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Gauguin : Deux Voyages à Tahiti
Li-An
Vents d’Ouest

Après avoir été reléguées durant des décennies au rang d’ouvrages semi-scolaires (des vies exemplaires, voire des vies de saint) ou bien d’histoires gentiment bien-pensantes (celles de l’Oncle Paul, à titre d’exemple fameux), les biographies dessinées reviennent en force et en maturité, affranchies de toute révérence pesante et, sans tomber dans la facilité, rivalisant sans peine avec des ouvrages de pure fiction. Un bel exemple récent de cette transfiguration du genre est le « Nietzsche » (Le Lombard) de Maximilien Le Roy sur des textes de Michel Onfray, qui fait dans l’audace graphique pour restituer les illuminations mentales du célèbre modèle. Le « Gauguin » de Li-An en est un autre, qui tout en empruntant des voies apparemment plus convenues, n’en restitue pas moins, tout à la fois l’esprit d’une époque et celui d’un créateur en rupture avec elle.



Drôle de parcours, au fait, que celui de Li-An, venu de la science-fiction (“Le Cycle de Tschaï”) pour ensuite, changement de cap progressif, s’immerger dans un XIXè siècle dont il revisite les figures tutélaires. En ce sens, son adaptation du roman de Maupassant, “Boule de suif”, aux Editions Delcourt, peut être vue comme une manière de préparer le terrain de cet album-ci. La connaissance que l’auteur a de Tahiti, pour y avoir lui-même résidé, en est une autre. De sorte que c’est tout naturellement que la trajectoire terrestre de Paul Gauguin a pu le séduire, avec ses zig-zags passionnés entre les cénacles culturels du Paris des années 1890 et les couleurs éclatantes des plages et des forêts d’une île de la Polynésie française.

C’est donc avec une belle justesse de ton que Li-An restitue le Gauguin des grands espoirs, lorsqu’il aborde en candide cette terre excentrée et se fait fort d’y fonder l’Atelier des Tropiques, comme d’y renouveler son inspiration loin de la civilisation. Espoirs qui se heurteront vite aux tenaces obstacles de la contingence, pour finir bien plus tard, lors d’un second séjour, dans le misérabilisme. Car Gauguin, quels que soient son talent intrinsèque et les illuminations qui jalonnent sa recherche picturale, n’est pas montré comme l’artiste maudit qu’il se prétendait être mais bien comme le recoupement des indices suggère qu’il était : un homme tiraillé entre ses idéaux et les compromissions, et confondant, de-ci de-là, réel et désirs.

Sans pour autant qu’il faille s’attendre à trouver ici une biographie soucieuse de la véracité dans ses moindres détails, comme une concession à l’esprit d’aventure qu’insufflait à Gauguin la lecture de Stevenson, Li-An se permet même d’imaginer un épisode où ce peintre de l’action mettrait à mal le vilain commerce de trafiquants d’armes. Et peu importe s’il n’en est rien, pourvu que l’épisode colle avec la vérité mentale du personnage. De même qu’il n’est nullement gênant que le dessin de Li-An ne soit pas d’un réalisme photographique : puisque toute vie est en partie rêvée, à commencer par celui qui la vit...


Gauguin : deux voyages à Tahiti
- Scénario et dessins  : Li-An
- Couleurs : Laurence Croix
- Éditeur : Vents d’Ouest
- Collection : Hors Collection
- Dépôt légal : 13 octobre 2010
- Pagination : 104 pages couleurs
- Format : 20 x 6,5cm
- Numéro ISBN : 978-2-7493-0541-7
- Prix public : 15 €


© éditions Vents D’Ouest - tous droits réservés



Alain Dartevelle
11 décembre 2010




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