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Galaxies n°25 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°25, SF - nouvelles - articles – critiques - entretien, septembre 2013, 192 pages, 11€

La présentation de cette couverture particulièrement réussie rappellera immanquablement des souvenirs aux plus anciens lecteurs ou à ceux qui aiment chiner dans les librairies d’occases. En effet, il s’agit d’un beau clin d’œil aux premières séries de « Galaxie », version française du « Galaxy » américain d’Horace Gold.
Hugo van Gaert (Pierre Gévart donc !) nous retrace l’histoire de cette revue dont le « Galaxies » actuel en est la quatrième incarnation.



Le dossier de ce numéro est consacré à Pierre Stolze, un écrivain que l’on a l’habitude de retrouver dans « Bifrost », où il anime “À la chandelle de maître Doc’Stolze”. L’entretien fleuve orchestré par Richard Comballot nous donne l’occasion de mieux connaître l’intéressé. Il apparaît vraiment sympathique, démontre qu’un écrivain doit se montrer patient et sa carrière est très bien retracée dans ce jeu de questions/réponses. Les œuvres de Pierre Stolze me semblent injustement méconnues, il n’a pas la notoriété qu’il mériterait, car souvent publié chez de petits éditeurs. Peut-être la faute d’écrits trop exigeants... comme il le dit justement dans l’interview. En tout cas, les lecteurs auront, après la dernière ligne lue, envie de découvrir plus avant l’imagination de Pierre Stolze.
La nouvelle “Taï chi chuan à Tchernobyl-sur-Moselle” confirme cette impression. Une catastrophe nucléaire, semblable à celle de Tchernobyl, a rebaptisé peu glorieusement Thionville. Une mission d’exploration se rend sur les lieux à fin d’études. Protégés des radiations et dans leurs exosquelettes, Rico et Chalmers se promènent dans la ville dévastée pour savoir pourquoi les drones envoyés disparaissent mystérieusement. L’endroit est pourtant censé être désert...
Pierre Stolze inscrit son récit dans une ville qu’il connaît, cela s’en ressent. “Taï chi chuan à Tchernobyl-sur-Moselle” se lit à toute vitesse, car elle est passionnante. Elle donne aussi un message d’espoir, offre de belles images comme cette séance de Taï chi chuan en-haut d’un immeuble. Obligés de remplir cette mission, Rico et Chalmers ne ressemblent pas à des anges, pourtant, ils sont bien plus humains que les scientifiques les accompagnant.
Et la conclusion est à la hauteur de cette très belle nouvelle.
Notons aussi que l’article “Projet équateur (bis)” signé de l’auteur et apportant des précisions sur sa carrière, ainsi qu’une bibliographie complètent le dossier.

Gulzar Joby, dont le prénom a été écorché sur la couverture, a écrit une agréable nouvelle illustrant le manque futur de fertilité, ce qui pousse dans le cas présent un riche couple à recourir à une mère porteuse. Si elle est bien traitée, c’est uniquement en raison du bébé à naître qui vaut bien plus que sa vie à elle.
Par contre, le dernier paragraphe de “L’enfant qui s’avance vers nous” m’a laissé perplexe. L’auteur a jugé bon de nous servir un effet final qui tombe à plat et qui nous laisse une impression négative, alors que la nouvelle ne le mérite pas. Il n’est jamais bon de trop vouloir en faire...

Avec “L’erreur”, Rosa Montero nous présente Alma, une jeune femme qui se voit refuser l’accès au Secteur Un. Elle a beau crier à l’injustice, il se cache derrière ce refus une explication.
Habile et donne froid dans le dos par certains côtés.

Une des pépites de ce numéro est à mettre au crédit de Ken Liu qui a remporté avec “Mono no aware”, le Prix Hugo 2013 de la nouvelle.
L’histoire se déroule sur deux périodes différentes. Un astéroïde doit entrer en collision avec la Terre. Un gigantesque plan de sauvetage a été mis en place, mais sera-t-il suffisant pour sauver tout le monde ?
Et quand l’habitat en route pour les étoiles est menacé, comment remédier au danger ?
On y suit Hiroto, le dernier Japonais, le dépositaire de toute une culture, ce qui rend le personnage d’autant plus touchant. Ce texte est superbement mené avec le passé et le présent suivis simultanément, la jeunesse d’Hiroto éclairant la situation actuelle. “Mono no aware” se révèle poignant et donne une belle leçon de dignité et de courage.

Aliette de Bodard, la Française écrivant en anglais, fait aussi très fort avec “Vaisseau-sœur”. Plus complexe que celle de Ken Liu facilement compréhensible, celle-ci est plus difficile d’accès. La mère des deux enfants s’adresse toujours à son fils (la première phrase est : « Tu n’as jamais aimé ta sœur. »), alors que sa fille est désignée à la troisième personne, comme si elle lui reniait un certain affect et gardait de la distance. Dès l’accouchement à lequel assiste le garçon, il n’accepte pas l’arrivée des sa sœur, surtout que le devoir l’en prive : elle devient en quelque sorte la conscience d’un vaisseau.
Comment vivre avec un enfant qui ne vieillit pas, qui n’est finalement qu’un vaisseau spatial, alors que celui en chair et en os la rejette avec force ? Déchirant cas de conscience pour une mère qui les a tous deux mis au monde...
Nouvelle exigeante, mais ô combien belle ! Elle laisse le lecteur pensif sur la situation et les sentiments décrits.

Ces deux nouvelles nous parlent de cultures différentes (japonaise et vietnamienne), évoquent l’importance de la famille et des liens qui s’y créent et sont toutes deux magnifiques. C’est avec joie que l’on apprend que ces deux auteurs seront à l’honneur dans un prochain « Galaxies ». À ne pas manquer !

Notons aussi que Philippe Ethuin nous invite à redécouvrir Noëlle Roger à qui l’ont doit notamment « Le Soleil enseveli » (1928) et que George Bormand nous remet en mémoire le cycle Diadème de Jo Clayton dont le début est paru en Galaxies/Bis.

Un excellent numéro de « Galaxies » avec un très bon dossier Pierre Stolze et les nouvelles de Ken Liu et Aliette de Bodard.


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 25 (67 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Couverture : Laurent Palmier
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens...
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : septembre 2013
ISSN : 1270-2382
Dimensions (en cm) : 13,8 x 20,9
Pages : 192
Prix : 11€



François Schnebelen
26 octobre 2013


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60 ans plus tôt : le premier Galaxie version française



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Numéro 1 du Galaxie, 2ème série, daté de Mai 1964



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Galaxies, troisième version, prenant un s au passage et daté de Juin 1996 pour ce numéro 1.



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Premier numéro du Galaxies Nouvelle série de Pierre Gévart (2008)



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