La poursuite d’une fresque ambitieuse
La guerre contre les Primiens fait rage. Ceux-ci, après avoir investi de nombreuses planètes humaines pour les utiliser en tant que bases, en attaquent simultanément des dizaines d’autres, non pas dans un but de conquête, mais cette fois-ci d’extermination. Ils ont mis au point une arme terrifiante qui, lancée dans les étoiles autour desquelles orbitent les mondes peuplés par les humains, vont y déclencher de terrifiantes tempêtes de particules capables d’y anéantir toute forme de vie.
Si la Marine, grâce à la mise au point de bombes de type quantique, parvient à neutraliser partiellement ces cataclysmes radioactifs, des dizaines de planètes sont promises à une mort certaine. Ce sont donc des dizaines de milliards d’hommes qu’il faudrait évacuer, vers d’autres planètes du Commonwealth incapables de les accueillir. La terraformation et l’équipement de nouvelles planètes d’accueil prendront de nombreuses années. Une crise majeure menace.
Mais Nigel Sheldon, co-inventeur avec Ozzie Fernandez Isaacs de la technologie des trous de ver, accumule les prodiges. Il modifie les portails pour que ceux-ci mènent à d’autres planètes, mais dix années dans le futur : ainsi les dizaines de milliards de personnes évacuées trouveront-elles un asile. De plus, il met au point un missile dont les effets sont au-delà de la nova, un missile susceptible de débarrasser l’espace de l’engeance primienne en rayant leurs systèmes solaires de la galaxie. Mais l’humanité peut-elle se résoudre à commettre un tel génocide ?
La convergence des intrigues et des personnages
Dans le même temps, Peter F. Hamilton décrit, en un contrepied métaphysique et poétique aux guerres high-tech qui se déroulent à travers le Commonwealth, la fin de l’étrange quête d’Ozzie Fernandez Isaacs sur les chemins des Silfens, qui permettent de passer d’un monde à un autre. Mais Ozzie et ses compagnons, avant de retrouver la direction du Commonwealth, apprendront auprès des Silfens bien des éléments tragiques : non seulement la guerre interplanétaire dont ils n’avaient nulle idée, mais aussi le fait que l’espèce bâtisseuse de gigantesques artefacts nommés sphères de Dyson, qui avaient autrefois enfermé les primiens dans leur galaxie, a évolué vers un stade immatériel et n’interviendra pas pour rétablir cette barrière.
Le retour d’Ozzie sur les planètes humaines participe pleinement à la convergence finale du cycle de Pandore. Dans ce volume, les fils patiemment tissés par Peter F. Hamilton convergent, les intrigues fusionnent, les personnages se rejoignent. Si Ozzie ne tarde pas à dérober un vaisseau spatial pour s’en aller seul tenter de rétablir la sphère de Dyson, pourchassé par son ami de toujours Nigel Sheldon, le co-inventeur des trous de ver, bien décidé cette fois à le tuer et à commettre ce génocide qui sauvera l’espèce humaine, la totalité des autres personnages clefs, que ce soit les troupes d’intervention de la Marine, l’enquêtrice Paula Myo, les Gardiens de l’Individualité et l’Arpenteur lui-même, se retrouvent sur la planète Far Away. Car l’humanité est menacée également par cet Arpenteur que nul n’a jamais vu mais en lequel tous commencent à croire, un autre type d’extra-terrestre qui depuis bien longtemps influe secrètement sur le cours de l’humanité pour la mener à sa perte.
La bataille se livre donc sur trois terrains distincts : le front spatial, contre les Primiens, le chemin de la planète Far Away, où il faut à tout prix empêcher l’Arpenteur de regagner son vaisseau, et enfin la recherche de l’ennemi intérieur, car les équipes humaines sont infiltrées par des agents de l’Arpenteur, en place depuis si longtemps que nul ne saurait les distinguer des humains les plus fiables.
S’engage pour finir une folle course-poursuite sur une autoroute longue de plusieurs milliers de kilomètres, une autoroute inachevée qui ne mène nulle part, sinon au vaisseau de l’Arpenteur et à la fin possible de l’humanité. Le space-opera révèle alors pleinement sa nature héritée du western : ce ne sont qu’affrontements, chausse–trappes et sabotages, batailles rangées – le tout avec la puissance de feu totalement démesurée qu’offre aux protagonistes la technologie du futur. Et peu importe, finalement, que l’on se situe ou non dans un univers vaste d’une vingtaine d’années-lumière – tout, où presque, se terminera, comme il se doit, en un ultime face-à-face.
Un space-opera qui tient ses promesses
Même si la nature véritable de l’Arpenteur représente une réelle surprise, Peter F. Hamilton ne cherche pas, dans ce volume, à accumuler de manière artificielle les renversements de situation ou les coups de théâtre. Avec une grande continuité de ton et une entière cohérence, il poursuit méthodiquement le développement des univers et intrigues mis en place au fil des trois premiers tomes. Mais, même si « Judas démasqué » ne crée pas la rupture, même s’il n’accumule pas les révélations stupéfiantes, ce volume enchaine suffisamment de péripéties pour maintenir l’intérêt, tout en apportant des éclaircissements et des éclairages inattendus. C’est ainsi, par exemple, que si les destins des personnages trouvent en toute logique leur aboutissement, l’on en apprend bien plus sur leurs motivations ou sur leur passé que ce que l’on aurait pu deviner.
La tétralogie de Pandore s’achève donc avec ce volume qui clôt une aventure dépassant les deux mille neuf cents pages. On savait, par ses opus précédents, que Peter F. Hamilton était un créateur d’univers au-dessus du lot, et que le soin apporté à la construction de ses mondes et à leurs détails – qu’ils soient humains, technologiques ou géographiques – lui permettait d’écrire des œuvres d’envergure. Sans atteindre la démesure de son cycle « L’Aube de la Nuit », l’auteur confirme ici son talent. Compte tenu du classicisme de l’œuvre et de l’absence d’éléments fondamentalement novateurs, il serait exagéré d’écrire que la tétralogie de Pandore se hisse au niveau des cycles majeurs de la science-fiction. Mais force est d’avouer que l’on trouve bien peu de space-operas de cette tenue, et que Peter F. Hamilton rend pleinement honneur au genre dans lequel il a choisi de s’inscrire.
Titre : Judas démasqué (Judas Unchained, 2005)
Auteur : Peter F. Hamilton
Série : L’Etoile de Pandore, tome 4
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Nenad Savic
Couverture : Manchu
Éditeur : Milady (édition originale : Bragelonne
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 754
Format (en cm) : 11 x 17,9 x 3,9
Dépôt légal : janvier 2010
ISBN : 9782811201609
Prix : 9 €
Peter F. Hamilton sur la Yozone :
La tétralogie de Pandore
tome I « Pandore Abusée »
tome II « Pandore menacée »
tome III « Judas déchaîné »
La trilogie du vide
tome I « Vide qui songe »
tome III« Vide en évolution »
La trilogie Greg Mandel
tome I « Mindstar »
tome II « Quantum »
tome III « Nano »
Un volume de nouvelles
Manhattan à l’envers
La grande route du Nord
« La grande route du Nord », tome I