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Or du Prédateur (L’)
Philip Reeve
Gallimard Jeunesse, Folio Junior, roman traduit de l’anglais (Grande-Bretagne), steampunk hommage à Jules Verne, 389 pages, novembre 2007, 7,60€

Après la destruction de Londres, Tom et Esther ont pris la fuite en dirigeable, direction le Nord. Là, sur une cité flottante, il embarque un curieux personnage, le professeur Pennyroyal, visiblement pressé de déguerpir. En effet, l’historien (à l’œuvre contesté par ses plus sérieux collègues) a du monde à ses trousses. Tandis que nos deux héros découvrent les pratiques de la cité mobile d’Arkhangel, qui paie des informateurs pour traquer d’autres villes roulantes et les assimiler, ils se frottent aux Assaillants Verts, des pirates de l’air partisans de l’immobilisme urbain. De vieilles connaissances...
Atterrissant sur l’ancienne capitale Anchorage, dépeuplée, ils vont, à leur corps défendant, pousser la jeune dirigeante de la ville à faire route par-delà le Groenland, en direction du continent mort, l’Amérique !



J’avais déjà été époustouflé par le talent de (ra)conteur de Philip Reeve à la lecture de « L’Hôtel Étrange ». Avec « L’Or du Prédateur », on quitte le space-opera rétro pour du steampunk pur jus. Ce livre fait suite à « Mécaniques Fatales », qui relate la chute de Londres, mais nul besoin de l’avoir lu pour apprécier pleinement cette aventure. Néanmoins, une fois « L’Or du Prédateur » terminé, on aura envie de se jeter dessus.

Philip Reeve développe un univers alternatif, une uchronie steampunk à la mesure de Jules Verne. Les villes ont évolué (on parle de “darwinisme urbain”) et sont désormais montées sur roues, chenilles ou autres. Un concept qui rappellera aux plus grands « Le Monde Inverti », le roman de Christopher Priest. La majorité des déplacements se font par les airs, dans des dirigeables, les seuls à même de s’amarrer aux plateformes volantes.
Le grand jeu entre ces cités mobiles, les “locomopoles”, est celui de la nature : les plus grosses mangent les plus petites, les fortes mangent les faibles. À ce jeu, c’est Arkhangel qui fait figure de prédateur ultime : la cité a déjà englouti et démantelé de nombreuses villes, récupérant ses pièces, son carburant... Et le monstre a un appétit sans fin, au point de payer des indicateurs pour toute localisation d’une proie. Cette prime à la délation, c’est “l’or du prédateur” qui donne son nom au roman.
Mais l’auteur ne s’arrête pas à cela. Des factions rivales sont présentes : un courant adepte du retour à l’immobilisme, des pirates pas tous d’accord entre eux, un groupuscule de jeunes cambrioleurs vivant dans une cité noyée... (un passage prenant visiblement sa source dans le film « La Cité des Enfants Perdus », de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro. Pour preuve, les moteurs du dirigeable de Tom et Esther sont des “Jeunet-Carot”.)

Aventures, complots, trahisons, sentiments, « L’Or du Prédateur » contient plus que sa part de toutes les bonnes idées indispensables à une histoire menée tambour battant.
On appréciera que les deux héros, Tom et Esther, sortent largement du cadre propret des héros adolescents. Tous deux sont de jeunes adultes, avec les défauts de cet âge : plus réfléchis que des ados, ils en conservent encore quelques faiblesses. Esther éprouve un amour inconditionnel pour Tom, d’autant qu’il est le seul garçon à la trouver belle, alors qu’elle a été méchamment défigurée par un coup de sabre (genre le capitaine Harlock en pire, les plus grands comprendront). Aussi, lorsque la jeune et jolie dirigeante d’Anchorage se met à papillonner autour de Tom, qui ne se montre pas insensible, la jalousie (moteur éternel d’une bonne intrigue) ne tarde guère à s’insinuer partout, jusque dans les mots et les gestes les plus innocents...

Je ne vais pas trop en dire. Juste que la série est terminée. Les tomes 3 « Machinations Infernales » (2009) et 4 « Plaine Obscure » (2010) sont déjà disponibles dans la même collection, et qu’il me tarde de les lire.
Car je le dis, et l’écris ici sans rougir, Philip Reeve est ma découverte de l’année, et je ne saurais que chaudement le conseiller, à tout âge. L’univers fort bien construit, des aventures savamment orchestrées et un travail indéniable sur la psychologie des personnages font de ses romans, et de « L’Or du Prédateur » en particulier, un excellent et inoubliable moment de lecture.

Quelques coquilles, pas de quoi entacher cette quasi-perfection.

Texte - 750 octets
L’or du prédateur - corrections

Titre : L’Or du Prédateur (Predator’s Gold, 2003)
Série : Tom et Esther, tome 2/4
Auteur : Philip Reeve
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Luc Rigoureau
Couverture : David Frankland
Éditeur : Gallimard Jeunesse
Collection : Folio Junior
Site internet : page roman (site éditeur)
Pages : 389
Format (en cm) :
Dépôt légal : novembre 2007
ISBN : 978-2-07-057590-9
Prix : 7,60 €



Nicolas Soffray
19 juillet 2010


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