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Sagesse des Morts (La)
Rodolfo Martinez
Mnémos, Dédales, roman, traduit de l’espagnol (Espagne), policier fantastique, 288 pages, janvier 2010, 22€

Rodolfo Martinez, auteur espagnol, a eu l’immense joie de recevoir en cadeau un coffret contenant des manuscrits écrits de la main du docteur Watson. C’est chez un antiquaire londonien qu’un de ses amis a trouvé des aventures inédites de Sherlock Holmes ! Et surtout, leur lecture prouve que sir Arthur Conan Doyle n’était que l’agent littéraire du docteur qui a bel et bien existé, tout comme le grand détective.
Rodolfo Martinez s’est bien sûr fait un devoir de traduire les trois enquêtes que Watson avait préféré garder sous silence. En effet, les deux premières défient la raison.



Rodolfo Martinez est né en 1965. Ses écrits mêlent aussi bien la science-fiction, le fantastique que la littérature générale et lui ont valu plusieurs prix en Espagne. Après quelques nouvelles publiées en revues ou en anthologies, son œuvre la plus célèbre est enfin traduite en français.

« La Sagesse des Morts » est considéré comme un roman, mais à y regarder de plus près, il s’agit avant tout d’un court roman, suivi de deux nouvelles, le tout étant lié par une introduction et des notes de Rodolfo Martinez, afin de donner un cachet d’authenticité à l’ensemble. Par ce biais, l’auteur, qui revendique uniquement la traduction des trois aventures narrées par le docteur Watson, cherche à montrer que Sherlock Holmes n’est pas une pure invention de l’esprit.
Le procédé n’est pas novateur, mais il possède le mérite de rendre « La Sagesse des Morts » plus consistant que si l’on avait juste affaire à trois enquêtes à la suite. D’ailleurs, cette originalité sert bien le propos du livre.

Dans la présentation de l’auteur, on voit qu’il aime mélanger les genres. Ici, le fantastique (dans le premier et le second texte) interfère avec la réalité. Dans le court roman « La Sagesse des Morts », Rodolfo Martinez s’abreuve à l’imaginaire de H.P. Lovecraft. En 1895, le père de l’écrivain cherche à s’approprier le Necronomicon. Sherlock se découvre alors un adversaire redoutable, expert en déguisement.
À ce propos, l’illustration de couverture avec ses tentacules n’est guère représentative du contenu, les seules allusions textuelles au reclus de Providence reposant sur le livre de l’Arabe fou Abdul al’Hazred et sur la présence de W.C Lovecraft, son père. À nouveau, Martinez donne une légitimité à une création de l’imaginaire.

Il récidive dans la nouvelle “Depuis la Terre au-delà de la forêt” où les protagonistes de « Dracula » de Bram Stoker sont à l’honneur. Sherlock trouve vite la solution de l’énigme posée par la mort de lord Saville, même si elle n’entre pas dans le cadre de la logique. Van Helsing et le docteur Seward viendront prêter main-forte à Sherlock et Watson.

La dernière nouvelle “L’aventure du faux assassin” est anodine. Contrairement aux deux titres précédents, elle ne présente aucun caractère fantastique. Rien dans cette enquête assez banale, après que le détective a pris sa retraite, n’explique qu’elle n’ait pas été diffusée auparavant. L’étrangeté des deux autres nécessitait que Watson les conserve secrètes, alors que pour celle-ci rien ne le justifiait.

Sherlock Holmes est incontestablement le détective le plus connu dans le monde. De nombreux écrivains ont déjà rajouté leur pierre à l’édifice de Conan Doyle, contant des histoires passées sous silence par John Watson (« La Solution à 7 %» de Nicholas Meyer, « Histoires Secrètes de Sherlock Holmes » de René Reouven…) ou inconnues de celui-ci (« Le Mandala de Sherlock Holmes » de l’Indien Jamyang Norbu). Nancy Springer lui a même inventé une sœur, Enola Holmes (« Le Secret de l’Éventail »).

Rodolfo Martinez s’avère à l’aise dans cet exercice délicat de redonner vie à ce tandem hors du commun. Il connaît l’œuvre de sir Arthur Conan Doyle, ainsi que l’écrivain lui-même et sa passion pour l’occultisme, et prend plaisir à jouer avec les allusions laissées ça et là par Watson. Bien des zones d’ombre subsistent, offrant des brèches aux auteurs pour s’y engouffrer.
L’Espagnol ajoute une dimension fantastique avec des références empruntées à Howard Phillips Lovecraft et à Bram Stocker. L’idée est du meilleur effet et rehausse l’intérêt des deux premiers récits. Que l’on soit amateur ou non du détective de Baker Street, on se laissera prendre par ces aventures d’un autre temps.
Le romancier parvient même à instiller le doute : Et s’il y avait un fond de vérité ? Ce personnage hors du commun a-t-il un jour foulé la même terre que nous ?

En conclusion, cet ouvrage des éditions Mnémos s’avère savoureux et instille un incontestable plaisir de lecture. Retrouver le Londres fin du XIXe siècle sous la loupe de Sherlock Holmes est si bon, que l’on oublie sans problème les petites approximations décelées de-ci de-là (il n’est notamment fait aucune mention de la parution de l’édition originale. Mystification de l’auteur jusqu’au bout ?).

Rodolfo Martinez, un nom à retenir !
Et « La Sagesse des Morts », un bon moyen de découvrir ce talent de l’autre côté des Pyrénées !


Titre : La Sagesse des Morts
Auteur : Rodolfo Martinez
Traduction de l’espagnol (Espagne) : Jacques Fuentealba
Couverture : Benjamin Carré
Éditeur : Mnémos
Collection : Dédales
Directrice de collection : Hélène Ramdani
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 288
Format (en cm) : 15,3 x 23,5
Dépôt légal : janvier 2010
ISBN : 978-2-35408-062-4
Prix : 22 €



François Schnebelen
4 juin 2010


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Illustration de Benjamin Carré



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