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Oscar Pill T.2 : Les Deux Royaumes
Eli Anderson
Albin Michel, roman (France), saga façon Harry Potter, 621 pages, mai 2010, 19€

Un an s’est écoulé depuis qu’Oscar a claqué la porte de Cumides Circle, suite aux révélations sur son père. Lorsqu’à l’été suivant les portes des Médicus se rouvrent à lui, il en est très heureux. Il va pouvoir reprendre sa quête de la vérité au sujet de son père, et pour cela il doit devenir un Médicus accompli. Il retrouve ses amis et ensemble, ils vont aller à la conquête du second Trophée, celui de l’Univers des deux royaumes, Eole et Pompée, les poumons et le cœur.



Après avoir terminé « La Révélation des Médicus », je vous avais fait part de mes craintes, plus fortes que mes espoirs. La lecture, plus que pénible, de « Oscar Pill : Les Deux Royaumes », n’a pas dérogé à mes pronostics.

Pour 600 pages de plus, Eli Anderson nous livre une seconde louchée de désespoir littéraire. Certes, il ne fait que continuer sur sa lancée, à savoir reprendre les ingrédients de « Harry Potter » et pondre une saga similaire, en variant un peu l’univers.

Je l’ai dit dans la chronique du tome 1, cet univers est bancal, ce qui est la première grosse, énorme faiblesse d’ « Oscar Pill ».
Les aberrations de logique se succèdent à grand train : on n’a toujours pas vu réapparaître le pouvoir de guérison d’Oscar, et de manière générale, les Médicus se préoccupent relativement peu de la santé. En fait, on se demande ce qui les occupe.
Les Univers, dans lesquels ils se projettent (c’est-à-dire à l’intérieur d’un corps animal) sont mal exploités : les grands maîtres (dans ce second volume, Alistair McCooley) connaissent des « habitants » par leur prénom, mais si on y réfléchit, il existe autant de versions de chaque Univers que d’êtres vivants, soit 6 milliards rien qu’en comptant les humains, qui ne sont qu’une faible portion du règne animal sur cette planète. On s’interrogera donc perpétuellement sur l’intérêt, la logique, de plonger dans celui-là plutôt qu’un autre, et de la probabilité d’y trouver ce qu’on cherche ou de rencontrer un Pathologus.
Ces derniers font d’ailleurs profil bas. Hormis le Prince Noir, qui se dévoilera en fin de volume (rhaa, zut, je vous ai gâché la fin…), il n’y a qu’une allusion, page 228, à des rumeurs de maladies étranges apparues “en France, en Italie et en Asie”. Quand on regarde quelques années en arrière, entre la grippe aviaire, la vache folle, la légionellose et dernièrement la grippe A, on se demande bien ce que fabriquent les Pathologus dans « Oscar Pill ». En fait, rien. Ils complotent, sans coup d’essai, pour remporter la victoire d’un coup. Enfin, je suppose…
Dans le même esprit de ne-cherchez-pas-à-comprendre, on s’étonnera qu’à la fin de cette aventure Alistair fasse remarquer à la reine de Pompée, après la “bataille finale”, qu’une alliance avec les Médicus lui serait profitable, avec la guerre qui couve et dont les prémices viennent de se jouer dans son palais. Mais voilà, elle est la reine de l’Univers du cœur d’un vieux buveur, fumeur, qui a failli faire une crise cardiaque dans l’histoire à cause de ses vices. Je ne vois pas trop pourquoi les méchants Pathologus s’en prendrait à lui, et ensuite il est vieux et fatigué, et ce serait incompréhensible (mais bon, comme le reste) que les Médicus s’échinent à garder un vieux bougon comme lui en vie (surtout avec les milliers de gens qui meurent de maladie dans le monde, pour ne pas parler des seuls enfants dans les pays du Tiers-Monde).

Bref, le principal handicap de l’univers conçu par Eli Anderson, c’est qu’il fait la part belle à l’individu (dans le corps duquel on se projette) là où il aurait fallu de l’universel, des champs de bataille métaphoriques symbolisant la santé de la population d’un continent, et où les effets d’un camp ou l’autre auraient eu un véritable impact. Honnêtement, dans ce second tome, on se fiche éperdument que le vieux Léonid casse sa pipe, on est surtout obnubilé par cette question : pourquoi diable envoyer des apprentis Médicus dans le corps d’un buveur et fumeur invétéré, et pas un organisme sain ?

