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American Psycho
Film américain de Marry Harron (2000)
7 juin 2000


Genre : Psycho killer
Durée : 1h35

Avec Christian Bale (Patrick Bateman), Willem Dafoe (Détective Donald Kimball), Jared Leto (Paul Allen), Reese Witherspoon (Evelyn Williams), Samantha Mathis (Courtney Rawlinson), Chloë Sevigny (Jean), Josh Lucas (Craig McDermott), Guinevere Turner (Elisabeth), Matt Ross (Luis Carruthers), Bill Sage (David Van Patten), Cara Seymour (Christie), Park Bench (Stash), Catherine Back (Vanden), Justin Theroux (Timothy Bryce), Stephen Bogaert (Harold Carnes), Monika Meier (Daisy) , Reg E. Cathey (le sans-abri)

Patrick Bateman, pur produit de la réussite américaine, jeune et riche golden boy triomphant de Wall Street, se métamorphose, au cours de ses virées nocturnes, tel un Dr Jekill & Mister Hyde moderne, en un terrible et incontrôlable tueur en série.
Evénement cinématographique du moment, tant cette adaptation du best-seller de Bret Easton Ellis était attendue depuis fort longtemps, American Psycho débarque finalement sur les écrans des salles obscures françaises. Il faut dire que le roman homonyme avait défrayé la chronique, outre-atlantique, lors de sa publication en 1991, tant pour la crudité détaillée de ses propos décrivant violence et sexualité, que pour la critique acerbe et impitoyable d’une certaine culture américaine, dont les jeunes loups financiers de la place de New York étaient les héros.

C’est Mary Harron (« I shot Andy Warhol ») qui met en scène, tout en co-signant le scénario avec Guinevere Turner, cette périlleuse transposition, souvent considérée comme irréalisable par les lecteurs du roman. Ayant, pour ma part, fait l’impasse sur le bouquin, je me garderai de toute comparaison pour me focaliser essentiellement sur l’objet cinématographique.
Devenu personnage mythique au cinéma, le tueur en série nous a été présenté de différentes manières depuis le célèbre « M, le maudit » de Fritz Lang. Après l’avoir observé grâce aux yeux de ses traqueurs, et autres profilers, des récits de Thomas Harris (« 6ème sens », « le silence des agneaux » et le « Hannibal » de Ridley Scott à venir), suivi le parcours, au combien glauque et amoral, des exploits meurtriers de Henry Lee Lucas (« Henry, portrait of a serial killer »), plongé en apnée dans la folie machiavélique de « Seven » ou de « Copycat », la réalisatrice choisit, cette fois, de nous projeter directement dans l’esprit tordu du tueur psychotique. Mais plutôt que de nous présenter un « serial killer » ensanglanté d’ultra violence, Mary Harron décide, évitant ainsi à son film d’être (américainement parlant) classé X, d’en extraire l’essence sarcastique, en une satire acerbe et débridée de la génération Wall Street de la fin des années 80.
Dès l’introduction, la voix-off de Patrick Bateman nous présente l’interminable préparation quotidienne lui permettant d’endosser sa panoplie de parfait golden boy. Tout y passe, de la marque du savon, à celle de la crème épilatoire ou du masque hydratant, la nécessaire séance de culture physique, jusqu’au plus petit détail de sa tenue vestimentaire. Car c’est avant tout sur les apparences, le paraître, que repose le fondement de son existence. La perfection se mérite, Patrick Bateman le sait et fait tout son possible pour l’incarner.
Mais, à trop vouloir se fondre dans l’image et le mode de vie superficiel des yuppies désœuvrés de Wall Street, dont les objectifs existentiels se concentrent essentiellement sur l’accès aux meilleures tables des grands restaurants, le port des costumes les plus chics, et le prestige de leurs lieux de résidences, Bateman finit par perdre ses repères, le sens des réalités, pour mieux y noyer sa propre identité.
Dans un premier temps, le monstre qui l’habite s’en prend aux laissés-pour-compte de la société - clochards, prostituées - qui entachent sa conception de la perfection, mais la satisfaction de ces passages à l’acte l’amène, finalement, à se débarrasser de ceux qui, pour de dérisoires raisons, lui font involontairement de l’ombre - à l’image du vainqueur de ce savoureux concours de déballage de cartes de visite. Il ira même jusqu’à tuer et usurper l’identité de ce lointain collègue, Paul Allen, que malheureusement on a trop souvent tendance à confondre avec lui.

