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Enclave - tome 1
Ann Aguirre
Hachette, Blackmoon, traduit de l’anglais (États-Unis), roman post-apocalyptique, 321 pages, juin 2013, 16€.

« Enclave » se veut appartenir au genre post-apocalyptique. Mais, si il remplit tous les critères de ce genre littéraire, Ann Aguirre utilise aussi toutes les ficelles du dystopique à l’œuvre à l’heure actuelle. Toutes les ficelles de la littérature adolescente d’ailleurs, au point de fondre un peu les genres car, finalement, le lecteur (ou plutôt la lectrice) va finir par avoir l’impression de lire toujours le même livre avec seulement le décor du fond qui change.



Imaginez : une jeune fille, bien sous tous rapports, qui ne rêve que de remplir son rôle au sein de la société, et ce quelles que soient les règles imposées par cette société. Puis arrive un homme, sombre, solitaire, écorché. A son corps défendant la jeune fille doit le côtoyer, se met à l’apprécier. Puis le jeune homme lui ouvre les yeux sur les dérives de leur société qu’ils finissent par fuir… ensemble.

Soyons honnêtes, je viens de vous résumer des séries comme « Divergent », « Delirium », ou « Promise », tous des dystopiques qui ont fait mouche ces dernières années, mais aussi, dans une moindre mesure, de « Never Sky », ou « Nina des Loups », des post-apocalyptiques jeunesse récents. Ce qui est étonnant, c’est que l’on tente de rapprocher cet ouvrage d’ « Hunger Games », avec lequel il a pourtant bien moins à voir. Mais il faut dire qu’« Hunger Games » a eu les honneurs du cinéma, lui.

Puisqu’on parle d’homogénéité, je continue. Je l’ai déjà dit, mais les couvertures Blackmoon commencent à sérieusement toutes se ressembler, et cela depuis « Journal d’un Vampire ».
Nous avons en général à faire à un visage, le plus souvent féminin, photographié de ¾ ou de face et placé sur le haut, voir le coin gauche. D’ailleurs, il faut aussi généralement admettre que les couvertures originelles sont bien plus esthétiques, et bien plus en rapport avec le thème de l’ouvrage. Que diable, Messieurs les éditeurs, un peu de créativité par pitié !

Le récit en lui-même est intéressant. Ann Aguirre s’est énormément documentée et cela se voit. Essentiellement sur la description de la vie souterraine d’ailleurs. Il est vrai que cette auteure, peu traduite en France, a déjà un grand nombre d’ouvrages à son actif. De la science-fiction, du post-apocalyptique, du steampunk noir également. Les ouvrages sombres semblent être son domaine, et cela se remarque particulièrement dans les scènes des tunnels, mais aussi dans les scènes d’action.

Pour en revenir au récit, une épidémie a décimé la population mondiale. Les plus riches ont été évacués des grandes villes (pour aller où ?) et les pauvres sont restés et ont survécu comme ils ont pu. Certains sont restés en surface, d’autres se sont terrés dans les souterrains tentaculaires des grandes villes.
Sous terre, ils ont créé des Enclaves, de petites sociétés plus ou moins hiérarchisées et organisées en castes : les Ouvriers qui fabriquent tout ce dont l’Enclave a besoin, les Géniteurs qui assurent une reproduction contrôlée et les Chasseurs qui fournissent l’Enclave en viande et la protègent des Monstres, sorte d’abominations vivant en bandes désorganisées et qui se nourrissent de tout ce qui passe à leur portée, y compris leurs congénères.
En général, ils sont faibles, affamés et stupides. Mais lorsque Trèfle obtient son prénom et devient Chasseuse, elle s’aperçoit que certains réfléchissent plus que d’autres. Avec son co-équipier, Del, elle commet des fautes et se voit envoyer à l’enclave la plus proche pour enquêter. Trois jours de marche dans les tunnels sombres infestés de Monstres. Aller-retour. A leur retour, ils tentent de mettre en garde les Aînés : les Monstres deviennent organisés, intelligents… dangereux.
Mais ils ne veulent rien entendre et feront ce qu’il faut pour exiler la jeune fille. Del, qui n’est pas né dans l’Enclave, décidera de la suivre, et ensemble ils vont se réfugier à la surface, pas si inhabitable que ce qu’il avait été raconté à Trèfle toute son enfance.

Pas inhabitable, mais dangereuse. Pas d’Enclave en surface mais des gangs, brutaux et sanguinaires ; et des Monstres forts, bien nourris et intelligents. Tout en récupérant quelques jeunes gens au passage, nos deux héros vont finalement trouver un havre de paix relatif, mais leur relation sera mise à mal par ce désenclavement.

Un « je t’aime – moi non plus » associé à un trio amoureux assez classique. Mais il semble que l’intrigue amoureuse ne soit pas l’élément central. En effet, Ann Aguirre est plus intriguée par les possibilités de survie en cas d’épidémie. Et si certains éléments peuvent paraître étranges, comme le fait que certaines boutiques en surface soient encore pourvues en eau, vêtements ou conserves, la persistance de ces artefacts est, elle, documentée à la fin du récit. D’autant que la catastrophe ne semble pas dater de plus de 3 ou 4 générations.

Tous ces détails forment un récit qui, à défaut d’être original, est cohérent, efficace et dense, sans temps mort, ce qui est heureux puisque l’intrigue est cousue de fil blanc.

Un petit aparté sur les Monstres, aussi dénommés Mutants dans le livre. J’ai eu l’opportunité de lire quelques commentaires sur « Enclave » qui les considéraient comme des zombies. Attention, certes, il s’agit d’infectés dont on ignore le mode de reproduction, mais une chose est sûre : les personnes mordues par des Monstres ne deviennent pas des Monstres. Par ailleurs, rien n’indique au cours du récit que les Monstres soient morts avant de devenir… et bien ce qu’ils sont devenus. Ce qui fait que nos Monstres ne correspondent pas à la définition communément admise du zombie, même si on généralise aux films de zombies actuels, que certains qualifient maintenant de films d’infectés d’ailleurs tant ils correspondent eux-mêmes assez peu à la définition historique.
Et tant mieux, un peu d’originalité dans ce paysage souvent stéréotypé qu’est la littérature young adult ne fait pas de mal (hormis les boules à facette sur pieds).


Titre : Enclave (Enclave, 2011)
Série : Enclave (Enclave), tome 1
Auteur : Ann Aguirre
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Charlotte Faraday
Couverture : @Karolina Kumorek / Tommy Kelly / Trevillon Images
Éditeur : Hachette
Collection : Blackmoon
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 316
Format (en cm) : 13,4 x 21,3 x 2,8
Dépôt légal : juin 2013
ISBN : 978-2-01-203106-7
Prix : 16,00 €



Emmanuelle Mounier
12 juillet 2013


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Couverture de la version française



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Couverture de l’édition originelle



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