Chauve-souris noire ou blanche ?
Et voila Kevin de retour sur l’île du Soleil Levant à Tokyo, alors que les troupes américaines occupent le pays. Le jeune homme retrouve son ancien ami Charlie et lui demande son aide pour trouver qui a bien pu dessiner cette chauve-souris. Mais à ce moment, Kevin n’a pas conscience qu’il est en train d’enquêter sur un des plus grands secrets de l’humanité. Car cette chauve-souris se retrouve sur des documents très anciens et est aussi le symbole d’une secte. Et quand les choses se compliquent, elles tournent souvent au cauchemar, comme quand Charlie lui fait cet horrible chantage et se retrouve mort. Comme quand ce tavernier lui propose de déguiser ce meurtre en accident de train, sous l’oeil bienveillant d’un mafieux local, Kurusu. La vie de Kevin est en train de changer. Mais surtout, pourquoi lui demande-t-on toujours s’il dessine la chauve-souris noire ou la blanche ?
Prémonitions
Dans son désespoir, Kevin parvient tout de même à découvrir qui est le véritable dessinateur de la BD mettant en scène son personnage de Billy Bat. Mais ce n’est pas n’importe quelle histoire qu’il met en images, c’est en fait le futur que voit ce personnage, un futur qui pourrait mener à la destruction du Japon si quelqu’un n’y met pas fin. Et c’est le chaos qui suit Kevin, les morts semblent le poursuivre. Et peut-on encore qualifier de sain d’esprit quelqu’un parlant avec une chauve-souris de bande dessinée ? Toutefois, Kevin n’est pas le premier à être la victime des deux jumeaux ailés. Parmi les tout premiers était un homme du nom de Judas....

La nouvelle série culte de Naoki Urasawa
Il existe des auteurs qui ne peuvent écrire autre chose que des chefs-d’oeuvre, Naoki Urasawa fait partie de ses génies qui nous ravissent à chaque nouveau titre. Et « Billy Bat » risque de marquer les fans du mangaka comme tous les amoureux de policier fantastique, entre « 20th Century Boys » et « Monster ». Pour « Billy Bat », Naoki Urasawa s’associe avec Takashi Nagasaki, qui avait produit « Pluto ».
Et nous voici donc lancés dans l’aventure d’un mangaka qui sera bientôt dépassé par sa création, par Billy Bat, un détective dans la verve d’un Philip Marlowe ou d’un Mike Hammer. En introduisant cette référence au roman noir, plus en fait qu’au comics, même si Naoki Urasawa est un grand fan des comics de cette période, les deux mangakas nous mènent dès le début sur une fausse piste, tout comme les références historiques au maccarthysme et la chasse aux communistes. Allons-nous pencher vers une affaire policière type « Monster » ? Ce sera l’impression donnée par ce début de tome, nous plongeant dans le contexte américain de la fin des années 50 puis au coeur du Japon sous tutelle américaine.
On hésite alors entre un polar et un roman quasi historique, mettant en avant l’incompréhension totale entre les GI américains et la population nippone. Mais nos deux mangakas sont réellement en grande forme pour cette série et ils vont soudain nous faire basculer dans le fantastique, avec une théorie du complot, une secte vénérant la chauve-souris (blanche ou noire ?) et un médium dessinateur de bande dessinée. Nous voici alors plonger dans un récit plus proche de « 20th Century Boys », passionnant, haletant, le pauvre Kevin étant traîné littéralement dans tous les sens, avec ses visions de Billy Bat, le laissant croire qu’il plonge peu à peu dans la folie. Sans oublier cette schizophrénie sur le blanc ou noir de la chauve-souris, alors que Naoki Urasawa ne différenciera à aucun moment les deux créatures sur ses dessins.
Et une nouvelle fois, bascule totale ! Nous prenons définitivement la direction du fantastique en zappant du premier homme sur la lune... au temps du Christ. Les deux mangakas déboussolent complètement leur lecteur, utilisant des flash-back démontrant que la fameuse chauve-souris dirige l’évolution du monde depuis les temps immémoriaux. Mais attention, il ne faut surtout pas se laisser surprendre par ce côté non linéaire du récit de Naoki Urasawa, c’est un peu une de ses marques de fabrique que l’on retrouve dans toutes ses séries. C’est au contraire très intelligent d’abandonner son personnage principale, à la limite de la folie, discutant avec le personnage qu’il a créé tel un Thad Beaumont dans « La Part des Ténèbres » de Stephen King. Le mangaka aime dérouter le lecteur et l’obliger à réfléchir, à revenir en arrière dans son tome pour bien comprendre et peut-être redécouvrir des personnages, par des traits de visages communs ou des noms de famille.
« Billy Bat » part donc très fort. Comme souvent chez Naoki Urasawa, sa lecture ne sera pas triviale mais elle sera évidemment passionnante, prenante et nous laissant sur des cliffhangers haletants qui nous feront désespérer de ne pas avoir déjà le tome suivant entre les mains.
Billy Bat (T1 et 2)
Auteur : Naoki Urasawa
Co-auteur : Takashi Nagasaki
Traducteur : Sylvain Chollet
Éditeur français : Pika
Collection : Seinen
Format : 130 x 180, noir et blanc - sens de lecture original
Nombre de pages : 173 pages + 27 pages couleur (T1), 212 pages+4 pages couleur (T2)
Date de parution : 14 mars 2012
Numéro ISBN : 978-2-8116-0633-6 ; 978-2-8116-0634-3
Prix : 7,90 €
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