est pas toujours absolument dramatique. Une belle idée, très humaine, et, tout en légèreté, un ton très juste.

Le ton, certes, mais aussi le « la », car avec “Mosquito” , autre jolie réussite, Jean-Paul Didierlaurent s’intéresse cette fois à un musicien. Quel peut bien être le lien entre une première trompette et la mort de l’Ange de Séville, toréador de génie terrassé par la bête qui aurait dû être sa victime ? Vingt pages au long desquelles le narrateur court et réfléchit beaucoup, et ne laisse au lecteur pas d’autre choix que de se précipiter à sa suite, pour une fin toute en ironie grinçante.

En à peine huit pages, “Le Jardin des étoiles” traite de l’enfance, de la mort, de l’espoir. Émouvante, poétique, surprenante, une magnifique nouvelle, lumineuse et achevée, qui pourrait avoir été écrite par Ray Bradbury lui-même. On pourrait en dire autant de “Shrapnel” fable fantastique et poétique, la vie et la mort d’un soldat polonais rescapé de la Seconde Guerre mondiale.

Tout comme “Le Jardin des étoiles”, “Sanctuaire”, où l’on retrouve le toréador de “Mosquito” générera des échos dans « Le Liseur du 6 h 27 » . On pourrait croire, en y retrouvant cette dame-pipi penchée sur son traitement de texte, que l’auteur s’est contenté de cannibaliser sa propre nouvelle pour nourrir son roman. Il n’en est rien, et la thématique développée à partir du même point de départ apparaît totalement différente et tout autant inattendue. Une jolie surprise, donc, pour ceux qui ont déjà lu le premier roman de l’auteur.

Si les nouvelles de Jean-Paul Didierlaurent sont souvent lumineuses, il ne s’interdit cependant pas une certaine noirceur. Ainsi met-il côte à côte anges et démons, et plus particulièrement ceux qui sont en l’homme, avec “Rose sparadrap”, une nouvelle en retenue, en non-dit, dont la légèreté feinte ne cache pas longtemps la perfection glaçante. “Le Vieux”, sorte de quête graphologique du mal, peut également faire frémir. “Brume” également quoique ce texte soit tempéré par une certaine dose d’humour. “Menu à la carte” n’est pas en reste avec un aspect sinistre plus marqué encore.

En tout juste onze nouvelles, en à peine cent cinquante pages, Jean-Paul Didierlaurent fait donc une belle démonstration de son talent de nouvelliste. Même si le lecteur chevronné pourra sentir la fin venir dans deux ou trois de ces onze récits (notamment “Rose sparadrap” et “Brume”), le plaisir est intact, car l’art de ces nouvelles ne réside pas seulement dans la chute. Récits humains, récits poétiques ou contes noirs, ces onze nouvelles balaient un bel éventail de personnages (un musicien, un prêtre, un toréador, une dame-pipi, le pensionnaire d’une maison de retraite, une petite fille, une caissière d’autoroute, un enfant, un soldat, un graphologue) et des situations toujours différentes. On recommandera donc ce petit recueil de nouvelles, court et vite lu, mais dans lequel on n’hésitera pas à se replonger avec plaisir.


Titre : Macadam
Auteur : Jean-Paul Didierlaurent
Couverture : Didier Fontvielle /offparis.fr
Éditeur : Au Diable Vauvert
Pages : 159
Format (en cm) : 13 x 20
Dépôt légal : septembre 2015
ISBN : 9782846269636
Prix : 15 €



Jean-Paul Didierlaurent sur la Yozone :
- « Le Liseur du 6 h 27 »


Hilaire Alrune
3 octobre 2015


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