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Sept (T13) Sept Détectives
H. Hanna & E. Canete
Delcourt

Depuis toujours, de nombreux fantasmes germent dans la tête des lecteurs. Et si on réunissait tel et tel héros dans une même aventure ? Qui de untel ou untel est le plus fort ? Le plus intelligent ?
Les comics américains, dont est issu le dessinateur de cet album, excellent dans ce domaine. On ne compte plus les cross-over mêlant les univers de diverses bandes dessinées. Ce phénomène reste anecdotique dans la littérature franco-belge.
Dans « Sept détectives », les auteurs font le pari de réunir les sept plus grands limiers fictifs dans une enquête victorienne commune. Un mystérieux génie du crime arrivera-t-il à surpasser cette équipe de prestige ?



Au vu des précédents tomes, surtout ceux de la deuxième saison, la saga “Sept” pourrait se résumer ainsi : un concept très intéressant, un scénario riche et complexe mais auquel il manque quelques planches pour mieux se développer. Très souvent, la lecture de ces livres se fait prenante, captivante, mais souffre de raccourcis narratifs trop brutaux, d’idées mal exploitées. Malgré l’originalité et la richesse de l’intrigue, il manque souvent le petit quelque chose qui ferait de cette BD un incontournable. “Sept dragons” souffrait par exemple d’une conclusion trop rapidement amenée, certains protagonistes de “Sept personnages” manquaient de profondeur, des questions demeuraient à l’issue de “Sept Naufragés”… A chaque fois, on entre dans un nouvel univers, on l’apprécie, on se laisse porter par l’histoire… et on referme le livre avec un léger sentiment de frustration.

Dans « Sept détectives », c’est tout le contraire. La frustration intervient dès les premières planches. L’éditeur se vante en effet d’avoir réuni dans un seul volume les meilleurs enquêteurs de la littérature classique : Sherlock Holmes, le docteur John Watson et l’inspecteur Lestrade de Sir Arthur Conan Doyle, Miss Marple et Hercule Poirot d’Agatha Christie, le commissaire Jules Maigret de Georges Simenon, Philip Marlowe de Raymond Chandler… Wahou ! On applaudie, on trépigne, on en frissonne presque à l’ouverture du livre. Et on se prend une sacrée claque en se rendant compte que tous les noms des personnages ont été modifiés. Question de licence sans doute. Les références sont évidentes à la fois dans l’historique des personnages et dans leur aspect, mais ils ne portent pas le même nom. Quelle déception ! Et puis, finalement, petit à petit, on entre dans l’histoire et on comprend que cette perte d’identité laisse quelques libertés à l’auteur et lui permet de jouer avec les codes du genre. Plus les planches avancent et plus on aime ce que l’on découvre, oubliant totalement la frustration des premières pages. Et comme tout thriller digne de ce nom, cet album se conclut dans l’apothéose.

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L’intrigue se doit d’être vécue pour parfaitement apprécier le suspens. Je ne vous ferai donc pas l’affront de révéler trop d’aspect du scénario. Simplement, le pitch est le suivant :
« Un tueur en série sévit à Londres, en 1920. Près des corps de ses victimes, le meurtrier dépose une requête écrite : il veut que les 7 plus grands enquêteurs du moment se regroupent et partent sur ses traces. Le défi est lancé et Scotland Yard, totalement dépassé, n’a d’autre choix que de s’exécuter. La confrontation des génies est ainsi lancée. »

