Ses bandes dessinées ont toujours ce petit goût agréable des plaisirs simples, des questions naïves souvent pleines d’envie et d’une poésie jouée sur des notes rafraîchissantes allant du romantisme le plus pur à l’hommage. Pour raconter les aventures d’Abelard, c’est sur les tempo écrits par Régis Hautière qu’il règle sa partition. Dans un cadre bucolique et une atmosphère qui pourra rappeler le magnifique film de Jean Becker, “Les enfants du marais”, Abélard, un jeune poussin plein de candeur, vit avec ses amis au rythme d’immuables rendez-vous autour de parties de cartes ou de pêche.
La vie s’écoule, lente, agréable mais sans surprise. Ce petit détail est important car Abélard sent qu’il lui manque quelque chose, mais quoi ? L’arrivée de citadins dans leur voisinage et, surtout, l’apparition de la jolie Epilie vont bouleverser le petit canard au banjo. Si l’amour lui égratigne le cœur, décrocher la lune ou quelque étoile scintillante va devenir son but afin d’impressionner la belle. Bien d’autres questionnements vont se bousculer sous le chapeau d’Abelard, chapeau dont-il tire nombre proverbes et quelques réponses pour alimenter ses rêveries romantiques et sa grande soif d’apprendre.
Pour atteindre son rêve, qu’il a situé si près des étoiles, il décide de rejoindre l’Amérique, là où l’homme commence tout juste à voler ! Pour s’approcher du ciel, de ses étoiles et de sa lune en forme de réponse amoureuse, Abélard prend la route, rencontre des tsiganes, éprouve d’autres bonheurs simples mais aussi les à priori, la haine, la banalisation d’une violence raciste et découvre beaucoup de mots inédits de son vocabulaire. Celui de « pute » - il aimerait bien en connaître la signification - en sera le dernier, tout juste craché par Gaston, l’ours grognon qu’il rencontre juste à la frontière qui sépare un tome 1 d’un tome 2...
Comme souvent avec Dillies, le personnage est aux limites de son univers et aspire à voyager vers l’immense inconnue qu’est l’autre... L’envie est toujours au cœur d’une réflexion qui s’habille d’une infinie tendresse et d’une admirable poésie, tout en dénonçant au travers d’un regard innocent, les aspects nauséabonds d’un monde gigantesque et de ses habitants si différents et si complexes.
Le dessin délicat invite à l’émotion, au partage et à une vision tout en douceur qui n’abdique pas devant la difficulté, l’inconnu ou même l’injustice.
Oui, tout cela est dans cette BD animalière que Régis Hautière et Renaud Dillies vont décliner en deux tomes. Le premier, « La danse des petits papiers » est paru en juin 2011, le second, « Une brève histoire de poussière et de cendre », arrive très vite à la suite, dès le 2 septembre 2011.
Sa petite musique si particulière vous enchantera car s’il y a de grandes BD capables de faire plaisir à l’âme et au cœur, “Abélard” en est une, c’est incontestable.
(T1) La danse des petits papiers
Série : Abélard
Scénario : Régis Hautière
Dessin : Renaud Dillies
Couleurs : Renaud Dillies
Éditeur : Dargaud
Dépôt légal : 3 juin 2011
Pagination : 64 pages couleurs
ISBN : 9782505010357
Prix public : 13,95 €
A lire sur la Yozone :
Bulles & Nacelle
Illustrations © Renaud Dillies et Dargaud (2011)
