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Capitaine Écarlate (Le)
Emmanuel Guibert, David B.
Dupuis, Aire Libre

C’est à la fin des années 90 que David B. et Emmanuel Guibert, ces affidés de l’Association, à la fleur de l’âge encore et déjà au sommet de leur art, échafaudèrent de conserve une fiction foldingue et grave à la fois, décalée de l’univers du très décadent et hypersensible Marcel Schwob. Il en résultera, paru chez Dupuis (format album) en 2000 - et à présent réédité dans le nouveau et plus petit format Aire Libre - une bande dessinée proprement stupéfiante.



Stupéfiante oui, car l’on n’est plus certain d’avoir toute sa raison dès qu’on entre dans ce monde où les temps et les lieux sont fondamentalement perméables et où l’existence ordinaire est tissue de prodiges. C’est que Marcel Schwob lui-même - ce Marcel souffreteux qui ne retrouve vigueur que dans les bras de la prostituée Monelle et que dans sa fascination pour les récits d’aventures à la Louis Stevenson - occupe une place centrale, déclenchant au gré de ses humeurs des séquences d’action improbables qui mettent aux prises un mystérieux Capitaine masqué d’or à la maréchaussée du Commissaire Quart-d’Oeil.

Le plus curieux est que l’on accepte sans trop de mal les doux délires que ce monde divergeant charrie... Comme s’il allait de soi qu’on perde la tête dans le sens premier de l’expression, et que cette tête sans corps mène dès lors sa vie propre... Comme s’il n’y avait rien d’anormal à apprivoiser une vague, de sorte qu’il nous est donné d’assister aux évolutions d’un trois-mâts dans les cieux, sur un bout d’océan, par-dessus les toits d’un Paris habité de ces mystères dont parlent les feuilletons populaires. Un Paris que le fameux Capitaine Écarlate, à qui peut chaut de vivre ou de mourir, entreprend de canonner sans vergogne, avant de se frotter à ce dirigeable de la gent policière qui - puisqu’il faut bien une fin et que la raison du plus fort n’a jamais tort -, viendra à bout de ces pirates anachroniques et de leur chef cadavérique.

Véritable synthèse de l’univers de Schwob - qui lui-même s’était plu à mettre sur papier des “Vies imaginaires” -, “Le Capitaine Écarlate” recèle des trésors d’imagination et de poésie sans entrave, qui, à l’époque, préfiguraient et le surréalisme et les frissons populaires qu’allait dispenser le “Judex” de Louis Feuillade... En même temps que se gomment les frontières entre sujet et auteur, entre raconteur et dessinateur... Puisque le fait que les deux signataires de la transposition soient l’un et l’autre aussi à l’aise dans le dessin que dans le scénario - et donc capables de mettre au point en complices les solutions graphiques et narratives les plus appropriées à leur sujet -, n’est certainement pas étranger à la réussite de cet allbum époustouflant.


Le Capitaine Écarlate
- Scénario : David B.
- Dessin : Emmanuel Guibert
- Editeur : Dupuis
- Collection : Aire Libre
- Date de publication : 28 mai 2010
- Pagination : 96 pages couleurs
- Format : 17,5 x 24 cm
- Prix public : 14,50 €
- ISBN : 978-2.8001-4528-0


© Editions Dupuis- Tous droits réservés



Alain Dartevelle
31 août 2010




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