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Pandemonium Follies
Jean-Pierre Favard
La Clef d’Argent, KholekTh, nouvelles (France), fantastique, 214 pages, mars 2014, 12€

L’apocalypse, l’utopie punk, la magie, l’ombre en chacun de nous, la peur... et un zeste d’humour, noir bien sûr. Tel est le cocktail concocté par Jean-Pierre Favard dans ce nouveau recueil.



Je ne me hasarderai pas à chercher un fil conducteur, tant l’auteur se plaît à chasser sur tous les terrains, avec l’aisance qu’on lui connaît désormais, après « Belle est la Bête », son précédent recueil à La Clef d’Argent.
L’écuyer” nous place dans une relation maître-apprenti, le héros buvant goulûment le récit sans cesse répété des exploits passés de son mentor, jusqu’à ce que vienne enfin l’heure de repartir sur les routes. Un côté dark fantasy sur champ de ruines pas déplaisant.
Welcome to Punkland” nous emmène, au bras d’un reporter, dans une utopie punk installée dans une France du XXIe siècle qu’on devine, en creux, en proie à de violents démons réacs et fachos. La communauté punk, comme son guide s’évertue en peu de mots et beaucoup de jurons à le faire comprendre au journaliste, est libre, parce que personne ne veut du pouvoir et que tout le monde s’en fout. A la fois très documentée sur le mouvement, assez crue et fortement réaliste, la nouvelle dégage un violent vent de rébellion, assez agréable dans la sinistrose actuelle.
Le truc” prend un virage plus poétique, avec le souvenir d’une improbable rencontre entre un Européen en mission à Singapour et une jeune fille du coin. Récit d’une brève passion, de regrets. La chute, très SF, n’en est que plus surprenante et vertigineuse.
Un cadavre sur les bras” est un pur hommage au film noir, à Bogart et aux détectives qui croyant tirer le gros lot d’un boulot pépère et bien payé se retrouvent les deux pieds dans la m... Notre narrateur aide un « ami » à se débarrasser d’un corps, mais cela nécessite quelques services, et il réalise que la victime est une ancienne « affaire » à lui. Effacer les traces ou faire retomber la faute sur un autre devient dès lors bien plus urgent. C’est pas de l’Audiard mais pas loin, sur le fond comme la forme. Et on en redemande.
Witch Inc.” se la joue thriller, avec une mystérieuse réunion de trois hommes dans un inquiétant manoir. Leur séduisante hôtesse ne tarde guère à les hypnotiser, et leur passé resurgit, et le lien qui les unit apparaît. L’intrigue se met en place lentement, révélant peu à peu, en fugitifs éclats, les faits marquants dans la vie de chacun, en nous laissant le temps de recoller les pièces du puzzle avant la révélation finale... et le châtiment.
Camping sauvage” reprend le grand classique de l’histoire contée autour du feu de camp par le vieux du coin à une bande de jeunes adultes. Une vieille affaire de bûcherons, d’un soi-disant monstre dans le lac... Une horror story qui m’a rappelé, par son ambiance, “l’Eveil”, de Jérôme Sorre, parue dans « Cellules », chez le même éditeur. Mais les ressorts diffèrent, et la fin plus encore. Jean-Pierre Favard préfère la pirouette humoristique, et on appréciera fortement, un grand sourire sur le visage.
Désolation” reprend les personnages de Joshua et du Korrigan, le bras armé de la loi royale, venus enquêter sur une révolte paysanne. On est en pleine dark fantasy, pas très loin des histoires de pistoleros de La Tour Sombre de Stephen King ou des romans de Robert Howard : un soleil qui ne semble jamais se lever, des forces obscures, la force brutale comme principale application de la loi.
Le petit livre noir” oscille entre régionalisme et étude. Le narrateur met la main sur un journal de pirate dans une brocante, et passionné il se lance dans de profondes recherches sur cet homme, né à quelques villages de là quatre siècle plus tôt, et son univers. De fait véritable mine de détails sur la marine pirate du XVIIe, récit aux accents de chasse au trésor, c’est avant tout un hommage aux écrivains et à la puissance de partage de l’imagination.
11 août 1999”, en référence à l’éclipse et la fameuse fin du monde attendue par certain grand couturier, explore le thème survivalist dans un Paris envahi de zombies. Le narrateur, parti à la recherche de son épouse (qui croit en Paco Rabanne), va rencontrer divers monstres mutants, redécouvrir que le mal est enraciné en l’homme, y compris en lui-même. En une trentaine de pages, Favard concurrence allègrement « The Walking Dead ».
Enfin, “Mal barré (au jour du jugement dernier)”, au rythme des sept péchés capitaux, décrit une matinée bien commencée et mal finie d’un glandeur-loser. Très maitrisée, elle est rendue encore meilleure par sa chute, certes attendue, mais qui arrachera sans mal un rire narquois de notre gorge.

Agglomérat de de part obscure , d’une noirceur que la couverture de Sébastien Hayez laisse présager, « Pandemonium Follies » est un spectacle sombre et magnétique.


Titre : Pandemonium Follies
Auteur : Jean-Pierre Favard
Nouvelles :
- L’écuyer
- Welcome to Punkland
- Le truc
- Un cadavre sur les bras
- Witch Inc.
- Camping sauvage
- Désolation
- Le petit livre noir
- 11 août 1999
- Mal barré (au jour du jugement dernier)
Couverture : Sébastien Hayez
Éditeur : La Clef d’Argent
Collection : KholekTh
Site Internet : page roman (site éditeur), page Facebook du livre
Numéro : 26
Pages : 214
Format (en cm) : 17,5 x 11 x 2
Dépôt légal : mars 2014
ISBN : 9791090662209
Prix : 12 €



Nicolas Soffray
27 mars 2014


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