Mary Harron prend le parti de la comédie noire, même très noire. Elle évite de nous abreuver de scènes sanguinolentes (et pourtant il y avait substance), préférant se focaliser sur les psychoses de son personnage et ses réactions face à son environnement aseptisé, et nous propose, en lieu et place de meurtres à haute teneur sanguine, des tableaux jubilatoires, au comique décalé, pour mettre en scène ses odieux méfaits. Et il est vrai que les grands monologues du tueur proposant une analyse, toute personnelle, de la culture musicale populaire américaine sont d’une fabuleuse crétinerie, et l’on arrive à se demander comment ce garçon, plutôt intelligent au demeurant, peut croire et déclamer de telles inepties. En ce sens la scène de l’exécution, à la hache s’il vous plait, dans laquelle il protége sa personne, enfin son costume, d’un imperméable, non sans avoir, au préalable, recouvert le sol de vieux journaux, est un petit régal qui rivalise avec celle de l’orgie sexuelle, dont les ébats filmés en vidéo, nous présente un Bateman fier d’exhiber sa musculature, dont il profite en tant réel grâce à la complicité d’un miroir.

Puis, soudain exit l’humour omniprésent, à l’image de la folie de son héros, le film de Mary Harron s’emballe. Après un bref et surprenant remake de « Massacre à la tronçonneuse » dans les escaliers d’un immeuble high-standing, contexte totalement improbable, la réalité vacille. La peur finit par prendre le dessus sur les certitudes du tueur qui prend soudain conscience de son état, de la monstruosité de ses actes et, plutôt que de poursuivre cette frénétique course en avant, il tente désespérément de trouver une issue, une échappatoire à cette spirale de démence qui l’aspire irrésistiblement dans le vide d’un puits sans fond.

Je dois vous avouer qu’à la sortie de la salle de projection, mes impressions étaient beaucoup plus mitigées. Peut-être surpris et déçu de ne pas avoir assisté à un véritable « serial killer » psychologique et haletant. Mais à l’inverse de certaines réalisations du moment, plus clinquantes mais aux souvenirs trop éphémères, American Psycho gagne au contraire avec le recul.

Tout d’abord l’interprétation de Christian Bale, cet acteur gallois qui ne faisait pas l’unanimité avant sa prestation, campe un Patrick Bateman en total décalage avec la monstruosité de son rôle. Décalage que l’on retrouve également dans la construction de la mise en scène de Mary Harron qui fausse perpétuellement les distances et les pistes entre le réel et la schizophrénie de son personnage, se jouant ainsi des spectateurs - car, dans un univers bâti sur les apparences c’est la réalité qui peut être masquée - pour ne dévoiler sa vérité que dans la conclusion du film.
Pour habillé l’atmosphère sonore de son récit, la réalisatrice, après « I Shot Andy Warhol », fait de nouveau appel à John Cale pour composer la musique originale. Il faut dire que Mary Harron, qui est issue de la Presse Rock, connaît bien le personnage et le musicien gallois, membre fondateur avec Lou Reed du Velvet Underground.
Quant aux férus de mode, ils pourront aisément reconnaître, dans le style des costumes, la griffe Cerruti.

Bruno Paul
Imagivore 11 : Les Imaginautes

FICHE TECHNIQUE

Titre original : American Psycho

Réalisation : Mary Harron
Scénario : Mary Harron et Guinevere Turner d’après le roman de Bret Easton Ellis

Producteurs : Edawrd R. Pressman, Chris Hanley, Christiaan Halsey Solomon
Coproducteurs : Ernie Barbarech, Clifford Streit, Joseph Drake
Producteurs exécutifs : Michael Paseornek, Jeff Sackman, Joe Drake

Musique originale : John Cale
Supervision musicale : Randall Poster
Photographie : Andrzej Sekula
Montage : Andrew Marcus
Casting : Billy Hopkins, Suzanne Smith, Kerry Barden
Décors : Gideon Ponte
Direction artistique : Andrew Stearn
Costumes : Isis Mussenden

Production : Lions Gate Films & Edward R. Pressman Film Corp.
Distribution : Metropolitan Filmexport


Bruno Paul
1er juin 2000



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