Le scénario est mené d’une main de maître. Herik Hanna s’inspire de tous les classiques littéraires du genre. Les fans de “Seven” ou des “Dix petits nègres”, pour ne citer que celui-là, ne seront pas déçus. Les indices sont donnés au compte goutte et les rebondissements foisonnent. Au fil de la lecture, on se surprend à établir des hypothèses, à chercher des suspects. Mieux, une fois la dernière page lue, que l’énigme est résolue, on a envie de replonger aussitôt dans la BD pour y desceller les clés cachées qui mènent au meurtrier. Du grand art !
Herik Hanna, pourtant assez nouveau dans le monde de la BD, nous offre des histoires de haut vol à chacune de ses prestations. Il avait déjà participé à une série de David Chauvel, nommée “Le Casse”, dont il a écrit le sixième et dernier opus, “L’héritage du Kaiser”. Pour décrire « Sept détectives », le scénariste utilise ces mots : « toutes les 7 pages à la 7ème case, il y a un 7 dissimulé qui vous renverra aux 7 pages suivantes, révélant les 7 indices cachés dans les 7 couvertures de la collection 7 ». Bien sûr, cette annonce est fantasque mais elle introduit la volonté d’Herik Hanna à totalement exploiter le chiffre 7 dans son récit.
Les dialogues sont très bien écrits, plein de finesses et d’humour, à l’image du raffinement et de la vivacité d’esprit des personnages. L’auteur s’offre même le luxe de jouer avec les langues des différents protagonistes, ajoutant du « en français dans le texte » à certaines bulles. Du coup, bien que, à mon avis, l’histoire ait été écrite intégralement en français, on se demande à certains moments s’il ne serait pas préférable d’avoir une version anglophone du livre sous les yeux, pour pleinement profiter des changements de langues dans les discussions. Le dessinateur étant américain, la traduction était facile. Cet aspect est bien sûr secondaire, mais le souci du détail est louable.

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Côté graphismes, vous ne serez pas déçus non plus. Comme je le disais plus haut, même sans reprendre l’identité complète des plus célèbres enquêteurs fictifs, Eric Canete a su s’approprier les traits principaux des divers protagonistes, comme la moustache d’Hercule Poirot ou la pipe de Sherlock Holmes. On n’a ainsi aucun mal à reconnaître les personnages d’origine.
Le livre commence d’ailleurs par une présentation pleine page de chaque génie. On entre ainsi très vite dans l’histoire. Ces grandes cases sont également l’occasion d’apprécier le style graphique de ce volume. Les décors intègrent un nombre limité de détails, assez bien dosé, comme si les auteurs ne voulaient pas perdre le lecteur dans une trop grande densité d’informations inutiles.
Le dessinateur a principalement participé à des films d’animation issus des Comics américains. Ce style apparaît peu dans les planches de cette BD. Pour représenter cette Angleterre victorienne, ses coups de crayon sont devenus plus caricaturaux, plus torturés. Ses dessins imprègnent parfaitement l’ambiance du one-shot. Les personnages, mis en valeur par les couleurs de Lou, nous font un peu penser au film “L’illusionniste” de Sylvain Chaumet (bien que les teintes et l’ambiance de ce livre soient plus sombres), avec ces cous légèrement surdimensionnés. Est-ce pour donner encore plus de hauteur à ces héros mythiques ?
D’une manière générale, le travail sur les couleurs est assez remarquable. Les jeux d’ombre, les teintes subtiles et les effets de brumes ou de fumées participent grandement à l’ambiance de ce thriller, particulièrement réussi.

Cet album reste pour moi l’un des meilleurs numéros de la saga « Sept », et peut-être même l’une des meilleures BD de ce début d’année 2012. Je vous en recommande chaudement la lecture.

Le dernier tome de cette seconde saison, sans doute le dernier de l’aventure « Sept », paraîtra en août 2012 et s’intitulera “Sept Pistoleros”. Ayala et Chauvel se chargeront du scénario. Ce dernier est l’initiateur et le directeur de la série sept. La boucle est bouclée.


(T12) Sept Détectives
- Série : Sept
- Scénario : Herik Hanna
- Dessin : Eric Canete
- Couleur : Simon Canthelou (alias Lou)
- Directeur de la série : David Chauvel
- Editeur : Delcourt
- Dépôt légal : 23 mai 2012
- Format : 230 x 320 mm
- Pagination : 64 pages couleurs
- ISBN : 978-2-7560-2405-9
- Prix Public TTC France : 14.95 €


A lire sur la Yozone :
La série 7
Sept Psychopathes (T1)
Sept Missionnaires (T4)
Sept Yakuzas (T6)
Sept Personnages (T9)
Sept Clones (T10)
Sept Naufragés (T11)
Sept Dragons (T12)


Illustrations © Eric Canete et Delcourt (2012)



Allison & Julien
6 août 2012




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