Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h26
Avec Vincent Lindon (marc), Emmanuelle Devos (Agnès), Mathieu Amalric (Serge), Hippolyte Girardot (Bruno), etc,.
Présenté au Festival de Cannes 2005 (Quinzaine des Réalisateurs), le film a récolté le Label Europa Cinemas.
Romancier, critique, scénariste et réalisateur, le parcours d’Emmanuel Carrère est exemplaire.
Écrivain reconnu, il a naturellement glissé vers le cinéma et offre au public sa propre adaptation de son premier roman : « La Moustache ».
Une première réalisation peut être un exercice casse cou, surtout quand l’œuvre de base est psychologique et introspective. Pari réussi, La Moustache est un film à l’atmosphère étouffante, à l’intrigue hypnotisante et à la mise en scène inspirée.
Marc, architecte parisien, décide un soir de raser la moustache qu’il porte depuis dix ans. Agnès, sa femme, feint de ne pas remarquer le changement et complote contre son époux. Ses amis et ses collègues entrent dans le jeu d’Agnès. Marc décide de couper court à cette blague de mauvais goût... sauf que son entourage nie l’évidence : il n’a jamais porté de moustache. Son monde s’écroule. Est-il devenu fou ?
L’histoire comporte deux volets : le premier se déroule à Paris, plus précisément dans leur appartement et donne une sensation de huis-clos. Le second à Hong-Kong, où Marc prend la fuite. Cette partie contraste avec la première. Les grands espaces, la foule, l’errance contrebalancent le sentiment d’oppression et de folie.
« La Moustache » est un film complexe qui ne rassure pas. Chacun y va de sa propre interprétation sans parvenir à dégager une vérité. Fou ou non, Marc évolue dans un univers décalé de toute réalité, affaibli par une épouse qui le guide et le manipule. Leurs dialogues sont avortés, les explications confuses, et donnent la sensation que les choses n’aboutissent jamais. On a envie de prendre les personnages par l’épaule et de le secouer pour qu’ils réagissent. On éprouve de la sympathie pour Marc, de la pitié même et pour Agnès, un dégoût, preuve que les acteurs ont su incarner avec brio ces personnages atypiques.
L’adaptation du roman à l’écran est une réelle réussite. Carrère préfère les silences aux monologues intérieurs et retranscrit les malaises par les mouvements de caméra (le vertige) ou par les « champs contre-champs » des regards pleins de peur et de curiosité. Carrère reprend ses plus beaux dialogues et laisse l’essentiel de la trame intact. Peu transposable au cinéma, la fin du roman est radicalement différente. Celle qui est offerte aux spectateurs a le mérite de brouiller encore plus les pistes...
En sortant de la salle, on garde de « La Moustache » des impressions multiples et variées. Et si vous ne l’avez pas déjà fait, allez fureter dans les librairies. Le roman de Carrère vous apportera peut-être quelques réponses...
FICHE TECHNIQUE
Réalisateur : Emmanuel Carrère
Scénario : Emmanuel Carrère, Jérôme Beaujour
D’après le roman de Emmanuel Carrère, « La Moustache », P.O.L. (1986)
Productrice : Anne-Dominique Toussaint
Photographie : Patrick Blossier
Son : Laurent Poirier
Costumière : Elisabeth Tavernier
Décors : Françoise Dupertuis
Montage : Camille Cotte
Production : Les Films des Tournelles (France),
Pathé Renn Productions (France), France 3 Cinéma (France)
Distribution : Pathé Distribution, France
Presse : Alexandra Schamis & Sandra Cornevaux (AS Communication, Paris)