Voilà, si vous arrivez à surmonter tout cela, vous arriverez peut-être à accrocher aux grosses ficelles de ce second volume. Comme convenu, le sournois bras droit du Grand Maître s’avère… sournois, en flanquant dans les pattes d’Oscar son propre apprenti : Ronan Moss, la brute du collège ! Il est aussi Médicus, ça tombe bien (et ça explique le coup du tunnel à la fin du tome précédent). Eli Anderson reste par contre muet sur ce qui s’est passé depuis l’an dernier (13 mois séparent les 2 tomes), visiblement les évènements de l’an dernier n’ont eu aucune conséquence. Consternant… Presque autant que la justification de ce temps passé (un « calendrier intérieur » d’obtention des Trophées, dont on ne saura pas plus).
Moss, au-delà de la symétrie de leurs patronyme (intéressant, non ? c’est ce que j’ai trouvé de plus subtil), est la parfaite antithèse d’Oscar, violent et lâche, impatient et gâté. Il ne fait à aucun moment mystère de sa haine de Pill. Un vrai Draco Malefoy au rabais. Et Fletcher Worm oscille toujours entre Malefoy père et Severus Rogue, bien que ce second tome montre qu’à moins d’un miracle, il n’arrivera jamais à la cheville du roi de la duplicité de Poudlard. Tilla enfile le costume de la jeune fille fatale, tandis que Carrie, la petite sœur de Ronan, se glisse dans celle de la petite amoureuse qui ne le sait pas encore, façon Ginny Weasley (qui à la fin du 7e tome, est mariée avec…)

Je passe rapidement sur le quartier de la ville avec des bâtiments célèbres, dont une tour Eiffel, quartier qu’Oscar n’avait jamais vu, même de loin ! Un quartier digne de Las Vegas, culminant à plus de 250 mètres, dans lequel les Médicus ont installé un labo d’armes expérimentales à faire pâlir James Bond… Et dont l’entrée est tenue par une pin-up écervelée qui fait bafouiller le jeune Alistair… Et dire qu’on est dans du roman jeunesse…

Il y a presque de bonnes idées : Alistair McCooley s’avère un jeune maître torturé par la folie de son père, que tout le monde ou presque lui jette sans cesse au visage. Les péripéties de « Les Deux Royaumes » vont lui faire douter de sa propre santé mentale, doute que le lecteur partagera au fil de l’intrigue. Enfin… en faisant abstraction de la scène-clé (Alistair est renversé par une voiture et conduit à une clinique pour des radios, vite fait bien fait), d’une imbécillité qui frôle l’absolu. Outre le fait que nous sommes dans un univers de santé, et qu’on aurait préféré une réponse “magique” à l’accident, son traitement, bradé en deux pages, empeste l’embrouille de si loin que même un enfant ne s’y laissera pas prendre. Et qui a déjà mis les pieds dans une clinique sait qu’il est bien rare de passer des radios et de repartir les mains dans les poches, au bout d’une demi-heure ! Et l’auteur est censé être médecin !

Bref, un concept bancal, une histoire cousue de fil blanc, des personnages aussi épais que des clichés, des méchants pas fabuleux, un récit qui traîne en longueur pour respecter le sacro-saint calendrier (et encore, ici Oscar et ses amis doivent assembler 2 demi-trophées, donc ils vivent le double d’aventures !) et remplir son quota de pages.
Encore 3 Univers à découvrir, 3 Trophées à rapporter, 3 fois 600 pages d’une écriture plate ou horrifiante d’effets ratés (page 552 : “Oscar tenta d’oublier le vacarme assourdissant qui déchirait toutes les secondes le parfait silence des lieux…” Le silence interrompu toutes les secondes, personnellement je n’appelle pas ça du silence).
Pour « Le Secret des Éternels » à paraître, je passe la main. Il y a tellement plus de bons livres à lire, aussi si vous avez plus de 12 ans, faites comme moi, ne perdez pas votre temps avec cette soupe tout juste bonne à caler les estomacs les moins exigeants.

Pas mal de coquilles, plus on avance.

Texte - 1.8 ko
Oscar Pill - Les deux royaumes - corrections

Titre : Oscar Pill - Les Deux Royaumes
Série : Oscar Pill, tome 2/5
Auteur : Eli Anderson
Couverture : Miguel Coimbra
Éditeur : Albin Michel
Site internet : page roman (site éditeur), site de la série
Pages : 621
Format (en cm) : 15 x 22,9 x 4,3
Dépôt légal : mai 2010
ISBN : 978-2-226-20939-9
Prix : 19 €



À lire également sur la Yozone :
- Oscar Pill T.1 : La Révélation des Médicus


Nicolas Soffray
17 juin 2010


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